Ouestafnews – En matière de santé, les priorités de l’Afrique sont-elles bien comprises ? A la faveur de la panique mondiale, beaucoup de moyens ont été mis dans la lutte contre le Covid-19, alors que le cancer et d’autres maladies non transmissibles tuent plus que cette pandémie.
Depuis fin 2019, le cancer a fait « six fois plus » de morts que le Covid-19, selon Rafael Grossi, chercheur à l’Agence internationale de l’Energie atomique (AIEA). Ce qui fait du cancer « le plus grand danger pour les populations des pays en développement, devant le Covid-19 ».
L’Afrique a enregistré plus de 171.000 décès liés au Covid-19, entre mars 2020 et avril 2022, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Rien qu’en 2020, le cancer a tué 711.000 personnes en Afrique, selon la même source.
Le chercheur Rafael Grossi, dans un article diffusé par Project Syndicate (plateforme mondiale de diffusion d’articles de réflexion) défend l’idée que les morts imputables au Covid-19 en particulier, et aux maladies transmissibles en général, restent inférieures à celles causées par le cancer et autres maladies non-transmissibles.
Malgré tout le bruit sur le Covid, si l’on en croit ce chercheur, pour l’Afrique, le cancer représente une plus grosse menace.
Là où les pays du Nord ont réussi entre 2000 et 2015 à réduire de 20 % les risques de décès liés au cancer, l’Afrique, elle, affiche un taux de morts dues au cancer de 30 % supérieur à la moyenne mondiale, précise Rafael Grossi. Par ailleurs, le cancer tue deux fois plus que la tuberculose. Il tue également plus que la malaria en Afrique.
En 2020, la tuberculose a tué 417.000 personnes en Afrique selon le CDC Afrique (Centre de Contrôle des maladies, une agence de l’Union africaine). Selon les chiffres de l’OMS, 95 % des morts du paludisme dans le monde en 2020 se trouvait en Afrique, soit plus de 595.000 décès.
Au niveau mondial, les inégalités sont encore plus criardes. Dans les pays développés, sept enfants sur dix survivent au cancer à bas âge alors qu’en Afrique ce chiffre descend à moins de trois sur dix, selon Rafael Grossi qui rajoute que « d’ici 2040, le cancer tuera chaque année 11 millions de personnes dans les pays en développement. »
Absent des priorités
Le manque de moyen reste la principale cause de la vulnérabilité des populations africaines au cancer. Une étude menée par des chercheurs de l’Institut Pasteur de Tunis révèle que « 23 pays du continent ne disposent même pas d’une machine de radiothérapie et 70 % des Africains n’ont pas accès à ce traitement qui est pourtant nécessaire pour plus d’un patient sur deux ».
L’étude ajoute qu’en plus d’un manque d’équipements médicaux, l’Afrique souffre aussi de l’absence de ressources pour la recherche et d’expertise dans ce domaine.
Le fait que ces deux problèmes ne soient pas parmi les priorités des pays africains explique l’insuffisance dans la mobilisation des moyens et la mise en place des équipements pour contrer les dangers du cancer.
Le Covid-19, apparu dans le monde fin 2019 et en Afrique à partir de mars 2020, a complètement chamboulé la marche du monde, déstabilisé les systèmes de santé, fait arrêter la croissance de l’économie mondiale en raison des mesures drastiques. En Afrique, comme ailleurs dans le monde, d’énormes moyens ont été déployés pour faire face à la maladie.
Depuis son apparition, un décompte quotidien est fait presque à l’échelle de la planète, créant une psychose sans précédent au sein de l’opinion publique mondiale. Malgré tout, l’épidémiologiste Yap Boum II de Médecins sans frontières rappelle qu’il ne faut pas « céder à la psychose. » Selon ce médecin qui a travaillé sur les épidémies d’Ebola et de rougeole, le Covid-19 est un réel danger mais il ne doit pas faire oublier les autres maladies bien plus graves.
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