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Ces personnalités africaines indésirables à Paris…

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Le Sénégalais Oumar Sankharé, professeur de lettres à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) et le Burkinabè Halidou Ouédraogo, président d’honneur du Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des peuples (MBDHP), se sont vus refuser l’entrée en France en l’espace de quelques jours. M. Sankharé voulait se rendre en France pour des raisons professionnelles, suivi d’un contrôle médical et M. Ouédraogo pour des raisons médicales.

Ces rejets ont rapidement déclenché des réactions hostiles et indignées contre la France dans le milieu étudiant et culturel africain, au sein de la presse et sur le réseau Internet. En ligne de mire, l’attitude jugée « méprisante » par les Africains des consulats français. Occasion pour de nombreuses voix de s’élever chez les étudiants, écrivains et citoyens pour réclamer avec colère l’application de la règle de « réciprocité » dans l’attribution des visas, le Sénégal étant resté, 50 ans après les indépendances, un des rares pays africains à ne toujours pas exiger des visas d’entrée aux Français..

Le professeur Sankharé, qui se présente fièrement comme « seul sénégalais avec Léopold Sédar Senghor » (premier président du Sénégal indépendant) à être agrégé de grammaire française, devait se rendre à Paris pour une réunion du jury du « Prix des Cinq Continents », dont il préside le comité Afrique, ainsi que pour un contrôle médical.

Quant au burkinabè Ouédraogo, d’après le site faso.net, il s’apprêtait à effectuer une visite, pour un suivi médical. D’après le site
Burkina24.com, il a menacé lors d’une conférence de presse le 30 juin 2012 à Ouagadougou de porter plainte contre le consulat si sa santé venait à se dégrader.

A Dakar, une douzaine d’étudiants de la faculté des lettres et sciences humaines de l’Ucad, outrés par le sort réservé à leur professeur, s’étaient rendus devant l’ambassade de France le lundi 2 juillet 2012 pour exprimer leur colère.

« On s’est senti concerné car nous sommes amenés à être des intellectuels. Nous n’avons pas seulement parlé pour monsieur Sankharé, mais pour tous les universitaires qui ont subi ce traitement », témoigne El hadji Mohamed Lamine Seydi, étudiant à l’Ucad. Et M. Seydi d’ajouter « ce n’est pas la France qui nous nourrit, si elle ne respecte pas les clauses de réciprocité, elle devra sortir du pays », sous-entendu du Sénégal.

En 2006, le cas d’un autre professeur de droit, El hadj Mbodj, qui n’avait reçu qu’un visa de trois jours pour soutenir sa thèse en France alors qu’il demandait une semaine, avait aussi marqué les esprits. Il avait juré de ne plus poser un pied dans l’Hexagone.

L’affaire Sankharé a aussi déclenché l’ire de l’Association des écrivains du Sénégal (AES) et de l’Association des métiers de la musique (AMS), selon la presse locale. D’après l’Agence de presse sénégalaise (APS, publique), des organisations culturelles envisagent d’organiser une manifestation le 14 juillet, jour de la fête nationale française, pour « dénoncer les pratiques des autorités consulaires françaises ».

Selon le professeur Sankharé, il y a peu, le célèbre musicien sénégalais, Thione Seck avait été confronté à une situation similaire.

Il est vrai que l’artiste en question avait d’abord essuyé un refus avant de finalement recevoir un visa pour une tournée européenne.

Sur la toile, Oumar Sankharé bénéficie également de soutiens : son histoire se partage sur Twitter et une pétition a été mise en ligne par le magazine Actualités Afrique, pour « défendre le deuxième agrégé de grammaire africain ».

Interrogé par Ouestafnews, Oumar Sankharé explique que c’est la deuxième fois qu’on lui refuse un visa pour la France : une première fois en décembre 2011, puis dernièrement en juin 2012. Cela malgré « son amitié avec l’ambassadeur français qui s’est déplacé en personne lorsqu’il a reçu l’agrégation de grammaire ». En réaction, l’intellectuel Sankharé déclare avoir refusé la décoration des Palmes académiques que la France souhaitait lui remettre le 14 juillet.

Cette situation est la résultante de trois facteurs : « un contexte général de crise en Europe qui fait craindre l’immigration, le fait que la France, ancien Etat colonisateur, pense encore qu’elle peut faire ce qu’elle veut avec ses anciennes colonies et enfin la montée du racisme lié au score élevé du FN (Front national, parti français d’extrême droite) en mai 2012 ».

Un phénomène déplorable d’après le professeur, qui rappelle par ailleurs que « les étudiants sénégalais boudent de plus en plus la France pour se diriger vers les Etats-Unis et le Canada ».

Si l’affaire Sankharé a fait grand bruit dans la presse locale sénégalaise, peu de journalistes se sont attardés sur les raisons du refus de lui octroyer un visa.

Monsieur Sankharé l’admet volontiers dans l’entretien accordé à Ouestafnews, il y a derrière ce refus un contentieux financier. Lors de son dernier séjour en France en 2010, à l’occasion d’un séminaire de l’université d’Aix Marseille, il avait dû être hospitalisé suite à une attaque cardiaque. En « conflit » avec sa compagnie d’assurances, la Compagnie Nationale d’Assurance et de Réassurance des Transporteurs (Cnart), il doit encore 46.000 euros (environ 30 millions FCFA) à l’hôpital Nord de Marseille.

A la Cnart, on rejette les accusations de M. Sankharé voulant faire endosser la responsabilité des factures impayées à la compagnie d’assurance. Contactée par Ouestafnews, une source au sein de cette entreprise affirme sous couvert d’anonymat que la police d’assurance de M. Sankharé ne couvre pas des « maladies préexistantes ». L’universitaire, précise la même source, a présenté un rapport médical que réfute le médecin de la société d’assurance qui a demandé à rencontrer le professeur. Pour l’instant l’affaire en est restée là, et la Cnart refuse qu’on l’accuse de ne pas vouloir payer.

Egalement contactée par Ouestafnews, l’Ambassade de France à Dakar par l’intermédiaire de son service de presse s’est refusée à tout commentaire déclarant n’avoir pas de « réactions officielles » sur cette affaire ou sur les raisons jutifiant le refus d’octroyer le visa au professeur sénégalais.

Commentant la polémique sur son blog, le socialiste français Pouria Amirshahi, député des Français de l’étranger, écrit à propos de l’affaire : « notre pays est prisonnier d’une absurde politique de visas aussi vexatoire pour les ressortissants de pays francophones que stupide pour lui-même ».

A côté de ces réactions indignées, quelques petites voix discordantes se font entendre, notamment sur Internet et à travers les réseaux sociaux pour mettre l’Afrique face à ses responsabilités.

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