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Chine-Afrique : le spectre du surendettement

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Ouestafnews – La 7è édition du forum Chine-Afrique s’est ouverte le 3 septembre 2018 sur fond d’inquiétudes. Si de plus en plus la coopération avec Beijing est saluée pour son pragmatisme, le recours massif des gouvernements africains aux prêts chinois, remet en selle le spectre d’un endettement massif.

«Il y a une hausse importante de la dette africaine vis-à-vis de la Chine et le sujet a été comme éludé», estime le journaliste Idriss Linge de l’Agence Ecofin, un site continental spécialisé dans l’information économique.

Avec un volume d’échanges estimé à 170 milliards de dollars, la Chine est devenue le premier partenaire commercial  de l’Afrique. Une relation commerciale au beau fixe qui n’empêche point les observateurs de s’interroger sur les multiples prêts chinois, porteurs d’un potentiel lourd endettement.

«Le fait est qu’on n’a pas une idée de l’ampleur et de la portée des conditionnalités, c’est complexe vraiment», a notamment souligné Idriss Linge au cours d’un échange de courriels avec Ouestaf News.

Pour financer leurs infrastructures (routes, ports, aéroport…), beaucoup de pays africains ont jeté leur dévolue sur l’argent de Pékin, creusant davantage leur dette extérieure. A preuve, plusieurs médias africains et européens ont donné les cas du Cameroun dont 70 % de la dette publique bilatérale est détenue par Pékin ou encore le Kenya où les prêts chinois ont bondi de 54% entre 2010 et 2014.

A l’ouverture du sommet, le 3 septembre 2018, le président chinois Xi Jinping a réaffirmé la volonté de son pays de consacrer 60 milliards de dollars d’aide au continent. Sur ces 60 milliards de dollars annoncés, 15 milliards seront accordés sous forme «d’aide gratuite et de prêts sans intérêts», a précisé le chef de l’Etat chinois.

En marge du sommet, le Nigeria a obtenu un prêt de 328 millions de dollars et la Guinée a signé plusieurs accords de coopération avec Pékin dont un portant sur l’approvisionnement de la ville de Conakry en eau potable.

Une dette de 94 milliards de dollars

La Chine est le principal créancier de l’Afrique, selon la China Africa Research Initiative de l’Université américaine, John Hopkins. Entre 2000 et 2015, Pékin a prêté 94 milliards de dollars à l’Afrique. Soit presque le double du Produit intérieur brut (Pib) cumulé du Sénégal et de la Côte d’Ivoire.

Les institutions multilatérales comme le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont multiplié les avertissements à propos du taux grandissant de la dette publique en Afrique.

«Dans la région, la dette publique est passée, en moyenne, de 37 % à 56 % du PIB entre2013 et la fin de l’année 2016. Dans plus des deux tiers des pays d’Afrique subsaharienne, la dette publique en pourcentage du PIB a augmenté de plus de 10 points, alors que dans un tiers des pays, elle s’accroissait de plus de 20 points », peut-on lire dans la dernière édition du rapport Africa’s Pulse, une publication de la Banque mondiale.

En juillet 2018, Xi Jinping a visité le Sénégal, le Rwanda et l’Afrique du Sud (soit sa troisième tournée africaine depuis son arrivée au pouvoir en 2013). Au Sénégal, Pékin a financé à hauteur de 700 millions d’euros, l’autoroute reliant Dakar et la ville Touba (centre).

Et Au cours de son séjour, le président chinois a inauguré l’arène nationale dans la périphérie de la capitale sénégalaise. Une infrastructure qui suscite beaucoup de questions, car le gouvernement sénégalais avait multiplié les déclarations contradictoires sur son montage financier, semant ainsi le doute au sein de l’opinion.

Au Rwanda, Xi Jinping a signé 15 accords commerciaux, dont un prêt de 126 millions de dollars pour financer deux projets de route.

En Afrique du Sud, il a promis un investissement de 14,7 milliards de dollars, dans le but de booster le volume des exportations sud-africaines locales vers la Chine.

«Aujourd’hui, les pays de l’Afrique au sud du Sahara doivent beaucoup réfléchir sur les prêts accordés par la Chine de même que sur les projets d’installation des usines chinoises (cas de l’Ethiopie) », souligne l’économiste sénégalais El Hadji Mansour Samb, dans un texte envoyé à Ouestaf News.

Aujourd’hui, poursuit-il «la moitié des pays africains ont un ratio de la dette supérieur à 50%, des prêts dont la plus part ont été exécutés inefficacement.»

La présence de la Chine en Afrique ne manque pas de susciter des questions. Il est reproché souvent à l’empire du milieu de ne s’intéresser qu’aux matières premières dont regorge l’Afrique et de ne pas opérer à un transfert de technologie.

Des arguments nuancés par Wu Zexian, ex-ambassadeur de la Chine en RD Congo. «Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui beaucoup d’entreprises industrielles ont été créées en Afrique avec les investissements chinois, que ce soit en Ethiopie, au Kenya, au Cameroun… partout en Afrique vous avez des usines qui n’ont rien à voir l’exploitation des ressources naturelles», a-t-il souligné, dans un entretien avec RFI.

 

MN/ad

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