Ouestafnews – La Banque africaine de développement (Bad) a annoncé le 22 août 2017 l’exclusion du groupe de génie civil chinois, Chongqing International Construction Corporation (Cico) de toute éligibilité à ses financements pour une période minimale de douze mois pour « pratiques frauduleuses ». Mais le cas Cico n’est pas unique. La décision de la Bad va-t-elle faire tache d’huile ?
« Cico sera donc exclu jusqu’à ce que la Bad soit assurée qu’elle ne met pas en péril ses fonds en traitant avec cette entreprise», a révélé le directeur par intérim du Bureau de l’intégrité et de la lutte contre la corruption de la Bad, Bubacarr Sankareh, cité par le communiqué de son organisation.
Après l’expiration de la période de 12 mois, l’exclusion de Cico sera levée, sous réserve que l’entreprise adopte et mette en œuvre un programme de conformité, qui répond aux normes exigées par la Bad. Chongqing international construction corporation est une filiale de la Société chinoise de commerce et d’économie étrangère de Chongqing (CFTEC) qui revendique un capital social de 93 millions de dollars.
Le Groupe Cico a été épinglé pour pratiques frauduleuses dans le cadre d’un appel d’offres pour l’attribution d’un marché de construction, financé par la Bad en Ouganda.
L’enquête, menée par le Bureau de l’Intégrité de la Bad, révèle qu’en 2013, le groupe chinois a surévalué et un projet d’appui au secteur routier, estimant « qu’elle avait exécuté au moins quatre projets similaires au cours des cinq années précédentes ».
En outre l’investigation renseigne que Cico versait dans la fraude en modifiant ses références dans l’optique de gagner d’autres marchés dans le continent. Selon la Bad, l’entreprise chinoise a fait passer un projet routier de « 4,4 kilomètres pour un tronçon de 68 kilomètres ».
« Elle a également exagéré la valeur de ses contrats de référence : un autre contrat d’environ 17,5 millions de dollars fut présenté comme étant d’une valeur d’environ 79 millions de dollars », déplore la Banque. La société chinoise revendique une présence en Asie et en Afrique, avec la création de succursales au Soudan, en Tanzanie, en Ouganda, Jordanie et au Libéria.
D’autres cas…
En 2013, Chongqing international construction corporation (Cico) a été accusé d’entorses au code du travail au Liberia et de mauvaises pratiques envers ces employés. L’entreprise avait formellement démenti ces accusations.
En novembre 2016, au Cameroun, l’entreprise chinoise, Zhongxing Telecommunication Equipment (ZTE) a été accusée, suite à une expertise du ministère des Travaux publics, de surfacturation dans le cadre d’un projet de construction des bâtiments à Yaoundé et Douala devant abriter les centres des données du réseau national de télécommunications d’urgence.
Dans un secteur comme la pêche, un rapport de Greenpeace publié en 2015, dénonçait une vaste fraude au tonnage brut dans trois pays côtiers d’Afrique de l’ouest (Sénégal, Guinée, Guinée Bissau), impliquant des navires chinois entre autres.
Pour M. Sankareh, il appartient à la Bad de « veiller à ce que les fonds qu’elle reçoit des pays donateurs soient utilisés exclusivement pour financer le développement socioéconomique des pays membres régionaux de l’institution ».
Au-delà du cas Cico
Ces bisbilles entre l’entreprise chinoise et la Bad surviennent à un moment où les relations sino-africaines connaissent une croissance significative, en dépit de nombreuses critiques. Celles-ci sont surtout formulées par les anciennes puissances coloniales, en perte de vitesse et sérieusement concurrencées par Pékin sur le continent.
En 2017, les échanges commerciaux entre le continent et la Chine se sont établis à plus de 85,3 milliards de dollars. Soit une hausse de 19% par rapport à l’année 2016, selon des chiffres officiels chinois.
La Chine, depuis 2009 est considérée comme le premier partenaire commercial de l’Afrique. Le volume du commerce bilatéral entre la Chine et l’Afrique a atteint 149,1 milliards de dollars en 2016, selon le président du Conseil chinois pour la promotion du commerce international, Jiang Zengwei, cité par l’Agence Xinhua.
La dynamique haussière des exportations chinoises vers le continent africain est surtout tirée par le secteur des équipements navals, ferroviaires et aéronautiques.
Beaucoup d’observateurs critiquent toutefois la nature de ces relations avec la Chine, précisant que la balance des échanges est nettement déficitaire, au détriment de l’Afrique, qui en plus ne bénéficie pas encore d’un transfert de technologie de la part de Pékin. Les partisans de Pékin quant à eux accusent l’occident et sa machine médiatique de trop se braquer sur la présence chinoise en Afrique.
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