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Covid-19 en Côte d’Ivoire : tourisme et transport au ralenti à l’intérieur du pays

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Ouestafnews – Après la capitale Abidjan, la ville touristique de Grand–Bassam, ainsi que la deuxième ville portuaire, San Pedro, 495 km à l’ouest du pays, constituent les zones les plus affectées par la pandémie du coronavirus. Elles le sont surtout au niveau des activités économiques, tourisme et transport notamment.

Au centre artisanal de Grand-Bassam, à 30 km à l’est d’Abidjan, capitale économique du pays, les plaintes sont récurrentes contre les effets négatifs du coronavirus sur l’activité économique.

Coulibaly Boubacar, spécialisé en meubles et décors, avoue ne plus pouvoir joindre les deux bouts. Ces revenus mensuels pouvaient atteindre le million de FCFA avant l’apparition du Covid-19. Aujourd’hui c’est à peine s’il peut « ramasser 50.000 FCFA ».

Comme Boubacar, Traoré Lamine aussi peine à trouver acheteurs pour ses pots de fleurs.  Idem pour ses collègues au marché artisanal à Grand-Bassam. Oké Aboudramane et Sioné Abiba ne s’en sortent pas mieux dans leur vente d’objets d’art. Si tous ces opérateurs économiques de Grand Bassam connaissent ces difficultés, c’est parce que leurs affaires dépendaient grandement du tourisme. Avec les restrictions sur les voyages, ce secteur connaît un net ralentissement.

« Avant la pandémie, mes produits se vendaient bien, grâce aux visites régulières des touristes européens. Mais là, tout est au ralenti », confie Sioné Abiba qui vient chaque matin ouvrir ses portes pour « éviter de s’ennuyer à la maison ».   

Cité balnéaire et touristique située à 42 km d’Abidjan mais aussi patrimoine mondial de l’Unesco, Grand-Bassam, ancienne capitale de la Côte d’Ivoire, a subi de plein fouet les affres de la crise sanitaire. Outre l’artisanat, les activités touristiques, hôtelières et de restauration sont quasiment toutes à l’arrêt.

« On est resté 4 à 5 mois sans travailler. Tout a été ramené au strict minimum pour faire face à certaines contingences immédiates », explique à Ouestaf News Kablan Adrien, directeur du Groupe « N’Sa Hôtel ». L’établissement se trouve dans une situation que son directeur n’ose pas souhaiter même « à un ennemi ».

N’Sa Hôtel compte 200 chambres et 150 employés. L’établissement prévoyait une hausse de son chiffre d’affaires en 2020, mais la pandémie a plombé ses ambitions et réduit de moitié ses prévisions. Pire, elle lui a imposé des dépenses supplémentaires de 2 à 3 millions FCFA pour, entre autres, l’acquisition de dispositifs de lavage des mains, indique le patron du groupe.

D’une manière générale, les entreprises touristiques, quelle que soit leur taille, ont connu une chute de leurs chiffres d’affaires sous l’effet du coronavirus, souligne Ouattara Alhassan, président de l’Association de l’Hôtellerie et de la Restauration de Grand-Bassam, selon qui, c’est « une catastrophe pour l’industrie du tourisme ».

Sinistrés à 90 %

Le gouvernement ivoirien a certes pris des mesures pour freiner la maladie et assurer « un service minimum » dans les structures touchées mais « pour un secteur comme le tourisme qui contribue au PIB ivoirien à hauteur de 1.500 milliards FCFA/an, les efforts ne sont pas à la hauteur », regrette Ouattara Alhassan. Le PIB nominal de la Côte d’Ivoire était de 34.298,9 milliards FCFA en 2020, selon la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).

Au-delà de Grand-Bassam, la crise sanitaire a également fait des dégâts dans l’industrie touristique de la périphérie d’Abidjan et à l’intérieur du pays. La capitale économique ivoirienne a été l’épicentre de la pandémie, suivie de San Pedro qui, à la date du 15 janvier 2022, compte 623 cas confirmés depuis le début de la maladie. Selon les statistiques du ministère de la Santé, la Côte d’Ivoire compte 80.176 cas confirmés de Covid-19.

Au marché des artisans de Grand Bassam en Côte d’Ivoire, les touristes se font toujours rare à cause du Covid-19./Photo-Ouestaf News.

A San Pedro (sud-ouest de la Côte d’Ivoire), second poumon économique du pays grâce à son port, les propriétaires de restaurants, bars, maquis, hôtels et autres boîtes de nuit ont été contraints de suspendre leurs activités après leur fermeture décrétée par le gouvernement.

Cette période comprise entre avril et juin 2020 a été marquée par des difficultés de trésorerie des entreprises ayant entraîné la mise en chômage technique d’un certain nombre de travailleurs. Les chiffres exacts restent encore à préciser.

Selon une étude du ministère de l’Emploi et des affaires sociales, intitulée « Evaluation de l’impact du Covid-19 sur l’activité des entreprises du secteur formel en Côte d’Ivoire », le pays a enregistré une perte de 22.962 emplois, suite aux mesures restrictives liées à la pandémie, entre mars et septembre 2020.

Le secours financier de l’Etat n’a pas non plus profité à tous, selon des responsables de la Fédération nationale des industries touristiques de Côte d’Ivoire (Fenitourci). Selon Doudou Mbaye, président de cette fédération, seulement 4 opérateurs sur près de 200 entreprises affiliées ont pu satisfaire aux critères d’éligibilité du Programme d’appui du gouvernement au niveau du secteur touristique.

Les trois quarts des opérateurs du secteur touristique à San Pedro dans l’informel et le formel, notamment les restaurants classiques, les maquis, bars, night-clubs, salons de thé et assimilés, en plus de certains petits hôtels et complexes hôteliers, ont été sinistrés à 90 %, affirme, Doudou Mbaye, président régional de Fenitourci.

Ne remplissant pas les critères imposés par l’Etat qui sont entre autres, les certificats de régularité vis-à-vis de la Caisse nationale de Prévoyance sociale (CNPS) et la régularité au niveau des taxes imposées, nombre de ces entreprises n’ont pu bénéficier des fonds de soutien.

Villes en souffrance

Moins touchées, les villes d’Adzopé à 98 km d’Abidjan dans la région de la Mé et d’Anyama à 25 km dans le district du Grand-Abidjan, enregistrent aussi d’importantes pertes. 

A Anyama, baptisée « Cité de la cola », Kablan Roger, éleveur de poulets a vu les bénéfices de son élevage de poulets baisser. De 700.000 FCFA pour chaque lot de 2000 poulets égorgés avant la pandémie, ses profits sont redescendus à 500.000, voire 100.000 FCFA par moments.

A Adzopé, Jean-Jacques Amon, sous-directeur de la société MD Transport (MDT) qui s’active sur l’axe Aboisso-Abidjan-Adzopé, joint au téléphone par Ouestaf News, raconte que la période de Covid-19 a été très éprouvante : « pendant 8 mois environ, les employés ont été soumis au chômage technique. Ce qui leur a causé, au niveau familial, des difficultés pour payer les factures d’eau, d’électricité et de loyer ».

Le stationnement prolongé des véhicules a également occasionné des pannes mécaniques qui, selon Jean-Jacques Amon, ont nécessité des réparations à hauteur de 30 à 40 millions. Une facture d’autant plus lourde à supporter que MD Transport n’a pas bénéficié des fonds publics. Au contraire, l’Etat a continué de recouvrer les taxes de stationnement, les patentes et les impôts.

Toutefois, les employés de la MD Transport, déclarés à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), ont chacun reçu une aide de 120.000 FCFA, révèle le sous-directeur.

Freinage brusque

Lorsque la pandémie est apparue en Côte d’Ivoire, le secteur du tourisme était en train d’amorcer une phase d’expansion. Après avoir contribué au produit intérieur brut (Pib) à hauteur de 6,25 % en 2018, il est monté à 7,3 % en 2019, selon Siandou Fofana, le ministre du Tourisme, qui s’exprimait lors d’une conférence de presse tenue en février 2020 à Abidjan.

Le nombre d’arrivées touristiques en Côte d’Ivoire a atteint 4,2 millions de personnes en 2019, contre un peu plus de 3 millions en 2018.

L’objectif du gouvernement, avant le Covid-19, était de porter à environ 8 % l’apport du tourisme au PIB à l’horizon 2025 à travers la stratégie nationale de développement touristique 2018-2025 baptisée « Sublime Côte d’Ivoire ». Reste à savoir si d’ici là, on se sera débarrassé du virus. 

PK/fd/md/ts


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