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Crimes contre les journalistes : ces cas emblématiques en Afrique de l’ouest

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Ouestafnews – De Norbert Zongo à Ghislaine Dupont en passant par Zakaria Isa, l’Afrique de l’ouest regorge de multiples cas de meurtres impunis. La communauté internationale a commémoré, le 2 novembre de chaque année, la journée internationale contre l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes.

Selon l’édition 2017 de l’Indice mondial de l’impunité publié par le Comité de Protection des Journalistes (CPJ, basé à New York), « environ 93 pour cent des victimes d’assassinat sont des journalistes locaux. La majorité d’entre eux couvrent l’actualité politique et la corruption dans leurs pays d’origine ».

Ce document publié le 31 octobre dont Ouestaf News a obtenu copie, indique que 40% des journalistes tués rapportaient avoir reçu des menaces avant d’être assassinés, soulignant ainsi l’importance des mécanismes de protection adéquates.

Pour le CPJ, qui fait le suivi depuis 1992, les auteurs d’actes de violences et de crimes envers les journalistes agissent dans une grande impunité.

Au cours de la dernière décennie, « justice n’a été rendue que dans 4 pour cent de l’ensemble des cas de meurtre, y compris dans la poursuite des cerveaux derrière ces crimes », lit-on dans ce texte.

Dans l’Indice mondial de l’impunité, douze pays reviennent régulièrement en dix ans de publication. Un classement à la tête duquel trône la Somalie (à côté de l’Irak, de la Syrie, des Philippines) avec 26 journalistes tués durant ces dix dernières années.

Le Nigeria à l’index

Classé au  11ème rang de l’indice, le Nigeria est le second pays africain de ce classement après la Somalie. Dans ce pays, cinq journalistes ont été tués au cours de la dernière décennie et aucun cas n’a fait l’objet d’un jugement devant les tribunaux.

En guise de rappel, l’indice cite le cas « illustratif » du meurtre, le 22 octobre 2011, de Zakariya Isa, journaliste et cameraman à la Nigeria Television Authority (NTA). Un crime pourtant revendiqué par Boko Haram.

Selon Reporters sans frontières (RSF), la secte reprochait à Zakariya Isa de l’espionner pour le compte des forces de sécurité.

Le 24 avril 2010, trois journalistes nigérians ont été assassinés. Edo Sule Ugbagwu du quotidien «The Nation» a été abattu à son domicile à Lagos.

Le même jour, Nathan S. Dabak, directeur adjoint et Sunday Gyang Bwede, reporter au bimensuel The Light Bearer ont été «exécutés à la machette dans la périphérie de Jos», rapporte Reporters sans frontières (RSF).

Le 20 septembre 2009, le rédacteur en chef adjoint du quotidien The Guardian a été assassiné à son domicile par des inconnus.

Norbert Zongo, Deyda Hydara, bientôt la vérité ?

Au Burkina Faso, le 2 novembre 2017, on célèbre le troisième anniversaire de la révolution populaire de fin 2014 qui a chassé Blaise Compaoré du pouvoir, après plus de deux décennies de règne. Deux jours auparavant, François Compaoré, le frère cadet de l’ex-président, soupçonné d’être le commanditaire du meurtre du journaliste Norbert Zongo, a été brièvement arrêté à Paris.

Selon le gouvernement burkinabé, une demande d’extradition a été envoyée aux autorités françaises vu qu’un mandat d’arrêt international pèse sur la tête de M. Compaoré. Assassiné en 1998,  Norbert Zongo (49 ans), journaliste d’investigation enquêtait sur la mort du chauffeur de François Compaoré.

Après plusieurs décennies de léthargie, le dossier a été vite remis sur la table après la chute de Blaise Compaoré. Dans son discours de fête d’indépendance en 2016, le président Roch Christian Marc Kaboré avait appelé à « vider » tous les dossiers pendant devant la justice.

Nul doute qu’avec la demande d’extradition de François Compaoré, l’affaire va prendre une nouvelle tournure. Après la réouverture du dossier en 2015, et l’inculpation de six personnes, des signaux forts étaient attendus. A l’instar de l’affaire Zongo, le cas Deyda Hydara, assassiné en 2004 a connu un vif regain d’intérêt surtout après le départ en exil de l’autocrate Yahya Jammeh.

Le nouvel exécutif incarné par le président Adama Barrow a décidé de faire la lumière sur les crimes et les atteintes aux droits de l’homme reprochés à l’ancien régime, notamment l’assassinat du journaliste Deyda Hydara.

A cet effet, un tribunal gambien a lancé le 17 mai 2017, deux mandats d’arrêt contre deux personnes suspectées du meurtre.

Soit le dernier acte majeur posé depuis le 10 juin 2014 lorsque la Cour de justice de la Communauté économiques des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) a rendu une décision en défaveur de l’Etat gambien qui a « violé » les droits de la victime en manquant de conduire une enquête « sérieuse » sur ce crime. En outre la Cour avait demandé le paiement de dommages et intérêts à la famille de la victime.

2004, année du meurtre de Deyda Hydara, est aussi celui de la mort de Guy André Kieffer, journaliste franco-canadien, tué en Côte d’Ivoire, alors qu’il enquêtait sur une affaire de corruption dans le secteur du cacao ivoirien.

L’affaire Ghislaine Dupont et Claude Verlon

On doit la journée internationale contre l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes à Ghislaine Dupont, journaliste, et Claude Verlon (technicien de radio). Ces deux employés de Radio France Internationale ont été enlevés puis assassinés le 2 novembre 2013 dans le nord du Mali. Quatre ans après, les commanditaires échappent encore à la justice.

« Le nom des coupables, des commanditaires, on les connaît. On pourrait dire qu’il suffit d’émettre un mandat d’arrêt. Mais c’est Kidal, c’est une zone de conflit. Aller les chercher, ce n’est pas simple» fait remarquer Marie-Christine Saragosse, la présidente-directrice générale de France Médias Monde, citée par le quotidien privé sénégalais Le Quotidien.

Selon le rapport 2016 du directeur général de l’UNESCO sur la sécurité des journalistes et le danger de l’impunité, 827 journalistes ont été assassinés au cours de la dernière décennie.

En moyenne, c’est une mort par semaine et dans neuf cas sur dix, les meurtriers restent impunis, constate l’organisation onusienne. Le document indique que les journalistes locaux représentent 95% des cas d’assassinats contre 5% pour les correspondants étrangers.

MN-ON/ad

Lire aussi : le sort des journalistes mérite plus d’attention (libre opinion)

 

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