Last Updated on 20/12/2023 by Ouestafnews
Ouestafnews – C’est souvent de manière individuelle et en ordre dispersé que les Sénégalais se plaignent et dénoncent les conditions dans lesquelles les visas sont délivrés au niveau de certains consulats basés à Dakar. Depuis quelques jours, c’est une trentaine d’organisations de la société civile qui se sont coalisées pour s’insurger contre ces « humiliations » à travers une pétition.
« Inhumaines, humiliantes » : ce sont les termes choisis par une trentaine d’organisations de la société civile sénégalaise pour exprimer leur indignation et dénoncer les conditions dans lesquelles les demandes de visas sont traitées par plusieurs consulats à Dakar.
Ce cri de colère a été exprimé dans une pétition intitulée « Campagne pour des procédures de visa justes et équitables » et lancée sur la plateforme change.org.
Ces entités issues du monde syndical, associatif, communautaire, de la recherche, etc., demandent un « assouplissement des procédures administratives de délivrance des visas », « la suspension de l’externalisation des démarches » et « la réduction de la durée d’attente » avant notification pour le demandeur, entre autres.
Par cette pétition, la trentaine d’organisations relaient un sentiment d’exaspération généralisé nourri par la population à l’endroit de nombreux consulats dont surtout ceux des pays européens et plus particulièrement celui de la France.
Les signataires de la pétition revendiquent également le remboursement des frais de visa si ce dernier n’est pas accordé, la justification des cas de refus et la mise à disposition de voies de recours pour les demandes déboutées.
Le visa constitue une grosse source de revenus pour les services consulaires, qui a poussé le site Afrique XXI a parlé de « business des frontières » dans un article publié en novembre 2022 à la suite d’une enquête fouillée sur le sujet.
Selon cette enquête qui est axée sur la France, « dans les pays africains, le taux de refus (visas) est particulièrement élevé depuis au moins 2015 ». Elle révèle qu’en 2019 avant la survenue de la pandémie de Covid-19, sur plus de 1.450.000 demandes de visa en provenance de 47 pays africains, environ 448.000 ont été refusées, soit un taux de 30,47 %. « C’est presque deux fois plus que la moyenne de l’ensemble des consulats français dans le monde (16 %) », indique le site.
La même enquête précise que le taux spécifique de refus de visas pour le Sénégal en 2019 était de 42,7 %.
Citant le ministère des Affaires étrangères de la France, Afrique XXI indique que la France avait enregistré au Sénégal, plus de 52.500 demandes de visas en 2019. Ce nombre a baissé à 12.500 en 2021.
En novembre 2023, deux députés français, Bruno Fuchs et Michèle Tabarot ont également mis en relief, pour déplorer la politique et les pratiques d’octroi des visas par la France comme une des principales causes du désamour entre la France et les pays africains. Ils présentaient les conclusions de leur rapport d’information de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale française sur les relations entre la France et l’Afrique.
Au moment où explosent les tentatives de migration irrégulière à partir des côtes sénégalaises, « reformer la procédure de demande de visas au Sénégal » est devenue une nécessité, soulignent les initiateurs de la pétition. A cet effet, « il urge de promouvoir les mécanismes de promotion de la migration régulière comme alternative à la situation actuelle à laquelle nos sociétés sont confrontées », ajoutent-ils.
La question de la migration irrégulière fait partie, en ce moment, de celles qui marquent l’actualité au Sénégal. Selon les statistiques des autorités espagnoles, depuis le mois de janvier, plus de 32.000 personnes ont débarqué aux îles Canaries, dont une majorité de Sénégalais.
Lire ici la pétition : Réformer la procédure de demande de visas au Sénégal
Lancée depuis le 24 novembre 2023, la pétition, qui a déjà recueilli plus de 1.350 signatures, dénonce d’autres injustices comme « la commercialisation des rendez-vous » et les trafics qui vont avec. Certains intermédiaires n’hésitent pas à revendre la prise de rendez-vous à des prix pouvant aller jusqu’à 400.000 FCFA, selon les signataires de la pétition.
L’ex-ambassadeur de France à Dakar, Philippe Lalliot, avait explicitement reconnu l’existence de ce trafic, en avril 2023 dans un article du journal sénégalais, Sud Quotidien (privé).
Les difficiles conditions dans les procédures de délivrance de visas ne sont pas spécifiques aux consulats de la France et européens. Quelques pays africains sont aussi critiqués pour des raisons différentes (coûts, durée des visas octroyés…). Il s’agit notamment du cas pour l’Afrique du Sud.
MD-FD/ts
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