Ouestafnews –Le président nigérian Muhammadu Buhari se montre de plus en plus catégorique et a publiquement exprimé son exaspération, face au projet d’introduction de l’Eco, comme monnaie unique dans la zone de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa, huit pays).
Selon le chef d’Etat nigérian, s’ils franchissent ce pas, les dirigeants de l’Uemoa compromettent sérieusement les chances d’intégration et les ambitions que devaient permettre de nourrir une monnaie unique sous régionale sur l’ensemble de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao, 15 pays).
Le débat sur l’Eco, très vieux projet de monnaie unique sous régionale à l’initiative des quinze pays Cedeao a pris une nouvelle tournure depuis décembre 2019. C’était suite à une annonce du président ivoirien Alassane Ouattara, lors d’une conférence de presse conjointement tenue avec le président français Emmanuel Macron. Lors de cette rencontre avec les médias, le président ivoirien avait affirmé que les huit pays de l’Uemoa allaient adopter l’Eco en remplacement du franc CFA.
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Le CFA est utilisé par les huit pays de l’Uemoa, composé de sept anciennes colonies françaises (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, Togo), des pays auxquels s’est ajoutée la Guinée Bissau, une ancienne colonie portugaise.
Pour le président nigérian, qui a relayé sa position sur son compte twitter, « les risques d’échec d’un projet régional sont réels à moins que tous les pays membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest s’accordent avec les objectifs globaux déjà fixés ».
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Ceci est une réponse claire aux pays membres de l’Uemoa qui ont décidé de faire cavalier seul en procédant à l’introduction de l’Eco dans leur zone, faussant la feuille de route préalablement arrêtée par la Cedeao.
Fin juin 2019 lors de la 55è sommet ordinaire de la Cedeao, les 15 pays membres s’étaient mis d’accord sur presque tous les points. A savoir sur le nom et le symbole de l’Eco, sur le régime de change flexible, et sur une adhésion graduelle des EZtats membres, la création d’une banque centrale régionale…
Faux bond de l’Uemoa
La réforme qu’entend introduire l’Uemoa est, sur bien des points, aux antipodes des décisions prises par la Cedeao, et notamment sur la question du taux de change : l’Uemoa compte maintenir la « parité fixe » avec l’Euro comme pour le franc FCFA. Or l’Eco tel que prévu par la Cedeao en juin 2019 à Abuja devra avoir un taux de change flexible. L’autre point de friction, c’est aussi le maintien d’une garantie de la nouvelle monnaie par la France, comme elle le faisait avec le CFA.
« Nous avons pris que la réforme a été approuvée par la France et que la majorité de Etats membres de l’Uemoa ont changé leur législation à cet effet, c’est inquiétant de voir un partenaire prendre autant de mesures sans ouvrir la discussion avec nous », a déploré Muhammadu Buhari.
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Première puissance économique en Afrique et géant incontesté en Afrique de l’ouest où il totalise 67% de la richesse produite, le Nigeria est naturellement appelé à jouer un rôle de premier plan en cas de concrétisation du projet de monnaie unique dans la sous-région.
L’attitude de l’Uemoa ne suscite pas que le rejet du Nigeria, le président ghanéen Nana Akuffo-Addo a lui aussi pris ses distances en soutenant un Eco dans le cadre de la Cedeao.
Condé en phase avec Buhari
Lors d’une réunion extraordinaire des chefs d’Etats et de gouvernements de la zone monétaire ouest africaine (qui regroupe les pays de la Cedeao non membres de la zone CFA), le président guinéen Alpha Condé s’est lui aussi exprimé en faveur de « l’union » afin d’arriver à la concrétisation du projet de monnaie unique, dans le cadre de la Cedeao.
Le chef de l’Etat guinéen veut qu’on reste en phase avec les décisions entérinées dans le cadre de la Cedeao. «Nous devons demander à nos frères de l’Uemoa de respecter la décision que nous avons prise à 15», a déclaré Alpha Condé.
Au cours de cette réunion, le Ghana a été représenté par le gouverneur de sa banque centrale, ce dernier a fait la proposition d’une rencontre virtuelle entre les quinze chefs d’Etats de la Cedeao. Une initiative à laquelle souscrit le président Condé qui est d’avis qu’il faut « clarifier les choses ». «En aucun cas, la Guinée ne saurait adhérer à une zone monétaire sans les 15 Etats, cette position est claire », a insisté Alpha Condé.
MN/on
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