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Exploitation sexuelle et traite des êtres humains dans l’est du Sénégal : la lutte est lancée…

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Ouestafnews – Dans les régions minières de l’est du Sénégal sévit un fléau doublé d’une tragédie humaine : des jeunes filles provenant de la sous-région y sont amenées et soumises à la prostitution et à l’exploitation sexuelle. Ce trafic humain qui dépasse les frontières du Sénégal sera désormais documenté et combattu, selon les promoteurs d’une initiative lancée à Dakar.

Elles ont entre 18 et 30 ans. Elles sont soumises à la prostitution forcée et à l’exploitation sexuelle dans les zones d’orpaillage de Kédougou, région située à 700 km dans le sud-est du Sénégal. 

On trouve parmi le lot des Sénégalaises, mais elles proviennent en majorité des pays de la sous-région, selon les responsables du Centre de recherche et de sensibilisation sur la traite des personnes (Cenhtro, sigle en anglais) qui a commandité une enquête sur le phénomène, auprès de plus de 500 personnes.

Sur ces personnes interrogées, plus de 85 % étaient nigérianes. Le département de Saraya (dans la région de Kédougou) abrite 79 % de ces filles et femmes qui vivent ce drame au quotidien.

Prises au piège de fausses promesses (de la part des trafiquants), les jeunes femmes victimes de ce trafic, une fois sur les lieux se rendent à l’évidence, mais trop tard. Elles peinent à en sortir toutes seules.   

Pour faire cesser cette tragédie, le Cenhtro et l’Initiative de programmation et de recherche africaine pour mettre fin à l’esclavage (Apries) ont lancé ce 21 avril 2022 à Dakar une initiative dont l’objectif et de combattre cette forme d’esclavage qui ne dit pas son nom.

Le programme, étalé sur deux ans, a pour but la prévention et la lutte contre le phénomène de traite d’êtres humains dans la région de Kédougou.

Le trafic sexuel et d’êtres humains est un véritable fléau dans cette région aurifère du Sénégal, selon le directeur du Cenhtro et de l’Apries, Dr. David Okech, qui dirige ces deux programmes basés à l’Université de Georgie (USA) et qui travaillent à mettre fin à ces nouvelles formes d’esclavages. Il trouve inquiétante la pratique de la traite de jeunes filles dans cette région.

Bien que pays très majoritairement musulman, le Sénégal tolère la prostitution pour les personnes âgées de plus de 21 ans, à condition pour les concernées de posséder un carnet sanitaire et de se soumettre à des visites médicales régulières, tous les 15 jours.

Par contre, le proxénétisme est réprimé par la loi. Il en est de même du « détournement de mineur ». Ces dispositions répressives peuvent donc s’appliquer aux personnes qui organisent ces trafics de jeunes filles pour les livrer à la prostitution ou à tous ceux qui les exploitent sexuellement.

Au début des années 2000 déjà, le « fichier sanitaire et social », qui répertorie les travailleuses du sexe au Sénégal, estimait leur nombre à environ 30.000. Ce chiffre ne concerne que celles qui se soumettent aux contrôles sanitaires réguliers. Selon Une récente étude de l’Institut d’hygiène sociale de la Médina à Dakar, il y a 4.652 prostituées répertoriées dans le seul département de Dakar.

Dans la région de Kédougou, c’est l’exploitation des filles contre leur gré, par des réseaux mafieux, qui inquiète les autorités et les organisations qui luttent contre l’esclavage et la traite des personnes. C’est une question « majeure », estime Dr Okech. En plus, le drame revêt un caractère « international » et cela rend la lutte contre le fléau plus difficile, surtout dans un contexte marqué par des crises à répétition en Afrique de l’Ouest.

D’ailleurs, précisera le secrétaire permanent de la Cellule nationale contre la traite des personnes au Sénégal (CNLTP), Dr. Mody Ndiaye, la plupart des victimes de traite humaine dans cette zone sont des ressortissantes de pays de la sous-région ouest-africaine.

Ce qui signifie, selon Dr Ndiaye, que le drame est un problème que le Sénégal partage avec tous les pays de la sous-région. C’est pourquoi, le gouvernement du Sénégal, pour combattre le fléau, collabore avec les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), selon Dr Ndiaye du CNLTP. Cette collaboration se fait à travers l’Accord multilatéral de coopération régionale de lutte contre la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en Afrique de l’Ouest et du Centre. Le Sénégal a signé cet accord en 2019.        

L’article 2 de cet accord prévoit le développement d’un front commun afin de « prévenir, supprimer et punir la traite des personnes par la coopération au niveau international ».

Le fléau de trafic sexuel et de traite humaine, malheureusement, ne touche pas que le Sénégal. Il reste un problème mondial.

Dans la sous-région, de nombreuses femmes originaires du corridor commercial Abidjan-Lagos qui traverse cinq pays (Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin et Nigeria) sont « victimes d’exploitation sexuelles dans les villes situées le long de cette route commerciale ou aux frontières », selon le document stratégique 2015-2020 de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC).

A Cotonou au Bénin, « presque 90 % des femmes impliquées dans la prostitution sont originaires d’autres pays du corridor (Nigéria, Ghana, Togo) », note l’agence onusienne.

Pour la région de Kédougou, le nouvel horizon c’est 2024, qui marque la fin du programme qui vient juste d’être lancé à Dakar. Des réponses concrètes sont attendues et les espoirs grands quant à l’éradication totale du fléau ? Y parviendra-t-on ? Seule l’histoire le dira.

KAN-fd/hts


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