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Face à la crise, le PM du Burkina annonce des mesures d’urgence (DECLARATION INTEGRALE)

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Par Luc Adolphe Tiao*

Cette première rencontre avec vous m’offre l’occasion de renouveler toute ma gratitude au Président du Faso, Son Excellence Monsieur Blaise COMPAORE, pour la confiance qu’il a bien voulu placer en moi, en me demandant d’assumer cette haute fonction.

C’est le lieu pour moi de rendre un hommage mérité à mon prédécesseur, S.E.M. Tertius Zongo, pour son engagement, son dévouement pour la cause nationale et pour les brillants résultats et importants acquis qu’il laisse et qui ne manqueront pas d’inspirer mes actions.

Mesdames et messieurs,
Je mesure l’ampleur de la tâche qui m’est confiée, particulièrement en ces moments de crises sociales que traverse notre pays depuis quelques mois et dont la résolution durable requiert l’engagement et l’implication de tous.

Les événements de ces dernières semaines, s’ils peuvent être assimilés à une crise de jeunesse de notre démocratie, malgré ce qu’il est convenu d’appeler un record de longévité dans notre expérience républicaine, ont démontré que le malaise social qui s’exprime de façon parfois violente et désordonnée, faisant des victimes et de nombreux dégâts matériels, est réel et mérite la plus grande écoute.

Aussi voudrais-je présenter mes condoléances les plus attristées aux familles éplorées et toute ma compassion à celles affectées suite à ces malheureux événements. J’exprime toute ma désolation pour les dommages matériels subis par nombre de personnes dont en particuliers les petits commerçants, les PME /PMI et tous ceux qui ont vu leurs biens personnels détruits. Je présente les regrets du gouvernement à toutes les communautés étrangères vivant au Burkina Faso et notamment les personnels diplomatiques et des organisations internationales, pour les désagréments subis durant ces dernières semaines.

Mesdames et messieurs les professionnels des médias,
Chers amis,

Les critères qui ont conduit à la formation du gouvernement reposaient essentiellement sur la compétence, la disponibilité et l’ouverture d’esprit. La nécessité d’une équipe largement renouvelée et resserrée me semblait indispensable pour répondre aux attentes des citoyens et relever les défis de l’heure.

Sur la base de l’orientation que Son Excellence Monsieur le Président du Faso a bien voulu m’indiquer, le présent gouvernement s’est fixé quatre objectifs majeurs :
• Œuvrer à ramener la paix sociale au Burkina Faso ;
• Restaurer l’autorité de l’Etat ;
• Mettre en œuvre le programme politique du Président du Faso : « Bâtir, Ensemble, un Burkina Emergent » ainsi que les engagements pris pendant la campagne électorale en vue d’accélérer la croissance économique et d’assurer développement durable ;
• Améliorer la gouvernance politique, économique et administrative.

Pour ce faire, nous avons décidé de prendre, dans l’urgence, un certain nombre de mesures en vue de contribuer à l’apaisement du climat social. Il est évident que tous les problèmes soulevés par les partis politiques, les organisations de la société civile dans leur globalité ainsi que les autres couches de la société ne peuvent être résolus dans l’immédiat en raison d’impondérables liés à la capacité de nos ressources et à la conjoncture sous-régionale et internationale.

Le gouvernement a déjà mis en place un mécanisme financier pour venir en appui aux opérateurs économiques, victimes d’actes de vandalisme suite à tous ces événements. Nous avons mis la priorité sur les acteurs les plus fragiles du secteur informel, conscients de la précarité de leurs ressources financières. Ce mécanisme va se poursuivre et concerne également les autres villes comme Koudougou, Ouahigouya, Tenkodogo, Fada.

Outre ces actions d’urgence pour relancer l’activité économique, je puis vous annoncer d’ores et déjà certaines mesures que le gouvernement a prises pour répondre aux préoccupations formulées par les partenaires sociaux et les organisations de la société civile. Elles concernent :
1) Les produits de grande consommation :

Le gouvernement s’engage fermement à prendre des mesures pour la subvention de prix aux consommateurs touchant certains produits de base. Dès la semaine prochaine, une concertation se tiendra qui regroupera le gouvernement, les importateurs de ces produits et les associations de défense des consommateurs, pour examiner nos propositions. A l’issue de cette concertation, les prix retenus seront immédiatement communiqués à la population.

2) Le pouvoir d’achat. Les mesures ici vont se traduire par :

• la suppression de la Taxe de développement communale (TDC). Un projet de loi sera proposé au parlement dans ce sens. Des aménagements budgétaires seront faits au profit des collectivités territoriales. Dans l’immédiat, aucun contrôle de police ne sera exercé pour vérifier si les citoyens sont à jour de la TDC.

• la réduction de l’IUTS. Il sera appliqué dès la fin du mois de mai 2011 un abattement de 10% du taux d’imposition de l’IUTS. Nous avons opté pour cette mesure d’urgence en lieu et place d’une augmentation des salaires du fait que le gouvernement n’a pas une visibilité sur la disponibilité des ressources et au regard des importants efforts consentis dans d’autres domaines. Nous avons demandé aux partenaires sociaux de nous laisser mûrir la question en attendant la prochaine concertation Gouvernement/Syndicats.

• Les avancements des fonctionnaires. Le gouvernement s’engage à apurer toutes les corrections des avancements de 2008 et antérieurs au plus tard en juin 2011. Celles de 2009 au plus tard en septembre 2011.

• La suspension de la tarification des actes médicaux. le décret sur la tarification des actes médicaux est retiré. Une concertation sera engagée avec tous les partenaires concernés pour aboutir à de nouvelles propositions consensuelles.

• La suspension des pénalités sur les factures d’électricité. Il est décidé une suspension exceptionnelle des pénalités de retard de paiement des factures jusqu’en fin juin 2011 sur toute l’étendue du territoire.

3) Le traitement des dossiers spéciaux :

Les dossiers qui ont fait l’objet d’accord définitif au sein du Comité paritaire seront apurés au plus tard fin juin 2011. Ceux en cours de discussion au sein du Comité paritaire feront l’objet de propositions de paiement de la part revenant au gouvernant d’ici la mi mai.

4) Le traitement des dossiers judicaires :

Prenant en compte le caractère spécifique des dossiers judiciaires qu’exige l’indépendance de la Justice, le Gouvernement s’engage à faire tout ce qui est de son ressort pour un jugement rapide du dossier Justin Zongo et des autres victimes des événements du 23 février, si possible, avant les vacances judiciaires. Le même engagement vaut pour les dossiers des élèves tués par balles à Gaoua et Piéla, ainsi que pour les dossiers de détournement dont l’instruction est bouclée, ceci dans trois mois au plus tard. Et enfin, nous nous engageons à apporter des réponses précises, dans les meilleurs délais, aux autres dossiers dits pendants.

5) La sécurité des personnes et des biens :
Elle a été mise à rude épreuve au cours des dernières semaines. Le climat d’insécurité, voire de psychose, qui s’installe de plus en plus dans notre pays ne peut durer plus longtemps. C’est pourquoi mon Gouvernement s’engage à renforcer la sécurité des points sensibles dans les grandes villes, à prendre les mesures nécessaires pour un redéploiement conséquent de la police.

6) Les libertés politiques et syndicales :

Il s’agit là de valeurs imprescriptibles garanties par notre Constitution. Il ne sera jamais question pour mon gouvernement de porter atteinte à ses valeurs sans lesquelles la démocratie restera une coquille vide. Cependant, il est entendu que ces libertés ne peuvent être garanties que si chaque citoyen est conscient de ses droits et de ses devoirs. Il est donc clair qu’aucun acte ne doit être posé en dehors des principes fondamentaux qui sont à la base de l’organisation et du fonctionnement de l’Etat de droit.

Les moments, certes difficiles que nous visons, favorisent des attitudes que l’on ne saurait continuer à accepter. C’est pourquoi, tout en étant soucieux du respect des droits de chaque burkinabè, mon gouvernement mettra tout en œuvre pour restaurer l’autorité de l’Etat dans l’intérêt commun. Aussi, le gouvernement appelle-t-il au sens de discernement de tout un chacun dans cette période difficile et à ne pas poser des actes allant à l’encontre de la loi.

Pour donner suite aux revendications des associations estudiantines, nous décidons ce jour de la levée de la police universitaire. Le Ministre des Enseignements Secondaire et Supérieur et le Président de l’Université de Ouagadougou sont invités à prendre toutes les dispositions pour assurer la sécurité des campus concernés au plus tard le lundi 4 mai 2011.

Mesdames et messieurs,

Notre gouvernance administrative aussi a besoin d’être consolidée par plus de rigueur et de dévouement dans l’exécution de nos missions, quel que soit le niveau de responsabilité. Il nous apparaît alors nécessaire de revoir les conditions et les critères de nomination aux hautes fonctions de l’Etat et garantir ainsi une mobilité aux postes de responsabilité.

De plus, mon Gouvernement veillera à ce que les responsables mis en cause dans des dossiers de mauvaise gestion, de corruption, de concussion, soient immédiatement relevés de leur fonctions, dans l’attente de jugements en bonne et due règle.

Mesdames et messieurs les professionnels des médias,
Au regard du malaise que traverse notre pays depuis quelques semaines, le Président du Faso a instruit le gouvernement à plus d’écoute, de tolérance, de dialogue et de modestie. Il doit être plus accessible ; c’est même une exigence du moment. Je veillerai au strict respect de ces valeurs et dispositions.

Par ailleurs, j’appréhende et comprends la crise de confiance et l’impatience qui caractérisent actuellement nombre de nos compatriotes. Toutefois, je voudrais ici les inviter à renoncer à recourir à toute forme de violence pour s’exprimer et à faire valoir les valeurs qui ont toujours distingué le Burkinabè, à savoir : la discipline, le respect de l’autre, la tolérance et le travail.

La paix et la cohésion sociales constituent le socle de notre civilisation. Elles ont mis notre pays, depuis son indépendance, à l’abri des démons de la division sociale et des intégrismes ; nous devons donc les préserver. Il est grand temps de se ressaisir, de se remettre tous au travail et d’œuvrer à l’édification d’un Burkina prospère, solidaire et rayonnant.

Au-delà de nos différences, nous devons préserver l’essentiel, à savoir la paix sociale, si chère à notre pays.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Chers amis,
Avant de clore mon propos, je ne puis m’empêcher de saluer l’action que vous, femmes et hommes de médias, menez au quotidien dans des conditions souvent difficiles. Votre contribution au renforcement de la démocratie et la paix sociale est fondamentale. Le gouvernement prendra toutes les initiatives tendant à renforcer la liberté de la presse dans notre pays.

Dans cette période délicate, je sais compter sur votre sens du professionnalisme. Et les professionnels que vous êtes, devriez redoubler d’ardeur et de rigueur dans votre travail, conformément aux principes cardinaux de votre métier, conformément aux attentes de votre responsabilité sociale.

*Premier ministre du Burkina Faso


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