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Gouvernance : haro sur ces « chefs d’Etat depuis… »

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Last Updated on 14/02/2011 by Ouestafnews

A la faveur de la chute des régimes Ben Ali et Moubarak, simples citoyens, journalistes, analystes, politologues rivalisent d’ardeur pour miser sur la fin d’une époque, celle des « chefs d’Etat depuis…», disons depuis belle lurette. Ouestafnews a fouillé dans les archives et vous dresse ci-dessous la liste des tous ces présidents aux commandes dans leurs pays depuis plus de dix ans, et qui en ces temps troubles pour les « monarchies républicaines » ne doivent plus dormir du sommeil des justes. Les révolutions citoyennes sont passées par là.

LES VIEUX BOULETS AU PIED DU CONTINENT

Mouammar El Khaddhafi, après le décès d’Omar Bongo en 2009, le « Guide » libyen fait désormais office de doyen des chefs d’Etat du continent. Il est au pouvoir depuis septembre 1969. Kadhafi qui s’est par ailleurs autoproclamé roi des « roi traditionnels d’Afrique », règne en maitre absolu sur la Lybie. Comme jadis Moubarak, on lui prête l’intention de se faire succéder par un de ses enfants. Les analystes disent que les revenus tirés de la manne pétrolière et la politique de « redistribution » mise en place dans son pays, pourraient lui permettre de survivre aux révoltes qui secouent le Maghreb. Mais on sait que dans cette partie du monde, depuis l’immolation du Tunisien Mohamed Bouazizi, plus rien ne sera comme avant.

Mouhamed Abdel Aziz, au Sahara occidental. Qu’elle soit considérée « province marocaine » ou l’autoproclamée République arabe sahraouie démocratique, cette ancienne colonie espagnole, sous prétexte de la lutte pour l’indépendance vis-à-vis du Maroc, est dirigé depuis 35 ans par l’inamovible Mouhamed Abdel Aziz.

Teodoro Obiang Nguéma de Guinée Equatoriale et José Eduardo Dos Santos, figurent aussi dans le lot des anciens, tous deux arrivés au pouvoir depuis 1979 ne l’ont jamais plus quitté. A la tête de pays très riches en pétrole, leurs compatriotes sont pourtant englués dans la pauvreté. Pis, en Guinée équatoriale, les revenus du pétrole sont classés « secret défense » selon le Think Tank américain Foreign Policy/Fund for Peace qui évalue la fortune personnelle du président et de sa famille à 600 millions de dollars. Autre péché impardonnable de la famille présidentielle équato-guinéenne, soutenue par les puissances occidentales comme l’étaient hier Ben Ali et Moubarak, son pays ne connait ni pluralisme politique, ni liberté de presse.

Paul Biya (Cameroun, 1982), Yoweri Museveni (Ouganda, 1986), Blaise Compaoré (Burkina Faso, 1987) et Robert Mugabe (Zimbabwe, 1987) sont tous là depuis au moins deux décennies chacun.
Après 28 ans de règne sans partage, Paul Biya s’apprête encore à briguer un 3ème septennat en 2011 ! Dans un pays potentiellement riche mais connu pour sa corruption endémique, sûr que le peuple n’attend que la belle occasion pour en découdre avec son régime.

Quant à Museveni, longtemps soutenu par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale qui l’ont présenté comme un « bon élève » (?), il s’en donne toujours à cœur joie, et se targue de ses réalisations économiques. Il oublie que Ben Ali avec une croissance supposée maintenue à un taux moyen de 9 % pendant une décennie, avait fait aussi bien ou même mieux, et jouissait également de la bénédiction de l’Europe.

Blaise Compaoré, aujourd’hui âgé de 60 ans, 24 ans au pouvoir, auteur d’un coup d’Etat sanglant et fratricide contre le président Thomas Sankara, il est paradoxalement présenté comme un « faiseur de paix » avec sa médiation dans les crises ivoirienne, guinéenne, togolaise. Mais, avec ses victoires « à la soviétique » depuis l’entrée du pays dans l’ère du multipartisme, il règne en maître absolu sur le Burkina Faso. A coup sûr, les Burkinabés qui rêvent de changement, commencent à se lasser de celui qu’on surnommait il y a très, très longtemps « Le Beau Blaise ».

Robert Mugabe, aujourd’hui âgé de 87 ans, à la tête du Zimbabwe depuis 23 ans, est un héros de la lutte pour l’indépendance de son pays qui s’est progressivement mué en autocrate. Son règne reste marqué par une réforme agraire controversée qui lui vaut d’être traité en « paria » par l’Occident. Malgré les sympathies dont il jouit au sein de l’opinion publique africaine, son entêtement à rester au pouvoir pourrait lui coûter cher et le voir sortir par la petite porte, après s’être pourtant sacrifié pour son pays.

LES CROULANTS DE LA DECENNIE 90’

Idriss Déby Itno du Tchad: sur un continent où le pouvoir ne se cède pas, il fait partie de la vague des « nouveaux » venus mais qui totalisent quand même déjà… deux décennies à la tête de l’Etat. Il est arrivé au pouvoir par les armes en 1990 avec l’appui de la France après avoir chassé son prédécesseur, Hissène Habré. Après 21 ans de règne sans partage et malgré le début de la commercialisation du pétrole, le taux de pauvreté dans son pays de 10 millions d’habitants dépasse les 60%. De quoi nourrir suffisamment les velléités révolutionnaires à l’Egyptienne.

Issayas Afeworki, au pouvoir en Erythrée depuis 1991, date de l’indépendance acquise en vis-à vis de l’Ethiopie. Il a fait de son pays « une prison à ciel ouvert », selon les défenseurs des droits de l’Homme qui décrivent cette nation comme « un mouroir » pour la démocratie et les droits humains.

Denis Sassou Nguesso, après un premier passage déjà suffisamment long (1979 à 1992), le Congolais (67 ans) est revenu au pouvoir depuis 1997 à la tête du Congo. Au total, il cumule 27 ans de pouvoir dans ce pays riche en ressources naturelles notamment le pétrole mais où le taux de pauvreté atteint 60% des ménages, selon un document du Centre d’études et de recherches sur les analyses et les politiques économiques (Cerape) de l’Université Marien Ngouabi. Ses alliances avec la France et les réseaux opaques de la « Françafrique » ainsi que ses relations avec les loges maçonniques sont supposées lui fournir le soutien dont il a besoin pour rester au pouvoir, mais pour pendant combien de temps encore avant que le couvercle n’explose?

Yahya Jammeh, au pouvoir depuis 1994, il a déjà depuis très longtemps franchi la ligne rouge et le seuil du tolérable. Cet ancien lieutenant de l’armée gambienne, auteur d’ un coup d’Etat sur le président Dawda Jawara en juillet 1994, est en plus vivement critiqué pour la répression féroce qui s’abat sur la presse privée et la société civile de son pays. Les nombreuses « tentatives » de coup d’Etat avortées sont un signe révélateur de la fragilité, mais aussi de la paranoïa qui caractérisent son régime.

Ismael Omar Guelleh, au pouvoir à Djibouti depuis 1999. Il fait figure de « bleu » dans cette liste, mais avec onze ans de service, on s’approche déjà de la limite du « raisonnable ». Tout comme Paul Biya et les autres, il a préféré modifier la constitution de son pays en Avril 2010 pour pouvoir se présenter à un troisième mandat, qui pourrait être celui de trop pour lui, si les actuels vents du nord prenaient la direction de la Corne de l’Afrique.

LES DERNIERS DE LA RACE ?

Abdoul Aziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999. Il vient à peine de boucler 12 ans de règne. Ce qui le place juste à la limite du tolérable. Les derniers soubresauts de son opposition prouvent que le peuple commence à perdre patience. La jeunesse algérienne, confrontée à un chômage chronique en dépit de la grande richesse de l’Algérie, pourrait bien s’inspirer des exemples des voisins tunisiens et égyptiens. D’ailleurs les appels à manifester se multiplient depuis le la chute de Moubarak. Pays à suivre.

A cette liste on peut ajouter les grandes déceptions de la décennie 2000: Abdoulaye Wade (Sénégal), Laurent Gbagbo (Côte d’Ivoire) et Paul Kagamé (Rwanda), tous 3 au pouvoir 2000. Après avoir tous les trois incarné l’espoir d’un renouveau pour leurs pays respectifs, ils ne semblent plus tirer les leçons des circonstances ayant permis leur accession au pouvoir. Ils ont tous renié leurs promesses pour des sociétés plus justes, plus démocratiques, plus apaisées et où il fait bon vivre. A preuve leurs trois pays, à des degrés divers, vivent en 2011 des situations de fortes tensions politiques.

Abdoulaye Wade symbolise aujourd’hui la ruine des conquêtes démocratiques pour lesquelles il s’est pourtant battu pendant 26 ans et sa probable candidature pour 2012, que d’aucuns jugent non conforme à la constitution, risque de plonger le pays dans le chaos. Sans parler de ses velléités de se faire succéder par son fils. Il n’a certainement pas encore pris l’avis de Moubarak.

Laurent Gbagbo, comme Wade, fut un des opposants politiques les plus respectés du continent. A l’épreuve du pouvoir, les grandes vertus démocratiques professées pendant les années de braise se sont évanouies, laissant la place à une gestion de type clanique. L’élection présidentielle d’octobre 2010 et le blocage politique qui s’en est suivie sont assez révélateurs.

Quant à Paul Kagame, le nombre d’assassinats et de tentatives d’assassinat d’opposants à son régime ainsi que de journalistes, lui ôte toute crédibilité.

A tous ces trois, qui ont déjà bouclé une décennie de pouvoir, il est bon de lancer un rappel à l’ordre sur les méfaits de l’usure du pouvoir en leur disant : attention à la colère des peuples déçus.

On ne peut terminer ce « who’s who » des « Président depuis… » sans parler des « enfants de »… que sont Ali Ben Bongo, Faure Gnassingbé, Joseph Kabila, enfant-types de ce que l’on a surnommé les « monarchies républicaines » qui respectivement au Gabon, au Togo et en République démocratique du Congo n’ont eu aucun mérite pour accéder au pouvoir, si ce n’est d’avoir bénéficié de réseaux ou de systèmes dynastiques mis en place par leurs pères. Ce contre quoi se sont battus justement les manifestants de la place Tahrir, au Caire, dont le soulèvement a emporté Hosni Moubarak et fait voler en fumée le rêve de succession d’un certain Gamal… Moubarak.

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