Ouestafnews – Les découvertes de pétrole et de gaz au Sénégal aiguisent bien des appétits, au niveau de toutes les composantes de la société. La participation du privé local, à travers la loi sur le «contenu local», est déjà prise en compte par le gouvernement, au moins en théorie. Néanmoins, et dans la pratique, il reste encore selon les experts à savoir comment en profiter pour régler certains problèmes, comme la brûlante question de l’emploi des jeunes.
Attendu vers 2022 ou 2023, la production du premier baril reste encore un rêve. Le Sénégal n’en est donc encore qu’au stade de la recherche et développement, ce qui avec la production constitue «l’amont pétrolier» dans le jargon des spécialistes des hydrocarbures.
Mais au fur et à mesure que les annonces de découverte sont faites, se pose la question de l’emploi des Sénégalais dans ce secteur, et notamment des jeunes.
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Pourtant leur intégration, disent les experts, est plus attendue dans «l’aval pétrolier», autrement dit la phase qui concerne le raffinage, les importations, le stockage, le transport et la distribution.
«Pour que les jeunes puissent travailler aujourd’hui, il faut les former sur les métiers existants», affirme Sékou Diaité, le vice-président des pétroliers du Sénégal. Il s’exprimait au cours d’un atelier du Projet d’appui au développement des compétences et de l’entreprenariat des jeunes dans le secteur porteurs (PDCEJ), tenue le 16 décembre 2019 à Dakar.
Financé par la Banque africaine de développement, ce projet vise à former 2000 jeunes et à construire et équiper un centre de formation sur les métiers du pétrole et du gaz.
«Ce projet va permettre de préparer les jeunes pour qu’ils puissent être employés dans les entreprises sous-traitantes qui vont travailler avec les multinationales qui font de l’exploitation», explique son coordonnateur Moustapha Cissé répondant à une question d’Ouestaf News.
Cette démarche, visant à fournir des ressources humaines qualifiées au secteur pétrolier et gazier, s’est déjà traduite au niveau de l’Etat sénégalais par la mise en place d’un Institut national du pétrole et du gaz. En octobre 2018, 22 étudiants et étudiantes ont été recrutés pour constituer la première promotion.
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Pour le vice-président des pétroliers du Sénégal, cet Institut revêt une grande importance dans la mesure où il peut prendre en compte les besoins les plus urgents en termes de formation et qui sont identifiés dans la phase dite de «l’aval pétrolier».
Demba Diop, Directeur de l’emploi au Ministère de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’artisanat, se plait à rappeler que les «ressources naturelles appartiennent aux Sénégalais», et que la loi sur le contenu local précise en son article 7 que la «formation professionnelle et l’emploi» sont des exigences.
Adoptée le 24 janvier 2019, la loi sur le contenu local vise, entre autres objectifs, l’augmentation de la valeur ajoutée locale et la création d’emplois locaux dans la chaîne de valeur des industries pétrolières et gazières, la favorisation du développement d’une main-d’œuvre locale qualifiée et compétitive.
Cependant, ce que disent les textes n’est pas facile à transformer en réalité sur le terrain. Neuf mois après le vote de la loi, certains acteurs de la société civile disaient encore attendre la matérialisation des objectifs définis.
«Pour l’instant, une bonne partie de ces dispositions ne sont que de vœux pieux qui doivent être mieux encadrés par le décret d’application qu’on attend avec impatience», déclarait Omar Cissé (ENDA) dans un entretien accordé à Ouestaf News, en septembre 2019.
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S’agissant de la formation, certaines structures privées n’ont pas attendus le lancement des programmes étatiques et sont déjà lancées par anticipation dans des offres de formation sur le management des entreprises pétrolières. Reste à savoir ce que valent ces offres et leur pertinence par rapport aux besoins du marché.
Autre petit bémol : dans son intervention à l’atelier du PDCEJ, Demba Diop a invité «à la raison» en soulignant clairement que le secteur des hydrocarbures ne rime pas forcément avec le plein emploi.
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«Sur les plateformes offshore, on a 10 mille emplois provisoires. Et si on monte à l’échelle, on multiplie par dix, c’est 100 mille emplois tout court, directs et indirects inclus», précise-t-il.
D’après les chiffres du Comité d’orientation stratégique du pétrole et du gaz, le projet gazier de Grand-Tortue (conjointement exploité par le Sénégal et la Mauritanie) devrait générer environ 10.000 emplois directs, et 100.000 emplois indirects supplémentaires dans le secteur des services.
ON/mn/ts
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