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Les maux de l’Union Africaine

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Par Chériff Sy*

De Bandoeng en 1955 à Addis en 1963 en passant par Accra qui formalisa le mouvement panafricain, les pères fondateurs de la dynamique unitaire ont rêvé une Afrique libre, indépendante et prospère.

Cinquante ans après sa création l’Union Africaine a mal, très mal à son unité. Ce qu’on a appelé la crise malienne campe bien l’état de l’union et sa panafricanité. Une union forte de 54 pays a été incapable de sauver le Mali de la main de barbus schizophrènes. Il a fallu l’aide de la France par la suite appuyée par le Tchad, pour permettre au Mali de se relever. L’union elle-même ne tend t elle pas la sébile pour mendier partout ? 70% de son budget vient de ses partenaires et autres bailleurs, son siège clinquant a été offert par la Chine. Son imposant bâtiment en construction pour la Commission paix et sécurité est un don de l’Allemagne. Aucune brique venant d’un pays africain.

Certes on ne peut pas dire qu’en cinquante ans l’Union africaine n’a pas avancé. Des chartes et des traités déterminants ont été adoptés même si leurs mises en œuvre sont extraordinairement galvaudées sinon mises à l’écart par nombre d’Etats. Grâce au travail de l’UA, des efforts notables sont faits sur la gestion des crises avec le conseil paix et sécurité et des avancées économiques significatives sont enregistrées à travers le nouveau partenariat pour le développement (NEPAD). Reste que l’UA des peuples se fait toujours désirer dans le charivari des multiples sommets de ce qui semble bien être le syndicat des chefs d’Etat.

Il faut le dire, les deux adversités fortes qui minent l’UA et qui impactent négativement sur ce qui devrait être sa mission originelle, ce sont les Etats et leurs chefs d’une part, et à l’interne la question du leadership et de la gestion des ressources humaines.

A part le président Kadhafi, avec ses démarches brouillonnes et ses prétentions hégémoniques qui a fait bouger les lignes en boostant remarquablement la marche vers l’unité et en provoquant des réformes institutionnelles importantes, la plupart des Etats n’ont fait aucunement montre de renforcer la marche en abandonnant une infime partie de leur prérogative, encore moins de leur souveraineté.

On se souvient encore en 2005 quand Alpha Omar Konaré alors président de la commission de l’Union africaine, avait voulu s’opposer au fait que le jeune Faure succède à son père Eyadema du Togo. Le syndicat avec à sa tête le Président du Gabon, Omar Bongo, a vertement signifié qu’il était un exécutant et non un concepteur. A l’époque Bongo s’était exclamé : « Alpha, il ne sais pas de quoi il parle, il sort il parle wo wo wo wo… ».

Alors le panafricanisme…. très peu de chefs d’Etat y croient ou y pensent réellement, seuls quelques pays ayant accédé à l’indépendance politique par la lutte armée y accordent une importance certaine. Sinon, la question de la libre circulation des biens et des personnes ne devrait plus être une question à résoudre car il est évident que c’est l’une des questions cardinales à même de concrétiser l’unité tant chantée.

La deuxième adversité, c’est au sein de l’UA. Il y a d’abord la question de l’engagement : croire en l’Afrique. Le moins que l’on puisse dire, c’est que dans cette grande institution qu’est l’UA, ils ne sont pas nombreux à faire du panafricanisme leur quotidienneté et à faire de cet idéal le levain de leur travail. La plupart du personnel raisonne non en tant qu’Africain mais plutôt comme ressortissant d’un pays venu chercher des avantages matériels.

Ensuite, il y a cette cacophonie de leadership. En effet, les commissaires étant élus au même titre que le président et le vice-président, ils ont les mêmes mandats. Ils tendent à ne pas accepter que le président ou le vice-président aient un ascendant sur eux. Une telle situation fait désordre et en appelle à une nécessaire réforme ou les commissaires sont élus mais c’est le président qui les affecte selon leur compétence à des postes déterminés.

Enfin, il y a ces personnes « indispensables » qui sont retraitées et qui par des contrats de consultants sont là. « Nous pas bouger » comme le dit la chanson. Ajouter à cela le fait qu’il y a des gens qui trouvent le moyen de voyager entre 100 à 180 jours dans l’année, d’en encaisser bien attendu les avantages financier et le travail est largement plombé. Parce que quand quelqu’un a moins de 40% de présence sur son lieu de travail on ne peut plus vraiment dire qu’il travaille.

L’UA a véritablement mal en son union. La nouvelle présidente de la commission, Dlami Zuma qui entend donner un élan nouveau à l’organisation aura bien du mal à y parvenir si les organisations de la société civile et diverses forces vives ne s’impliquent pas davantage pour la concrétisation de l’idéal panafricain. D’où une nécessaire renaissance…

Ce qu’en disait Nkrumah le 22 mai 1963
« Cette union, nous devons la réaliser. Sans sacrifier nécessairement nos diverses souverainetés, grandes ou petites, nous pouvons dès maintenant et ici-même forger une union politique fondée sur une défense commune une nationalité commune, une monnaie africaine, une zone monétaire africaine et une Banque centrale africaine. Nous devons nous unir afin de réaliser la libération intégrale de notre continent. Il nous faut créer un système de défense commune, dirigé par un commandement suprême africain, pour assurer la stabilité et la sécurité de l’Afrique. Nous avons été chargés de cette tâches sacrée par nos peuples, nous ne pouvons pas leur manquer et trahir leur confiance. Nous tournerions en dérision les espoirs de nos peuples si nous montrions la plus minime hésitation ou si nous apportions le moindre retard à aborder objectivement cette question de l’Unité africaine. »

*Chériff Sy, est journaliste, directeur de publication du journal Bendre (Burkina Faso) et par ailleurs Président du Forum des Editeurs africains

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