Depuis sa visite du 17 mai 2014 à Kidal et les affrontements meurtriers qui ont suivi, faisant il est vrai payer à l’armée malienne un lourd tribut, la polémique ne cesse d’enfler autour de Moussa Mara, le ci-devant Premier ministre du Mali.
Pour évoquer ce sujet tragique, il importe d’abord de s’incliner devant la mémoire de la cinquantaine de soldats maliens tombés en défendant leur patrie et de regretter (ce qu’officiellement on présente comme) le « manque de coordination » qui a valu à l’armée sa lourde défaite. Ensuite, il importe de condamner sans équivoque le lâche assassinat d’une trentaine de fonctionnaires de l’Etat malien.
L’Afrique a été suffisamment morcelée et divisée pour qu’on y soutienne ou justifie encore quelque action séparatiste, où que ce soit !
Ceci dit et le recul aidant, on peut revenir sur le sens de cette visite qui vaut aujourd’hui à M. Mara d’être voué aux gémonies par quelques éditorialistes et d’être la cible d’une opposition politique réclamant (importunément ?) sa démission.
Descendre à Kidal fut pourtant un acte de courage politique et de haute portée symbolique de la part de ce Premier ministre qui a quand même réussi – à la différence de son prédécesseur, Oumar Tatam Ly – à poser les pieds dans Kidal et par là prouver aux Maliens, que Kidal est bien malienne.
Au contraire de son prédécesseur, il a refusé de rebrousser chemin et de laisser Kidal devenir de facto un territoire sous contrôle de forces « indépendantistes » et étrangères. En le faisant, il a joint l’acte patriotique à la parole, et a surtout donné vie à un principe « non négociable », à savoir la souveraineté du Mali. Il a démontré par le geste que Kidal reste et restera malien. Point sur lequel tous ceux qui réclament sa tête se disent pourtant d’accord. Mais alors que lui reproche-t-on ?
Ne pas aller dans ce bastion de la rébellion, c’était accepter de fait une partition du pays et rendre davantage creux la formule, « le Mali d’abord ! », un des slogans du président Ibrahim Boubacar Keita, garant de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale du pays.
En dépit de l’amertume qu’a pu causer dans le cœur des Maliens, la déroute de leur armée, ils devraient se féliciter d’avoir un Premier ministre qui refuse de laisser l’illusion de « l’autonomie » et de « l’indépendance » perdurer aux yeux des irrédentistes. Des irrédentistes dont la puissance de feu actuelle, soulève aujourd’hui beaucoup de questions.
Par quelle alchimie ou par quelle combine s’est faite ce réarmement et cette remobilisation des troupes séparatistes après leur déconfiture de 2012, face aux islamistes armés qui s’étaient rendus maîtres du septentrion malien ?
Comment expliquer la complaisance de la communauté internationale vis-à-vis du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ? Comment comprendre le jeu trouble de la France, dont l’intervention militaire était supposée aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale ?
Il est vrai que face à la déferlante des services de communication combinés de la diplomatie et de l’armée françaises, ces questions ont été vite noyées la « débâcle de l’armée malienne ». C’est réglé et on en parle plus.
Il faut dire que du côté de Bamako, en plus des erreurs militaires, la faiblesse des services de communication a fait perdre l’autre bataille, celle de l’opinion. Car les guerres se gagnent aussi dans le champ de la communication.
Quoi qu’il en soit, la classe politique malienne dans son ensemble gagnerait aujourd’hui à faire bloc autour de cette question vitale : que faire pour que le Mali recouvre la totalité de son territoire, et laisser de côté l’opportunisme politicien.
A notre humble avis, l’union sacrée autour du Mali, menacée de partition, est la meilleure posture à adopter dans de telles circonstances.
Une fois cette union sacrée réalisée, le Mali et les Maliens, pour sortir de l’impasse, devront peut-être faire appel à de nouveaux « amis », ceux sur lesquels ils comptaient jusque-là les ayant ouvertement trahis et abandonnés en plein milieu du gué !
Enfin que Mara démissionne ou pas, peu importe, dans le fond, cela ne changerait que très peu à la donne, car les défis resteront les mêmes pour le Mali et le président président Keita acculés de toutes parts et obligés de négocier en position de faiblesse.
*Momar Nang est journaliste à Ouestaf News
Voulez-vous réagir à cet article ou nous signaler une erreur ? Envoyez-nous un message à info(at)ouestaf.com.