Mauritanie : présidentielle dans le dernier bastion de l’esclavage

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A côté du lancinant problème de l’esclavage qui sévit encore dans le pays et qui frappe les Haratines (maures noirs), ce pays qualifié aussi de dernier bastion de l’Apartheid, pratique « l’exclusion » systématique et organisée d’autres groupes ethniques (Pulaar, soninké, wolof…), communément connus sous le vocable générique de Négro-mauritaniens. L’espace public leur est peu ouvert, et la présidentielle qui approche ne semble pas y changer grand-chose.

« Ces élections ne sont nullement consensuelles et ne sont porteuses d’aucune réponse satisfaisante à la crise politique que traverse le pays », arguent les membres du Front National pour la Démocratie et l’Unité (FNDU) pour expliquer les raisons de leur boycott de l’élection présidentielle.

Le FNDU, qui regroupe une dizaine de partis politiques et des organisations de la société civile, dénonce la rupture du dialogue politique et accuse la majorité au pouvoir de mener unilatéralement le processus électoral.

La fixation du premier tour au 21 juin ne rencontre pas l’assentiment de la majorité de l’opposition, qui appelle d’abord à une série de mesures préalables comme la formation d’un gouvernement consensuel, la neutralité de l’Etat et la mise en place d’une nouvelle commission électorale.

« Il est impossible de maintenir la date du 21 juin si nous voulons organiser une élection consensuelle selon les garanties de transparence demandées par l’opposition », déclarait Mohamed Jamil Mansour, le leader du parti islamiste Tawassoul.

Comme pour le scrutin législatif de décembre 2013, on s’achemine vers un boycott massif de l’opposition. A quelques heures de la fin du délai de dépôt des candidatures, prévu ce mercredi 7 mai 2014 à minuit, le Conseil constitutionnel annonce n’avoir reçu que deux dossiers, celui du président sortant Mohamed Ould Abdelaziz, et l’autre du président du parti Elwiam, Bodiel Ould Houmeid, ancien ministre de la Santé sous le magistère du président Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya.

Le scrutin qui s’annonce tendu, se déroule aussi dans un contexte de tensions sociales avec la dispersion brutale, le 04 mai 2014 de la marche des ex-réfugiés mauritaniens, un acte fortement condamnés par des organisations de société civile locale.

Ces réfugiés composés essentiellement de Négro-mauritaniens protestaient contre leurs conditions de vie et la non-tenue de plusieurs engagements pris par les autorités relativement au processus de réintégration: acquisition des papiers d’état civil, restitution des terres, situation des fonctionnaires anciennement déportés, entre autres.

En soutien aux ex-réfugiés, le Comité de suivi du Manifeste sur les droits politiques, économiques et sociaux des Haratines (anciens esclaves supposés « affranchis »), accuse dans une note transmise à Ouestafnews, l’Etat mauritanien de n’avoir pas respecté les termes de l’accord tripartite signé en 2007 avec le Haut-Commissariat des Nations-unies pour les réfugiés (HCR) et le Sénégal.

Cet accord était à la base du retour dans leur pays d’origine de 25.000 Négro-mauritaniens victimes collatérales du conflit qui a éclaté entre agriculteurs sénégalais et éleveurs maures en 1988 et qui a fini par dégénérer.

« Malheureusement l’essentiel de ces promesses sont restées lettres mortes et nos compatriotes, après prés de vingt années de calvaire en exil, continuent de souffrir le martyre », déplore cette organisation de la société civile.

Connue pour la diversité de sa population, la Mauritanie est un des rares pays au monde où l’esclavage persiste encore et en dépit des condamnations fréquentes de la communauté internationale, l’Etat ne parvient toujours pas à légiférer de façon définitive.

Par ailleurs en dehors du système esclavagiste, la domination et le contrôle de l’Etat par les Beydane (Maures blanc) est une grande source de frustration pour les autres composantes du pays.

A l’approche du scrutin, le sujet a donc refait surface et pourrait marquer la campagne électorale, surtout que le gouvernement mauritanien en collaboration avec l’Organisation des nations-unies (Onu) avait promis l’adoption prochaine d’une « feuille de route » qui à terme permettra d’éradiquer l’épineux problème de l’esclavage.

Très sceptiques, les organisations engagés dans la lutte contre l’esclavage, dénoncent une autre manœuvre dilatoire à travers cette « prétendue feuille de route », dont l’annonce est intervenue après la visite dans le pays de Gulnara Shahinian, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur les formes contemporaines d’esclavage, à la fin février 2014.

« C’est un leurre comme toutes les autres initiatives mensongères précédentes de ce gouvernement », dénonce, Biram Dah Abeid, le président de l’Initiative de Résurgence du Mouvement Abolitionniste (IRA), dans une correspondance avec Ouestafnews.

Plusieurs lois incriminant l’esclavage ont été votées dont la dernière en date remonte à 2007. Mais le problème reste vivace, rappellent souvent les mouvements abolitionnistes qui se plaignent aussi de l’emprisonnement de leur militants.

« Rien n’est fait concrètement pour punir les maitres esclavagistes qui sont souvent protégés au plus haut sommet de l’Etat », note pour sa part Hanoune Dicko, secrétaire général de l’Association des Haratines de Mauritanie en Europe (A.H.M.E),

Ce phénomène de l’esclavage touche principalement la communauté des Haratines qui constitue une grande partie de la population mauritanienne. Cependant le pays est depuis son accession à l’indépendance sous le contrôle du groupe minoritaires des Beydanes.

Ancien maire de la commune de Rosso, Yerim Fassa, issu de la minorité wolof, lui a saisi ce contexte préélectoral pour dénoncer la faible représentation de sa communauté dans l’administration mauritanienne.

Mohamed Ould Abdel Aziz, est élu à la tête du pays en 2009, ancien putschiste, ce général de l’armée mauritanienne est le meneur du coup d’Etat d’août 2008 qui renversa le président élu, Sidi Ould Cheikh Abdallahi.

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