Il s’exprimait dans un entretien accordé au magazine sénégalais Intelligences avant son limogeage, dont il conteste la légalité tout en disant qu’il le fait pour « le principe », n’ayant aucune intention de retourner au poste.
« Nous disons qu’avant même de songer à une monnaie unique, il faut essayer de promouvoir l’intégration économique en renforçant les échanges entre nations, la liberté de circulation entre les personnes, des capitaux », déclarait le désormais ex-gouverneur de la BCN dans cet entretien.
Selon le banquier nigérian, il importe de s’interroger si nous ne sommes pas en train de mettre la charrue avant les bœufs, en voulant mettre en place la monnaie unique.
Depuis plus d’une décennie, l’Afrique de l’ouest tente d’avoir une monnaie unique pour l’ensemble des pays de la sous-région, mais n’arrive pas encore à réaliser ce rêve.
« En Afrique les échanges entre les pays africains n’atteignent même pas les 10 % ! Faut-il donc perdre son indépendance monétaire pour réduire les taux de transaction sur des échanges qui représentent moins de 10% de notre commerce ? », s’est interrogé Lamido ?
« Un exemple : le Nigeria est un producteur de pétrole qui importe des produits pétroliers comme l’essentiel des pays africains. Ne serait-ce pas une bonne chose si le Nigeria cessait d’importer ces produits en construisant des raffineries qui profiteraient également aux autres pays africains ? Si l’on achetait l’essence du Nigeria, il y aurait alors un sens à aller vers les monnaie unique pour éviter les conversions de monnaies », a-t-il encore dit.
Selon M. Lamido, il en serait de même si nous importions du riz ghanéen plutôt que d’aller vers la Thaïlande. En matière de monnaie unique, ce dernier identifie une condition – clé qu’est la discipline fiscale.
« Comment s’assurer qu’une fois parvenu à un consensus autour des critères de convergence, qu’il y aurait une bonne discipline fiscale ? Comment réconcilier ce désir d’une banque supranationale avec la souveraineté individuelle de chaque nation ? », s’est-il demandé.
Selon Sanusi Lamido, « il ne faudrait certes pas se limiter à une approche théorique, mais, il faut prendre le temps de bien réfléchir aux préalables », à l’instauration d’une monnaie unique en Afrique de l’Ouest.
Une réunion sur l’entrée en vigueur des textes portant création d’une deuxième zone avec une monnaie unique en Afrique de l’Ouest, dénommée Zmao (Zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest) devrait se tenir juin 2014.
Cette seconde zone compte l’essentiel des pays anglophones de la sous – région (Liberia, Sierra Leone, Ghana, Gambie, Nigeria) en plus de la Guinée
Les chefs d’Etat de la sous-région ont fixé à 2021 le délai pour la réalisation d’une monnaie commune et d’une banque centrale unique en Afrique de l’ouest.
En décembre 2013, lors du sommet France – Afrique de l’Elysée, des experts africains et français avait lancé une initiative qui prenait le contrepied du projet de monnaie unique ouest africaine, en proposant une extension du Franc CFA aux pays non-francophones de l’Afrique de l’ouest et du Centre afin de constituer une « vaste zone de stabilité monétaire », selon les termes de Hubert Védrine, ex-ministre des Affaires étrangères en Français.
Selon des économistes ouest africains, comme l’Ivoirien Nicolas Agbohou, ou encore le Sénégalais Demba Moussa Dembelé, le Franc CFA est vu comme un instrument de domination coloniale et surtout, le principal facteur du retard économique des pays d’Afrique francophone.
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