Ouestafnews – La fermeture des frontières terrestres et aériennes pour stopper la propagation du Covid-19 a eu un impact sur les hôtels au Niger. Faute de clients, la plupart sont restés fermés. Aujourd’hui, ces établissements tentent de se relever non sans difficultés.
Dans le hall de l’hôtel Ténéré à Niamey, l’ambiance est timide. Les nombreux fauteuils installés sont pratiquement vides. Il faut aller à l’étage pour constater des mouvements du personnel qui s’active dans la mise en place des tables pour des pauses déjeuners. En ce mardi 6 juillet 2021, l’hôtel accueille cinq séminaires.
Depuis la réouverture des frontières le 1er août 2020 et la levée de la mesure interdisant des rencontres en présentiel décidée en conseil de ministres le 22 mai 2020, l’activité des hôtels reprend petit à petit.
« Pour le moment, ce sont les séminaires qui nous permettent de tenir. L’hôtel n’a jamais organisé autant d’ateliers », explique Hamadou Ousseini, directeur général de l’hôtel Ténéré qui précise avoir transformé son bar en salle de conférence.
Pour les hébergements, la reprise est très timide. Selon Hamadou, son hôtel a enregistré 80% de perte de son chiffre d’affaires et il traine des arriérés de paiement pour l’électricité, l’Internet, l’eau…. « Même pendant le confinement, les charges de fonctionnement sont restées les mêmes »,précise-t-il.
Selon une étude de l’Association nigérienne des professionnels du tourisme et de l’hôtellerie (ANPT/H), au plus fort de la pandémie (mars – juillet 2020), en moins de deux mois, les hôtels, toutes catégories confondues, ont subi une perte de 12 milliards FCFA en termes de chiffre d’affaires.
Pour combler les pertes économiques enregistrées, beaucoup d’hôtels ouvrent leurs portes aux séminaires et autres cérémonies de mariages et d’anniversaires.
Pour ce faire, certains ont mis en place toute une stratégie pour attirer les clients.
Téléphone à l’oreille, la trentaine révolue, Haoua Manzo, la directrice générale des résidences FAYEL, note avec minutie les attentes du chargé de projet d’une institution qui s’apprête à organiser une série de formation pour des communicateurs à Niamey.
« Je me suis beaucoup investie pour voir cette formation se tenir chez moi », soutient la directrice générale de l’hôtel qui dit avoir beaucoup développé la communication sur les réseaux sociaux pour assurer la visibilité de son entreprise pendant le confinement. « Aujourd’hui, les fruits commencent à tomber. Avec une capacité d’accueil de 30 chambres, l’hôtel a un taux d’occupation de 40 % ».
La responsable hôtelière informe qu’avec les actions de communication sur les réseaux sociaux, elle a pu se créer une clientèle sur ses spécialités culinaires. « Je continue toujours à livrer à domicile pour les clients qui nous ont fait confiance pendant le confinement »,a ajouté la jeune dame.
Des mesures pour réduire les coûts
Pour atténuer les effets du Covid-19 dans le secteur de l’hôtellerie, le gouvernement a pris des mesures d’accompagnement. Il s’agit notamment de l’application d’un taux réduit de 10% en matière de TVA au lieu de 19 %, l’application d’un taux d’amortissement de 5 % au lieu de 2 % sur les immeubles à usage d’hôtels et l’exonération de l’impôt au titre de l’exercice 2019.
Plus de 800 millions FCFA ont été accordés sous forme de prêts aux établissements hôteliers pour un taux d’intérêt de 3 % en lieu et place de 12 %.
Pour être éligible à ce prêt, il faut répondre à un certain nombre de critères : être une entreprise formelle, avoir des employés déclarés à la caisse nationale de sécurité sociale et avoir un chiffre d’affaires d’au moins 25 millions FCFA par an.
A l’épreuve des faits, seulement une dizaine parmi les 112 établissements d’hébergement que compte la capitale nigérienne a été éligible au crédit, selon un membre du Comité mis en place pour gérer le fonds Covid-19.
Ni l’hôtel Ténéré encore moins les résidences Fayel n’ont bénéficié du prêt. « Nous n’avons pas déposé de dossiers pour accéder au prêt. Quand nous nous sommes renseignés, nous n’avons pas été convaincus par les conditions d’acquisition », explique le premier responsable de l’hôtel Ténéré.
Par contre l’hôtel Terminus, avec une capacité d’accueil de 62 chambres a été éligible au prêt remboursable sur 4 ans. « Ce prêt a permis d’alléger les pertes et surtout de reprendre certains travaux dans les chambres qui sont longtemps restées fermées », reconnait Tourgua Lihidda, directeur général adjoint de l’hôtel Terminus.
« La ligne de crédit accordée aux hôtels fait partie du fonds Covid-19 d’un total de 150 milliards de FCFA que l’État et les banques ont débloqué pour assister les entreprises les plus touchées par la crise », précise la même source du Comité de gestion du fonds Covid-19.
L’hôtel Gaweye, un cas particulier
Si les hôtels tentent par tous les moyens de se relever après la dure épreuve de Covid-19, l’hôtel Gaweye du haut de ses 40 ans d’expérience, menace de mettre la clé sous le paillasson.
Depuis l’apparition de la maladie, le gouvernement a réquisitionné ce réceptif pour accueillir les personnes contacts des malades pour leur confinement de deux semaines. La réquisition a duré du 20 mars au 4 décembre 2020, soit 9 mois. Ce qui a fait que ce fleuron de l’hôtellerie nigérienne est devenu un lieu à éviter.
« L’hôtel est considéré comme la clinique des malades. Au Niger comme dans le monde entier, on sait que c’est Gaweye qui a abrité les personnes contacts, d’où la crainte de la contamination », souligne avec amertume Abdoul Salam, délégué du personnel de l’hôtel Gaweye. Ce dernier ajoute que « l’image de l’hôtel est ternie au point où nous n’arrivons même pas à avoir 10 clients alors qu’on a une capacité d’accueil de plus de 200 chambres ».
Jusqu’en 2019, avant la tenue à Niamey du Sommet de l’Union africaine (UA) qui a vu la construction de plusieurs hôtels de haut standing, Gaweye était le plus grand établissement hôtelier du pays.
Selon des informations recueillies par Ouestaf News auprès du Comité de gestion du fonds Covid-19, le dernier point de la situation fait état d’environ 9 milliards de FCFA d’impayés.
La plupart des fournisseurs ont rompu leur contrat, selon Sanaby Baba Ahmed, directeur général de l’hôtel Gaweye, qui dit avoir lui-même fini par présenter sa démission et les autorités ont déjà accédé à sa demande.
Les quelques 160 agents qui y travaillent risquent de se retrouver au chômage, selon le délégué du personnel, Abdou Salam.
Selon le délégué du personnel, seul l’État peut sauver Gaweye, puisque l’établissement lui appartient. Un sauvetage attendu de la part de la société indienne Bravia. Le Gouvernement nigérien et cette société ont signé un contrat de rénovation.
En attendant une reprise effective des activités touristiques au Niger, touchées aussi par le terrorisme, agents et responsables des hôtels tentent d’abriter les activités locales des organismes nationaux et internationaux pour réduire les charges de fonctionnement.
Au niveau de leur ministère de tutelle, on se dit prêt à mettre les moyens pour éviter que ces établissements ne mettent la clé sous le paillasson. Promesse du tout nouveau ministre du Tourisme, Mohamed Hamid, lors de sa visite de prise de contact aux réceptifs hôteliers.
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