Nigeria : test démocratique sous haute tension

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Le scrutin présidentiel, selon quelques observateurs, s’annonce comme « l’un des plus ouverts » jamais organisés au Nigeria, vaste et riche pays de 150 millions d’habitants connu pour ces processus électoraux chaotiques, souvent ternis par la violence et les accusations de fraudes. La veille même des législatives, les médias faisaient état de « 5 morts » , suite à l’explosion survenue dans un des bureaux de vote au centre du pays, laissant présager un autre scrutin sous haute tension.

Le président sortant, Goodluck Jonathan, né en 1957 est arrivé au pouvoir par un coup du destin en mai 2010 suite au décès du président Umaru Yara’Adua dont il fut le dauphin en tant que vice-président. Il ne pouvait rêver de meilleur tremplin pour faire valoir ses ambitions de présidentiable, malgré l’opposition de la plupart de ses camarades au sein du People’s Democratic Party (PDP), sur fond de dissensions (réelles ou supposées) entre « nordistes » et « sudistes ».

L’ancien vice président Atiku Abubakar avait ainsi jugé « illégitime » l’ambition présidentielle de
Jonathan. La victoire de ce dernier lors des primaires du PDP a clos depuis lors ce débat. Mais désormais une autre bataille difficile attend le chef de l’Etat, dans ce vaste pays souvent décrit comme chaotique et gangrené par le désordre et la violence et où les processus électoraux n’ont jamais été faciles.

La présidentielle de 2007 qui avait conduit au sacre du défunt Umaru Yara’Adua a donné un exemple de ce chaos, avec des accusations de fraudes, de corruption et la désorganisation ayant caractérisé le processus électoral. Aujourd’hui encore, les mêmes accusations font surface, au risques d’entacher une nouvelle fois la sérénité de la série de scrutins qui après les législatives et la présidentielle se poursuivra le 26 avril 2011 par l’élection des gouverneurs.

Preuve de ces difficultés : ces élections générales, initialement prévues pour janvier 2011, ont déjà subi deux reports dus essentiellement à des problèmes d’ordre logistique, selon la Commission électorale nationale indépendante (Inec, selon son sigle anglais).

A la veille des législatives, ces problèmes étaient encore pendants, occasionnant leur report dans près d’une cinquantaine de circonscriptions à travers le pays. Les électeurs de ces localités sont convoqués le 26 avril et voteront en même temps pour les législatives et élire leurs gouverneurs.
En sus des problèmes d’organisation auxquelles fait face l’Inec, la recrudescence de la violence, constitue l’autre grande hantise des Nigérians.

« A cette étape critique de notre développement national, nous ne pouvons nous permettre de nous engager dans des actions qui attisent les braises de la violence et de la discorde », a averti le président Goodluck Jonathan dans un message à la nation prononcé le jeudi 7 avril 2011.

Ces élections générales constituent un véritable test pour le pays le plus riche d’Afrique de l’ouest, qui s’est récemment illustré sur la scène sous régionale, au nom de la défense de la démocratie et de la nécessité de faire respecter le verdict des urnes. C’était à la suite du cafouillage né de la présidentielle ivoirienne. Après une telle agitation pour se faire le chantre de la démocratie, le défi sera désormais pour Goodluck Jonathan de respecter lui-même le verdict des urnes en cas de défaite dans son propre pays.

Ses principaux adversaires sont notamment Nuhu Ribadu, agé de 51ans, ancien président de la commission contre les crimes économiques et financiers (EFCC, selon le sigle en Anglais) considéré comme un héros de la lutte contre la corruption et le général Muhamadu Buhari, qui a été à la tête d’une junte militaire ayant dirigé le pays entre 1982 et 1985.

Dans son programme M. Ribadu estime que l’économie nigériane évolue en deçà de son potentiel. «
Nous voulons une croissance qui favorise la création d’emplois, soutenue aussi bien par le secteur pétrolier que par le secteur non-pétrolier », souligne t-il tout en promettant une « rigueur fiscale afin que le pays ne dépense plus qu’il ne gagne en recettes ».

Sur ce chapitre, le candidat du Congress for Progressive Change (CPC) Muhamadu Buhari a lui aussi promis de relever le taux de croissance qui tourne aujourd’hui autour de 6% par ans, en s’appuyant sur une diversification économique.

Plus de 70 millions d’électeurs sont inscrits pour prendre part à la série de scrutins, pour ces élections générales qui sont les quatrièmes depuis le retour du pouvoir aux civils en 1999.

« Cette fois-ci, nous ne devons pas décevoir notre pays et l’Afrique, le monde entier s’attend à ce que les élections soient libre et transparentes », commentait à la veille du scrutin le politologue nigérian Joseph Ikpéa dans le quotidien The Nigerian Observer.

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