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Hayatou : retour sur la gloire et les revers d’une grande figure du football africain

Ouestafnews – Une semaine après son décès survenu à Paris, le 8 août 2024, les hommages se poursuivent à l’endroit d’Issa Hayatou, ancien président de la Confédération africaine de football (CAF).

Décédé à l’âge de 78 ans, il laisse un souvenir où se mêlent grandes réussites et petites controverses. Ouestaf News revient sur la trajectoire d’un homme qui a marqué le football africain.

Avec près de trois décennies à la tête de la CAF (1988 à 2017), Hayatou est « sans doute celui qui a le plus marqué » l’organisation du football continental, a confié à Ouestaf News le journaliste sénégalais et enseignant-chercheur Mamadou Koumé. Pour lui « le football africain a fait des progrès au niveau de la représentation mondiale et de ses compétitions » grâce à Hayatou.

Lors des 29 ans que le Camerounais a passés à la tête de la CAF, le football africain a connu des transformations majeures. Il a notamment joué un rôle déterminant dans l’organisation de la première Coupe du monde sur le continent africain en 2010, en Afrique du Sud. Cette réalisation, fruit de son influence est saluée par Mamadou Koumé, qui estime qu’Hayatou « est à créditer d’une bonne présidence à la CAF ».

Né le 9 août 1946 à Garoua, dans le nord du Cameroun, Hayatou a gravi rapidement les échelons du sport et de l’administration sportive dans son pays, puis en Afrique. Venant d’une famille riche et influente, le Camerounais s’est choisi le monde du sport pour tracer sa propre voie.

Hayatou, dont l’intérêt par le sport a commencé par l’athlétisme, s’est longtemps battu pour une meilleure représentation du continent sur la scène internationale. Il a œuvré pour l’augmentation du nombre de places allouées aux équipes africaines en phase finale de la Coupe du monde. C’est avec lui que l’Afrique a obtenu cinq places dans la compétition mondiale, contre deux auparavant, a tenu à rappeler le journaliste sénégalais.

En 1970, l’Afrique ne disposait que d’une place sur 16 participants. En 1982, ce nombre est passé à deux avant d’arriver à cinq sous l’ère Hayatou.

Ses réalisations pour le football africain restent partout dans les mémoires, y compris dans les pays au palmarès modeste au niveau du football continental. « Le football africain perd ainsi l’une des plus grandes figures de son histoire », écrit la Fédération bissau-guinéenne de football dans un communiqué en hommage à l’ancien dirigeant de la CAF.

La CAF et le football africain « témoigneront toujours leur reconnaissance au président Hayatou », a indiqué Patrice Motsepe, l’actuel président de la CAF, selon qui, le défunt « occupera à jamais une place » dans les cœurs et les mémoires.

« Issa Hayatou a donné de la respectabilité à la CAF sur l’échiquier mondial du football. Avec lui la Fifa a eu une oreille attentive au football africain » affirme le journaliste malien et ancien candidat à la présidence de la Fédération malienne de football Alassane Souleymane. Selon lui, le Camerounais est « le père de la modernisation du football africain à travers des réformes éloquentes ».

Sur sa page Facebook, le président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot), Samuel Eto’o témoigne que « le président Issa Hayatou a toujours su, par son leadership, son entregent, et son sens du compromis, défendre la voix de l’Afrique ».

La Fédération nigériane de football a, elle aussi, rendu un hommage à Issa Hayatou, saluant son impact profond sur le football africain. «Il était un grand leader très apprécié du football africain et a fait de son mieux pour laisser le football africain plus grand qu’il ne l’a connu », écrit la Fédération dans un communiqué.

Sur le continent africain, la création de la Ligue des champions africaine en 1997, ainsi que les victoires olympiques du Nigeria en 1996 et du Cameroun en 2000, figurent parmi les réalisations notables de sa présidence. Par ailleurs, « au plan des compétitions et de la CAN (Coupe d’Afrique des nations) notamment, il a élargi le nombre de participants à la compétition phare qui est passée de 8 équipes à 32 aujourd’hui », rappelle M Koumé. 

L’ancien dirigeant de la CAF a aussi conduit plusieurs réformes qui ont abouti, par exemple, à la création des compétitions à l’instar du CHAN, le championnat d’Afrique des footballeurs évoluant en Afrique.

Issa Hayatou était « né pour diriger et dirigea de main de maître et passionnément le football africain pour lequel il a tout donné, jusqu’à son dernier souffle », a écrit, sur X (anciennement Twitter), l’actuel premier vice-président de la CAF, Me Augustin Senghor le président de la Fédération sénégalaise de football.

Lire aussi : Football : Issa Hayatou en 10 grandes dates

Malgré ses succès à la tête de la CAF, cet ancien enseignant (professeur d’éducation physique et sportive), n’aura pas connu que la gloire dans sa quête de reconnaissance. En 2002, il est battu par le Suisse Sepp Blatter dans la course à la présidence de la Fédération internationale de football (Fifa). A ce poste, il devra se contenter d’un court intérim, entre octobre 2015 et février 2016, après la chute du même Blatter.

Mais ses revers ne s’arrêtent pas là et Hayatou n’échappera pas aux critiques. Son style de gestion a souvent été décrit comme « autoritaire » et il a été accusé de manipuler les élections au sein de la CAF pour maintenir son pouvoir.

Mamadou Koumé, bien qu’il reconnaisse cette tendance, nuance cependant en affirmant : « il est vrai qu’il fallait avoir son parrainage pour y être admis », mais il refuse de le qualifier de « dictateur du football africain ». Ces accusations de contrôle strict et les soupçons de corruption ont entaché sa réputation, bien qu’il n’ait jamais été condamné pour ces faits. Souleymane juge que ce surnom est un « mauvais procès ».

La fin de son mandat à la CAF en 2017, après une défaite face au Malgache Ahmad Ahmad, a « entaché son héritage ». Pour certains, cette défaite symbolise une sortie par la petite porte après trois décennies de règne. « Malheureusement, sa présidence a été ternie par cette sortie, après 29 ans comme président, il n’a pas voulu passer la main et a été déboulonné par un illustre inconnu », regrette Mamadou Koumé.

Ce revers marqua la fin de son règne sur le football africain. Malgré cela, Hayatou a été honoré en 2021 par la CAF, qui lui a accordé le titre de président d’honneur en reconnaissance de ses contributions au développement du football africain. 

« La communauté sportive a sûrement perçu ces tensions de fin de règne qui n’enlèvent en rien au passage remarqué d’Hayatou », reconnaît Alassane Souleymane. Le journaliste malien, bien que reconnaissant qu’il « y a eu des affaires», préfère retenir la « grandeur de l’héritage » de l’originaire de Garoua.

HD/ts

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