Ouestafnews – « Nouvelle vision pour une transformation du Sénégal : leviers stratégiques de rupture ». C’est le titre du livre collectif du think tank Rapport alternatif sur l’Afrique (Rasa), rendu public le 9 février 2025 lors d’une cérémonie de dédicace à Dakar. L’ouvrage veut apporter sa « contribution » au débat sur la construction du Sénégal à travers un « futur souverain » et « résilient ».
Avec la parution de l’ouvrage collectif intitulé « Nouvelle vision pour une transformation du Sénégal : leviers stratégiques de rupture », le Réseau alternatif sur l’Afrique (Rasa) inaugure « une nouvelle approche de travail avec les décideurs », explique le coordonnateur de ce livre, Dr Aliou Gori Diouf, dans un entretien avec Ouestaf News.
Plateforme réunissant des cadres, intellectuels et penseurs sénégalais et africains, le Rasa compte renforcer les transformations en cours au sein des sociétés et institutions africaines en faveur de l’autonomie et de la souveraineté des Etats. Aussi, est-il tout à fait « normal de mettre cet ouvrage à la disposition » du gouvernement sénégalais, en réponse à l’annonce du président Bassirou Diomaye Faye concernant l’élaboration d’un nouveau référentiel de politique publique, souligne le Dr Diouf.
En octobre 2024, le président sénégalais avait présenté le référentiel de politique publique « Vision Sénégal 2050 : Agenda national de transformation ». Une politique qui aspire à tracer une nouvelle trajectoire de développement économique et social du pays à l’horizon 2050.
Avec cette vision, le gouvernement sénégalais vise à mettre fin à la dépendance du pays envers ses partenaires économiques et financiers en s’appuyant en priorité sur les ressources locales et le capital humain sénégalais.
Selon Elimane Kane, un des auteurs de l’ouvrage, l’avènement d’un changement porté « par un discours de rupture, de souveraineté et de patriotisme doit être accompagné » afin qu’il s’agisse d’une transformation « profonde ». Selon le président du think tank Legs Afrika, il ne faudrait pas que ce changement se résume à « une énième alternance sans véritable alternative ».
En mars 2024, le Sénégal a connu sa troisième alternance politique avec l’accession au pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye et de son Premier ministre Ousmane Sonko. Ils portent un discours souverainiste et de rupture avec les pratiques des régimes précédents.
Pour M. Sonko, qui avait prononcé le discours d’ouverture du lancement de « Vision Sénégal 2050 », ce nouveau cadre des politiques publiques, succédant au Plan Sénégal Émergent (PSE) de l’ex-président Macky Sall, incarne une « rupture qualitative et profonde » ainsi qu’un « changement systémique » visant à libérer le Sénégal de la dépendance et du sous-développement.
« Ce changement de terminologie – par rapport à transformation structurelle – sera aussi un changement de paradigme », espère Dr Maréma Touré, également co-auteur de ce livre.
La sociologue, auteure de deux chapitres, estime que si ce changement est « réellement » un changement de paradigme, les autorités sénégalaises comprendront que le « changement systémique » doit s’opérer à deux niveaux : d’une part, « une transformation de l’infrastructure », c’est-à-dire de l’économie, et d’autre part, « une transformation de la superstructure », c’est-à-dire de la société et de son organisation.
Réunissant 17 auteurs, ce livre composé de sept thématiques aborde différents concepts, notamment la gouvernance et les défis politiques, économiques, sociaux, alimentaires, d’aménagement, énergétiques, technologiques et environnementaux du pays.
Afin que le contenu soit utile aux autorités, « chaque auteur a été invité à conclure son article par des propositions concrètes », précise Dr Aliou Gori Diouf, tout en soulignant que la notion de souveraineté est au cœur des 21 chapitres de l’œuvre littéraire.
Cette souveraineté est « impérative », selon la sociologue Dr Maréma Touré. « Ce qui se passe aujourd’hui avec l’USAID (Agence des États-Unis pour le développement international) montre encore l’importance de la souveraineté », justifie-t-elle.
Le 27 janvier 2025, une semaine après son retour au pouvoir, le président américain Donald Trump avait annoncé la suspension pour une période de trois mois du programme d’aide de la principale agence de coopération américaine. Une décision qui a suscité l’inquiétude de plusieurs organisations de la société civile et personnalités.
Cette situation doit être une « opportunité » de repenser le « modèle économique » et « renforcer l’autonomie » du Sénégal, selon le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko lors d’un discours le 3 février 2025 à Fass Touré, localité située dans la région de Louga (Nord-Ouest).
« Nous ne pouvons pas continuer à espérer de l’extérieur. Notre développement est d’abord interne », avait-il martelé, cité par le site d’internet du quotidien gouvernemental Le Soleil.
Dr Moubarack Lo note, pour sa part, que la souveraineté dans le monde d’aujourd’hui ne peut être que « relative ». Il souligne toutefois que l’expression « maîtrise de son destin » pourrait être la meilleure définition de ce concept.
La contrainte, explique l’économiste sénégalais, est que lorsqu’un pays fait partie d’organisations sous régionales comme la Cedeao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest ou l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest africaine), ces dernières peuvent imposer des règles qui s’appliquent à tous les membres et dépassent les lois nationales.
D’après les auteurs, cet ouvrage se veut également un « outil stratégique » visant à initier un dialogue entre les acteurs du pays, notamment le gouvernement, la société civile et le monde universitaire, afin de « construire une vision partagée de la souveraineté sénégalaise ».
ON/md
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