Last Updated on 30/01/2015 by Ouestafnews
L’écosystème en place
Pour accompagner, en termes de mentoring et de coaching, l’essor rapide des start-up, des structures d’accueil appelées incubateurs commencent à proliférer sur le continent. Selon les statistiques, on n’en compte une vingtaine à travers toute l’Afrique. C’est le cas du Centre Incubateur des Tic (CTIC) de Dakar au Sénégal, crée en 2011 avec un modèle de financement public-privé, le centre fait office de pionnier en Afrique de l’ouest francophone.
En trois ans, plus d’une trentaine d’entreprises ont été accompagnées. En 2013, 107 millions FCFA (184.047 Dollars) ont été levés pour les entreprises incubées contre 8 millions FCFA (13.832 Dollars ) en 2012.
Le CTIC tire l’essentiel de ses revenus des subventions et des multiples évènements qu’il organise au cours de l’année. Fondé sur le même modèle de financement mixte, le Centre Incubateur des PME au Niger (Cipmen) est inspiré du CTIC qui d’ailleurs figure parmi ses partenaires à coté de multinationales comme Veolia et la compagnie téléphonique française Orange, très présente en Afrique de l’ouest francophone.
Dans le paysage fleurissent des structures entièrement privées que promeuvent des acteurs du web, c’est le cas de Jokkolabs fondé à Dakar et présent aussi à Bamako au Mali, ou encore Akendewa en Côte d’Ivoire.
A la différence de l’accompagnement proposé par le CTIC, ces structures constituent des espaces dits de « co-working » plus dévolus au partage d’expériences entre les promoteurs web à qui l’espace est loué.
Les multinationales de la téléphonie mobile comme Orange, MTN, s’ajoutent aussi à cet écosystème à travers des concours dédiés aux développeurs. Même si les prix restent financièrement peu conséquents, comme le déplorent certains acteurs, ils permettent tout de même aux entrepreneurs d’amorcer leurs projets et surtout de faire connaitre leurs créations, à travers une vaste audience qui parfois peut dépasser le cadre national.
Globalement l’écosystème numérique en Afrique de l’ouest, est caractérisé par un capital humain bien formé, un marché avec une forte tendance haussière en termes de pénétration d’internet et du mobile. Cependant, la culture entrepreneuriale reste à parfaire et les opportunités de financements font largement défaut.
Des obstacles financier et institutionnel
Comment trouver les moyens ou de potentiels bailleurs pour financer ma start-up ? Cette question taraude les esprits des jeunes créateurs rencontrés dans la sous-région. Face à l’absence de véritables bailleurs, les entrepreneurs n’ont d’autres choix que l’autofinancement. Pour Aboubacar Sonko, créateur de Mlouma, une plateforme qu’il définit comme un « marketplace » dédié à l’agriculture « il n’existe pas business angels en Afrique francophone ».
Lauréat de plusieurs distinctions avec sa plateforme qu’il espère rentabiliser d’ici 2017, ce jeune Sénégalais estime qu’il appartient à ceux qui ont déjà réussi dans le milieu, d’investir et de soutenir ceux qui font leur premier pas.
Pour Alassane Dème, lauréat du prix de la Meilleure start-up en 2014 au Sénégal avec son agence de communication digitale, Nelamservices, il faut certes reconnaître que « les start-up évoluent dans un terrain très incertain (…) mais d’un autre côté, la culture entrepreneuriale fait aussi largement défaut dans nos pays».
En Afrique de l’ouest francophone, l’écueil financier reste tenace, les entrepreneurs (souvent de jeunes cadres ou étudiants) livrés à eux-mêmes ont recours à l’autofinancement dans leur écrasante majorité.
Israël Yorouba, a lui eu recours au crowdfunding (méthode de financement participatif via internet par encore peu usitée en Afrique) pour financer la création d’Eyolab (qu’il définit comme un « community space ») à Bonoua (près d’Abidjan), la capitale économique ivoirienne.
« Notre objectif , c’est d’avoir notre silicon valley, qui ne sera financé ni par des investisseurs ni par l’Etat mais par les citoyens eux-mêmes », souligne M. Yoroba qui, à terme, espère collecter en gros un milliard FCFA (1,7 million dollars) via le crowdfunding.
En dépit de ces difficultés, des “success stories” existent : Qelasy, la tablette éducative, créée par l’Ivoirien Thierry N’doufou , la Yuvsmart, le smartphone produit par le malien Aliou Yattasaye ou encore l’agence digitale People Input, crée depuis 2002 et présente aujourd’hui au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Cameroun.
Des succès qui peinent à masquer le fait que l’univers des entreprises évoluant dans les Tic souffrent généralement de l’absence d’un modèle économique qui pourrait attirer les bailleurs et les banques. A cela s’ajoutent malheureusement, les difficiles conditions de l’entreprenariat en Afrique.
Selon le Global Entrepreneurship Index, qui rassemble 130 pays, la région Afrique sub-saharienne obtient les plus faibles scores à l’échelle mondiale, en termes de qualité de l’entreprenariat. Sur les 29 pays au bas du classement au niveau mondial, 22 pays sont situés en Afrique, et la majorité de ces derniers en Afrique de l’ouest.
L’Afrique du Sud première de la région occupe la 52è place mondiale avec une moyenne de 40 point sur 100, très loin derrière le trio de tête formé par les Etats Unis (85), le Canada (81) et l’Australie (77,6).
Un secteur plein d’avenir
Les différentes études et rapports produits sur l’économie numérique en Afrique prédisent tous un avenir radieux pour les investisseurs et les promoteurs de start-up.
Le cabinet McKinsey, estime que la contribution d’Internet au Produit intérieur brut (Pib) du continent, qui tourne actuellement autour de 18 milliards de Dollars, pourrait passer à 300 milliards de Dollars en 2025,
Entre 2010 et 2014, le pourcentage de la population africaine ayant accès à Internet est passé de 10 à 20%, d’après les derniers chiffres de l’Union internationale des Télécommunications (IUT) qui fait savoir que l’Afrique connait aussi la plus forte croissance concernant l’Internet mobile. En quatre ans, le taux d’abonnés à fait un bond prodigieux de 2 à 20%.
Cette forte poussée du haut débit prévue dans les années à venir s’accompagne d’une petite révolution dans le marché des smartphones, dont les modèles basiques, tombés sous la barre des 50.000 FCFA (-100 Dollars), inondent actuellement le continent.
Les prévisions du cabinet Deloitte, annoncent un taux de pénétration de 30% des smartphones d’ici à 2020 contre 2,5 % actuellement. Grace à Internet, un changement qualitatif et multisectoriel est attendu.
En 2015, le E-commerce captera 10% des ventes, soit un gain annuel de 75 milliards de Dollars, selon les estimations de Mckinsey.
Au niveau de la santé, l’usage d’Internet va davantage contribuer à la prévention, en plus de la dématérialisation et de l’augmentation de la participation citoyenne dans le secteur public, qui se manifestent déjà à travers les projets Open data.
Tout ceci constitue sans doute des atouts majeurs pour les entrepreneurs, « l’évolution croissante de la technologie reste une évidence, le vrai enjeu pour nous Africains reste la question du contenu et nous devons nous battre sur ce terrain qu’il ne faudrait pas céder aux grands groupes étrangers », avertit, le Sénégalais, Alassane Dème.
Comme le pense, M. Dème, nombreux sont ceux qui posent cette question de la création de contenus propres aux africains. Celle-ci ne doit pas échapper aux créateurs locaux. Les chiffres mirobolantes que prédisent les différentes études pourraient ne pas être à leurs bénéfices, si de grandes entreprises comme Google ou Facebook, qui détiennent déjà la superstructure et les moyens financiers parviennent à s’accaparer ce terrain.
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Momar Niang
AMI/African story challenge 2014
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