Touchée par la crise, l’Afrique se rebiffe contre l’ordre économique mondial et exige des réformes

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Ces assemblées se tiennent dans un contexte de crise généralisée de l’économie mondiale qui vaudra à l’Afrique un taux de croissance se situant entre 2,3 et 2,8 % en 2009, contre des prévisions de plus de 5% avant la crise, selon des chiffres publiés par la BAD.
Du très diplomatique gabonais Jean Ping, actuel président de la Commission de l’Union Africaine (UA) au bouillonnant président sénégalais Abdoulaye Wade en passant par le « premier banquier » africain Donald Kaberuka, et d’autres encore, tous ont livré aux délégués à ces assemblées annuelles des discours que renieraient difficilement quelque militant altermondialiste que ce soit.
Signe que la crise sévit durement, aucun de ses orateurs n’a porté de gants pour faire endosser la responsabilité de la crise au monde occidental – et à un système qui, par cette crise a montré ses limites – et réclamer un ordre plus équitable dans les relations économiques et commerciales internationales
Sans détours, Donald Kaberuka, président de la BAD, a sur un ton aux allures nationalistes défendu le droit des pays africains à se saisir de la crise comme une opportunité pour devenir maîtres de leur destin.
« Pendant longtemps, les Etats africains ont eu très peu de chance et très peu d’espace pour concevoir leurs propres agendas à l’échelle nationale », a défendu M. Kaberuka.
Une telle situation n’a en définitive laissé à l’Afrique que « très peu occasions pour se focaliser sur des stratégies nationales développées en interne », a déclaré M. Kaberuka, sans toutefois rejeter que « tout conseil venu de l’extérieur » soit forcément toujours « mauvais ».
Le président de la BAD qui s’exprimait devant des centaines de délégués venus assister aux assemblées annuelles de la BAD s’est longuement attardé sur les contours de la crise mondiale actuelle, dont l’origine a été largement imputée aux économies développées pendant ces assises.
Encore plus furieux, le président sénégalais Abdoulaye Wade dont le pays fait face à une crise multiforme (dette intérieure, crise de liquidités, renchérissement des prix à la consommation) a de son côté fustigé pêle-mêle l’Occident, les institutions financières internationales, les spéculateurs, les « oligopoles » du pétrole… bref tout le système économique mondial actuel trop « injuste » à ses yeux.
M. Wade s’est ainsi insurgé contre la politique des subventions que les pays du Nord accordent à leurs agriculteurs au moment ou des institutions comme le Fonds monétaire international (FMI) ou la Banque mondiale « interdisent » aux nations africaines de telles pratiques.
« Nous ne sommes pas libres de nous protéger, car la Banque mondiale et le FMI nous l’interdisent », a rappelé un président Wade quelque peu amer avant de s’interroger « comment pouvez-vous concurrencer des produits subventionnés ?»
D’ailleurs quelque 24 heures auparavant lors d’une autre réunion de la BAD, le président sénégalais (dont l’épouse est d’origine française) avait suggéré à l’Afrique de se tourner désormais ver la Chine et les pays émergents d’Amérique latine, face à l’échec de leur coopération avec le monde occidental, les pays d’Europe notamment.
Sur le même ton de la révolte contre l’ordre établi, Abdoulaye Diop, ministre sénégalais des Finances, a dénoncé le manque de régulation des places financières internationales, le laisser-aller et la complaisance de certaines agences de notations, qui ont été à l’origine de la crise avant de s’appesantir sur la nécessaire réforme des institutions financières internationales, qu’exige désormais l’Afrique.
Pour Abdoulaye Diop, qui s’exprimait également en tant que président du Conseil des gouverneurs de la BAD, le continent réclame désormais « une amélioration de la représentation des pays (africains) dans les institutions multilatérales de financement », le FMI et la Banque mondiale notamment.
Il a, à ce titre, exigé « la mise en œuvre diligente des accords conclus» ainsi que « des réformes plus larges de la gouvernance de ces institutions susceptibles de rééquilibrer les pouvoirs » et « la révision des quotes-parts au sein du FMI (qui) devrait également occuper une place importante dans la satisfaction des préoccupations africaines ».
Revenant sur les promesses du G-20 qui s’est récemment réuni à Londres, Abdoulaye Diop a enfin demandé « l’accroissement » des prêts à des taux concessionnels ainsi que l’allègement des « conditionnalités » et des ressources additionnels aux bénéfice des pays les plus pauvres d’Afrique et du tiers monde en général.
Prenant le relais, Jean Ping, président de la commission de l’UA tout en se félicitant de la présence de l’Afrique à ce sommet du G-20 a lancé : « nous en attendons les retombées et nous espérons avoir été entendus.»

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