La dernière version de cette liste date d’avril 2011 et comprend majoritairement des compagnies africaines, une mesure jugée « discriminatoire » par les ministres réunis à Ouagadougou dans une résolution rendue publique à l’issue de leur réunion. Selon des informations rassemblées par Ouestafnews, la « liste noire » dont il est question compte 130 compagnies africaines sur un total de 269 compagnies interdites.
« La liste noire, basée sur des critères très restrictifs et qui se révèlent fortement discriminatoire, conduira inéluctablement, si l’on n’y prend garde, à l’exclusion de la totalité de la communauté aéronautique africaine du transport aérien international », a dénoncé lors de cette rencontre le ministre burkinabé Noel Gilbert Ouédraogo dans des propos relayés par la presse internationale.
D’ailleurs, pour prouver qu’ils ne comptent pas s’arrêter aux mots, les ministres présents à la réunion ont « donné mandat » au Burkina Faso pour s’occuper de la question et amener l’Union africaine à élaborer une position commune dans un secteur important et stratégique du point de vue de la souveraineté nationale et vital sur le plan financier.
Selon une note consultée par Ouestafnews sur le site internet de l’UE, les autorités européennes admettent qu’elles sont « seulement en mesure d’inspecter les avions des compagnies aériennes exploitant des vols à destination ou au départ des aéroports de la communauté ».
Désormais les Africains réclament plus de « transparence » dans l’établissement de cette liste noire qui compte des dizaines de transporteurs du continent dont principalement des compagnies présentes dans des pays comme le Congo, l’Angola, le Bénin et la Zambie.
Faisant mieux que les ministres africains réunis à Ouagadougou (essentiellement en provenance de pays francophones), le Nigéria a lui répondu « coup pour coup » à la Grande Bretagne en décidant le 3 novembre 2011 de réduire le nombre de vols hebdomadaires de la compagnie anglaise British Airways. La décision a été interprétée par nombre d’observateurs comme une réponse à une décision britannique refusant l’atterrissage dans les aéroports anglais de la compagnie nigériane Arik Air. Cette dernière compagnie avait engagé un bras de fer avec les autorités aéroportuaires britanniques pour protester contre l’augmentation unilatérale des « droits d’atterrissage » qui lui étaient imposées.
L’occasion a été saisie par le président de Arik Air, Joseph Arumemi Ikhide, pour dénoncer les accords bilatéraux liant la Grande Bretagne au Nigérian en estimant que ces accords ne « profitent qu’aux compagnies anglaises qui ont facilement accès à l’espace aérien nigérian tandis que Arik, la seule compagnie qui reliait Abuja à Londres, se voit aujourd’hui interdit de débarquement ».
En réalité, derrière ces petites guéguerres se profilent une véritable bataille pour le contrôle du marché africain du transport aérien grandement contrôlé par les compagnies européennes. Ce contrôle du ciel africain par des opérateurs étrangers s’est davantage accentué depuis la disparition il y a plus d’une décennie de la multinationale Air Afrique.
Déjà estimé à 9,2 milliards de dollars (chiffres de 2006) selon des recherches effectuées par Ouestafnews, le secteur du transport aérien a installé une farouche concurrence entre diverses compagnies, y compris chez les deux grands dans ce domaine Boeing et Airbus. Selon le site internet de l’hebdomadaire panafricain Jeune Afrique « les compagnies africaines commanderont plus de 700 avions pour environ 80 milliards de dollars d’ici 2030 ».
Chez les transporteurs, la bataille se situe au niveau du contrôle des routes, et les derniers incidents notés sur les marchés d’Afrique de l’Ouest et du Centre.
Dotés de flottes très faibles, les nouvelles compagnies « nationales » dans ces deux sous régions, joue quelque peu la carte du « protectionnisme », chaque pays voulant baliser le terrain pour « sa » compagnie nationale. Une situation qui fut à l’origine de discordes entre le Sénégal et la Belgique en 2010 quant le transporteur Brussels Airlines fut interdit de desservir des capitales d’Afrique de l’ouest à partir de Dakar par les autorités sénégalaises. C’était à la suite du lancement de Senegal Airlines créée en juillet 2010 (sur les cendres d’Air Sénégal International) détenue majoritairement par le privé sénégalais.
De même Asky, compagnie basée au Togo, à vocation « panafricaine » selon ses promoteurs, mais considéré par ses détracteurs comme un simple « prolongement » de son partenaire stratégique Ethiopian Airlines, n’a toujours pas accès à l’aéroport de Dakar, du fait d’un « blocage » que les responsables de la société imputent aux autorités sénégalaises.
D’autres embrouilles du même type ont également opposé le Sénégal et la Mauritanie et les liaisons aériennes entre les deux pays n’ont repris que récemment, ou encore le Sénégal et la Guinée.
Pourtant, lors d’une rencontre tenue à Accra fin octobre 2011, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) a réitéré son rappel pour une mise en œuvre de la convention de Yamoussoukro qui prévoit entre autres, la libéralisation du secteur du transport aérien, avec notamment l’élimination progressives des barrières non-physiques entre les pays membres.
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