Après la chute peu glorieuse de Hosni Mubarak de son piédestal de néo-pharaon de l’Egypte, rien, en principe, ne devrait plus s’opposer à ce que le Prix Nobel de la Paix soit décerné, cette année, non pas a un Abdoulaye Wade qui en meurt d’envie, sans le mériter le moins du monde, mais à un jeune homme.
Le récipiendaire devrait être celui grâce à qui l’Afrique redécouvre les vertus du combat social pour la promotion de l’intérêt général et la fin des impunités politiciennes. Au passage, le même a fait partir en fumée le rêve fou que poursuit un vieillard méritant plutôt d’être soumis, sans délai, à l’article d’une vigoureuse révolution populaire. Par sa bravoure, en s’immolant, le jeune Tunisien, Mohamed Bouazizi, s’impose au monde, pas seulement à l’Afrique, et c’est un nobélisable à qui le prestigieux prix revient de haute lutte, si l’on ose dire… Car s’il n’était hier encore qu’un produit anonyme de la plèbe de son pays, personne ne peut douter, désormais, que c’est son sacrifice, voici à peine deux mois, qui a fait tomber le régime du dictateur de paille, Zine El Abidine Ben Ali, qui semait la terreur sur la Tunisie. C’est à lui que l’on doit aussi ce tsunami qui secoue le continent, surtout sa partie septentrionale, à travers ce qui semble être un effet domino bienfaiteur, dont la descente aux enfers de Mubarak n’est qu’une étape – prions qu’elle ne soit pas la dernière.
Pour ces fortes raisons, jamais quelqu’un n’aura mérité de se voir décerner un prix aussi prestigieux que ce garçon à peine sorti de l’anonymat et qui se voit projeter ainsi dans les manuels d’histoire, en un tournemain. Alfred Nobel aurait été fier de le voir sur le podium le 10 décembre 2011 sous les cameras et devant la nomenklatura internationale.
En créant les prix qui portent son nom, l’inventeur de la dynamite, cherchait précisément a redorer son blason. Il s’était rendu compte, accidentellement, combien sa réputation personnelle était ternie: une annonce prématurée de son décès l’avait poussé à réaliser à quel point les dégâts causés par la dynamite faisait de lui un symbole de la mort. Dans les chaumières on le réduisait au statut peu enviable de marchand de la mort. Il avait voulu changer son image…
D’ou sa décision d’instituer les Prix Nobels. Avec celui de la Paix, il avait voulu entrer, lui aussi, dans l’histoire en célébrant les valeurs les plus fondamentales qui doivent fonder la vie dans les communautés humaines.
C’est l’exploit réalisé par Bouazizi. En faisant don de sa personne, il a déclenché un mouvement qui remet au centre du jeu certaines de ces valeurs, en particulier celles qui se rapportent a la démocratie véritable, au respect des droits de l’homme, à la libre expression, au bien être collectif.
Son suicide a été plus efficace que les milliers de milliards de dollars et les tonnes d’armes qui ont été utilisés par les puissances Occidentales, Etats-Unis d’Amérique en tête, dans leur croisade récente pour ‘démocratiser’ le monde arabe, en commençant par l’Irak.
Rien que pour cela, il est important que les membres du jury du Nobel de la Paix ne se trompent pas cette fois -le vainqueur du Prix est incontournable.
Faut-il, dès à présent, lancer un mouvement, une pétition, un appel pour que cette évidence soit encore plus…évidente aux yeux de tous? Sans doute.
En attendant, souhaitons que le vent du Nord, parti de la Tunisie, descende vers le Sud de l’Afrique pour que les peuples se ‘bougent’ afin que les dictatures familiales et politiques sentent le boulet et soient forcées de quitter la scène. Demain, elles rendront compte. Le temps de se lever est venu pour rejeter les projets dynastiques, notamment au Senegal, faire face a la ruse, refuser d’avaliser tous ceux qui ont été compromis a la sauce autocratique, même ceux qui se drapent d’une fausse virginité.
Ps: Cette contribution rédigée de Cape Town ou je viens de participer a la plus grande conférence sur les mines en Afrique a été l’occasion, pour moi, d’apprendre que le Senegal a été condamne dans son procès avec la firme Kumba Ressources à payer des dizaines de millions de dollars, que ne peuvent pas masquer les quelques écoles et autres projets sociaux qui seront construits pour faire vernis…Vrai ou faux? Cela fait partie des questions de gouvernance à mettre sur le tapis public!
*L’auteur, Adama Gaye, est Journaliste et Consultant Sénégalais
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