Une « chaîne de messages » est un texte transmis par téléphone, courrier électronique ou via les messageries sur les réseaux sociaux, demandant au destinataire de le transférer ou de l’envoyer à plusieurs de ses contacts pour éviter un désagrément ou un malheur, ou recevoir une récompense. Ce procédé est notoirement utilisé pour faire circuler des canulars et dans la fraude au moyen des technologies de l’information et de la communication.
Une collaboratrice d’Ouestaf News a reçu plusieurs fois en janvier 2021 un message de ce genre concernant WhatsApp, partagé sur ce réseau par des expéditeurs au Mali et au Sénégal notamment, qui l’avaient reçu de contacts dans leurs pays et d’ailleurs.
Que dit le message ?
Ce texte en français, truffé de fautes d’orthographe et affichant 457 mots au compteur, présente en réalité quatre messages mêlés, dont deux sont prétendument écrits par des responsables au sein de la société de l’application : « Varun Pulyani, directeur de WhatsApp » et « Jim Balsamic (PDG de Whatsapp) ». Il mentionne le lien avec Facebook, qui a racheté WhatsApp en 2014.
Extrait.

« AVIS FINAL. « N’ignorez pas s’il vous plaît lisez-le attentivement” Bonjour, je suis VARUN PULYANI directeur de WhatsApp, ce message est pour informer tous nos utilisateurs que nous avons vendu WhatsApp à Mark Zuckerberg pour 19 milliards de dollars. WhatsApp est désormais contrôlé par Mark Zuckerberg. Si vous avez au moins 20 contacts, envoyez ce sms et le logo de votre WhatsApp deviendra une nouvelle icône avec le « f » de Facebook dans les 24 heures. Transférez ce message à plus de 10 personnes pour activer votre nouvelle WhatsApp avec les services Facebook ou bien votre compte sera supprimé des nouveaux serveurs. (…)
« Message de Jim Balsamic (PDG de Whatsapp), nous avons eu une utilisation excessive des noms d’utilisateur sur Whatsapp Messenger. Nous demandons à tous les utilisateurs de transmettre ce message à l’ensemble de leur liste de contacts. Si vous ne transférez pas ce message, nous le prendrons car votre compte n’est pas valide et il sera supprimé dans les prochaines 48 heures. Veuillez NE PAS ignorer ce message ou WhatsApp ne reconnaîtra plus votre activation. Si vous souhaitez réactiver votre compte après sa suppression, des frais de 25,00 seront ajoutés à votre facture mensuelle. (…)
WhatsApp va bientôt nous coûter de l’argent. La seule façon dont il restera gratuit est si vous êtes un utilisateur fréquent, c.-à-d. [c’est-à-dire, NDLR] vous avez au moins 10 personnes avec lesquelles vous discutez. Pour devenir un utilisateur fréquent, envoyez ce message à 10 personnes qui le reçoivent (2 coches) et votre logo WhatsApp doit devenir bleu. »
Outre les fautes d’orthographe, on peut noter qu’aucune monnaie n’est indiquée concernant le montant des frais supposés pour réactiver un compte qui aura été supprimé.
Qu’en dit WhatsApp ?
Ouestaf News a transmis à WhatsApp le texte complet de « l’avis » selon lequel l’application supprimerait les comptes dont les utilisateurs ne transmettraient pas de chaînes de messages, et facturerait des frais pour réactiver les comptes supprimés.
Olivia Nloga, responsable de la Communication de Facebook pour l’Afrique francophone, a levé tout doute dans la réponse transmise par courrier électronique à Ouestaf News : « Oui, nous confirmons qu’il s’agit d’un faux ».
S’agissant des prétendus responsables Varun Pulyani et Jim Balsamic, « nous confirmons que nous n’avons pas d’employés répondant à ces noms », a déclaré Mme Nloga.
« WhatsApp est une application gratuite pour les utilisateurs et nous n’avons pas prévu de changer cela », a-t-elle assuré.
Il existe cependant une option payante de WhatsApp, réservée à une utilisation professionnelle : « l’API Business WhatsApp ». Concernant cette option, « l’aperçu public est limité », précise Facebook, « afin de garantir une expérience de qualité aux entreprises et aux utilisateurs ».
Une API (pour « Application Programming Interface », en français : « interface de programmation d’application ») « permet à deux applications de communiquer entre elles », explique l’agence web Debord, société française spécialisée dans les services digitaux. Elle « permet de rendre disponibles les données ou les fonctionnalités d’une application existante afin que d’autres applications les utilisent. Utiliser une API permet donc d’utiliser un programme existant plutôt que de le redévelopper ».
« Canular recyclé » et récurrent
De faux textes attribués à WhatsApp et pressant les utilisateurs de faire des chaînes de messages en contrepartie de maintien de leur compte ou pour éviter de payer des frais reviennent régulièrement et WhatsApp en fait une revue régulièrement sur son blog, avec son « Centre d’aide ».
Ouestaf News a ainsi pu y retrouver, en anglais, le démenti, daté du 16 janvier 2012, d’un message évoquant « Jim Balsamic (CEO of WhatsApp) » [« Jim Balsamic (PDG de WhatsApp »)]
Le texte attribué au prétendu « directeur de Facebook » Varun Pulyani a été démenti après vérification par plusieurs médias en Inde dont Dataquest, un magazine spécialisé dans les technologies de l’information. Dans un article mis en ligne le 19 janvier 2021, ce journal indien indique le canular avait déjà circulé à plusieurs occasions dans le passé et qu’il fait surface à la faveur de l’annonce de WhatsApp, faite en janvier 2021, sur ses nouvelles conditions.
« WhatsApp payant est une vieille rumeur qui circule depuis des années. (…) Il s’agit d’un canular recyclé », constate aussi le blog Cube Vert, dédié aux réseaux sociaux, dans un billet intitulé : « WhatsApp payant en 2020 ? On vous dit tout ! ».
Un air de déjà-vu
Des textes similaires ont circulé régulièrement ces dernières années, évoquant l’envoi de chaîne de messages pour éviter un usage payant de WhatsApp ou la suppression de son compte. Ces allégations avaient régulièrement été qualifiées de canulars par les dirigeants de WhatsApp et/ou de Facebook, mais aussi par des médias ou organisations de vérification de faits (« fact-checking »).
Ces messages n’ont rien à voir avec celui, authentique, de janvier 2021, dans lequel WhatsApp a annoncé sa décision d’introduire de nouvelles conditions d’utilisation lui permettant de transmettre plus de données à Facebook et à ses autres applications, dont Instagram. Les utilisateurs qui refuseraient d’accepter ces exigences ne pourraient plus accéder à leur messagerie à compter du 8 février 2021, était-il indiqué dans cette notification relayée par la presse.
Cette annonce a suscité une polémique chez les utilisateurs de WhatsApp, qui a décidé de repousser l’entrée en vigueur de ses nouvelles conditions, afin de leur permettre de « consulter la politique de confidentialité à leur propre rythme avant que de nouvelles options pour les professionnels ne soient disponibles le 15 mai », peut-on lire dans un message posté sur son blog le 15 janvier 2021.
Selon les propriétaires de cette application, actuellement « plus de 2 milliards de personnes dans plus de 180 pays utilisent WhatsApp pour rester en contact avec leurs amis et leur famille, où que ce soit et à n’importe quel moment ».
Arnaque prouvée
Le texte circulant via WhatsApp, qui presse les utilisateurs de cette application d’envoyer une chaîne de messages à leurs contacts, au risque de voir leur compte devenir payant ou être supprimé, est une arnaque, a affirmé WhatsApp à Ouestaf News.
« WhatsApp est une application gratuite pour les utilisateurs et nous n’avons pas prévu de changer cela », a déclaré la société détenue par Facebook, qui a assuré ne pas avoir d’employés appelés Varun Pulyani et Jim Balsamic. Ces derniers étaient présentés dans le message suspect comme des responsables de WhatsApp.
Des recherches en ligne permettent de vérifier qu’il s’agit d’une rumeur propagée depuis plusieurs années, avec de légères modifications selon les années et les zones. Elle est régulièrement démentie par WhatsApp, sur son blog notamment, et par la presse spécialisée, dont le magazine indien Dataquest, qui évoque une arnaque récurrente, et le blog français de gestion de comptes de réseaux sociaux Cube Vert, qui parle de « canular recyclé ».
CS
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