Le groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM -Jama’at Nusrat ul-Islam wa al Muslimin en arabe) tente de « déstabiliser progressivement » la région de Kayes, située dans l’Ouest du Mali, indique un rapport publié le 11 septembre 2025 par le Timbuktu Institute basé à Dakar. Cette partie occidentale du Mali est la cible d’une offensive du JNIM depuis quelques mois. L’étude de Tinbuktu Institute révèle que les attaques ciblent désormais les circuits d’approvisionnement de la capitale malienne. Cela pourrait également constituer une menace pour la sécurité des pays voisins notamment le Sénégal et la Mauritanie.
Ciblage des axes logistiques « vitaux », tentatives de « blocus » et de contrôle des flux économiques, attaques contre des intérêts étrangers, le JNIM tente de déstabiliser « progressivement » la région de Kayes, note un rapport du Timbuktu Institute, publié le 11 septembre 2025. Pour y arriver le groupe armé multiplie les attaques dans cette région longtemps épargnée par la crise sécuritaire qui sévit principalement dans la partie frontalière du Burkina Faso et du Niger.
D’après les chercheurs, cette stratégie vise à « asphyxier » l’économie malienne en « isolant » la capitale, Bamako, d’un axe commercial vital. Si 70 % des importations du pays transitent par les ports régionaux, celui de Dakar assure environ 30 % des importations terrestres du pays, faisant du corridor Bamako-Dakar un pilier du commerce ouest-africain.
Le 7 septembre 2025, l’Union des transporteurs routiers du Sénégal (URS) avait annoncé l’enlèvement de six de ses membres dans cette région occidentale du Mali par terroristes présumés. Ils ont été libérés le lendemain, selon ce regroupement de transporteurs routiers.
Cet incident démontre les « répercussions directes » des activités terroristes dans cette région sur les pays voisins comme le Sénégal. Cela, en raison de la porosité de la frontière et de l’interdépendance économique entre les deux pays, selon l’étude.
L’armée malienne a annoncé, le 10 septembre 2025, avoir « escorté » des citernes de carburant, ainsi que des camions et véhicules civils, en provenance du Sénégal. Dans leur communiqué, les Forces armées maliennes (FAMa) ont exprimé leur « détermination » à protéger les chauffeurs de camion face aux menaces persistantes de coupeurs de route.
Outre la menace sur les circuits d’approvisionnement essentiels pour la capitale malienne, une pression plus accentuée sur Nioro (près de la frontière mauritanienne) pourrait aussi perturber le commerce transfrontalier avec ce pays et le Sénégal. Cette situation augmente le risque d’une « contagion régionale », souligne le document.
Le 1er juillet 2025, le JNIM a mené des attaques coordonnées dans plusieurs localités de la région de Kayes dont Diboli, situé à 1,3 km de la frontière sénégalaise. L’assaut contre la position des FAMa à Diboli a suscité de vives inquiétudes dans la zone orientale du Sénégal et sonné comme une alerte pour les autorités sénégalaises.
Face à cette menace, Dakar a tenté de renforcer la sécurité le long de la frontalière malienne via notamment le déploiement d’unités de gendarmerie mais aussi l’interdiction de la circulation des deux-roues entre minuit et six heures du matin dans le département de Bakel.
En face, le pouvoir malien a aussi instauré un couvre-feu à Kayes jusqu’au 30 septembre 2025 et limité la circulation aux véhicules militaires et ambulances. Des mesures, qui de part et d’autre de la frontière, réduisent les échanges commerciaux transfrontaliers. Or, la perturbation du commerce transfrontalier et la montée de l’insécurité à Kayes pourraient favoriser les trafics illicites et les réseaux de contrebande dans cette zone de trois frontières, avertit Tinbuktu Institute dans son rapport.
La sécurité autour de Kayes nécessite une coopération renforcée entre le Mali, le Sénégal et la Mauritanie pour juguler le risque d’une déstabilisation. Timbuktu Institute prône le partage de renseignements, la sécurisation des corridors économiques et des approches préventives qui tiennent compte des « dynamiques sociales » locales.
Pour sa part, l’armée malienne a indiqué avoir mené des frappes aériennes à Kayes, Yélimané et Nioro du Sahel dans la nuit du 10 septembre. Les FAMa ont indiqué avoir ciblé « avec succès » plusieurs positions stratégiques de chefs terroristes.
Dans sa stratégie de « fragilisation économique », le JNIM cible également les entreprises étrangères, notamment chinoises présentes dans l’Ouest du Mali. Entre juillet-août 2025, le groupe a attaqué sept sites industriels étrangers dans la région de Kayes, dont le site Diamond Cement Factory, kidnappant trois Indiens. Pour les chercheurs, l’objectif est de « saper » la confiance des partenaires du pays.
IB/fd
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