Ouestaf News – L’ancien Premier ministre malien, Choguel Kokalla Maïga, a été inculpé pour « atteinte aux biens publics ». Il a été placé sous mandat de dépôt, le 19 août 2025, par la chambre d’instruction de la Cour suprême, annoncent plusieurs médias maliens. L’homme politique, ancienne figure de la transition, conteste les faits reprochés mais affirme aborder cette épreuve « avec sérénité ».
Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, l’avocat de M. Maïga, Me Cheick Oumar Konaré, a rapporté que l’ancien Premier ministre de la transition « se dit serein et estime qu’un homme politique doit s’attendre à tout, y compris la prison et la mort ».
Selon les médias maliens, la décision de placer Choguel Maïga en détention préventive est intervenue après une garde à vue de sept jours au Pôle national économique et financier de Bamako. Il est poursuivi pour des faits présumés de faux, usage de faux et détournements de fonds publics.
Ces accusations font suite à un rapport du Bureau du Vérificateur général (BVG) rendu public fin 2024 et mettant en cause la gestion de l’ex-PM entre 2020 et 2023. Les investigations du BVG concernent son passage à la Primature, à l’Agence de gestion du Fonds d’accès universel (Agefau) et à l’Autorité malienne de régulation des télécommunications et des postes (AMRTP).
Le rapport évoque des irrégularités financières jugées graves, dont l’octroi d’un prêt de 20 milliards de francs CFA au Trésor public, l’existence d’abonnements téléphoniques et de frais de mission non justifiés, l’attribution de marchés publics sans transparence et des équipements manquants dans des écoles. En outre, deux déplacements effectués en décembre 2023 par Choguel Maïga auraient également généré des dépenses injustifiées évaluées à près de 47 millions de francs CFA, selon le rapport.
Présenté devant la chambre d’instruction de la Cour suprême, l’ancien Premier ministre s’est vu notifier ces charges par le procureur général avant que la juridiction ne prononce son placement sous mandat de dépôt.
Dans un communiqué, Me Cheick Oumar Konaré informe que son client se réjouit toutefois de voir son ancien directeur de cabinet, le professeur Issiaka Ahmadou Singaré, âgé de 80 ans, laissé en liberté alors qu’il est poursuivi dans le même dossier.
Choguel Maïga, âgé de 67 ans, est une figure politique majeure du Mali. Leader du Mouvement du 5 juin – Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), il a joué un rôle central dans la contestation du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta avant le coup d’État militaire de 2020.
Nommé Premier ministre en juin 2021 par le colonel Assimi Goïta, chef de la junte, il a occupé ses fonctions jusqu’en novembre 2024, date de son limogeage. Pointant du doigt le manque de clarté des militaires sur la promesse de transition démocratique, il avait également dénoncé la « gestion clanique » du pouvoir et la remise en cause des libertés publiques. Des prises de position qui lui ont valu d’être écarté par décret présidentiel en même temps que la dissolution du gouvernement.
L’inculpation de Choguel Maïga intervient dans un contexte politique particulièrement tendu au Mali. Le 14 août 2025, les autorités militaires ont fait part d’une tentative de « déstabilisation » du pays soutenue par des « Etats étrangers ». Des hauts gradés de l’armée ont été arrêtés.
En mai 2025, le gouvernement a dissous tous les partis politiques suite à la suppression de la Charte des partis politiques et l’interdiction de toutes manifestation à caractère politique, réduisant ainsi au silence syndicats et voix discordantes.
En juillet 2025, le colonel Assimi Goïta a promulgué une loi qui lui permet de prolonger son maintien au pouvoir alors que la transition est déjà au-delà de la période initialement prévue. Elle devait se finir en mars 2024, d’après un décret du président Goïta datant de 2022.
Le pouvoir militaire a justifié la mesure de prolongation en invoquant la nécessité de trouver une issue à l’insécurité qui continue de frapper le pays, marqué par des attaques de groupes armés et la présence de forces étrangères alliées, notamment russes.
Pour l’ancien Premier ministre Choguel Maïga, aucune date de comparution devant la justice n’a été communiquée. La chambre d’instruction doit encore poursuivre l’examen des dossiers le concernant. Ce qui mêle enjeux judiciaires et calculs politiques dans un Mali en proie à une transition incertaine doublée d’une crise sécuritaire.
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