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Guinée-Bissau : Domingos Simões Pereira, l’homme qui va défier Embaló

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Ouestafnews – À deux mois de la présidentielle du 23 novembre 2025, Domingos Simões Pereira signe son retour à Bissau après plusieurs mois d’exil. Désigné candidat par son parti, l’ancien Premier ministre affrontera de nouveau Umaro Sissoco Embaló dans un duel aux allures de revanche, sur fond d’instabilité politique et de tensions judiciaires. Retour sur plusieurs années de crises.

Après neuf mois d’exil, Domingos Simões Pereira a fait un retour remarqué à Bissau, dans la capitale guinéenne. L’ancien Premier ministre a été officiellement investi candidat à la présidentielle du 23 novembre 2025. Avec 359 voix sur 370 lors du vote interne, son parti l’a désigné sans surprise pour porter ses couleurs dans un scrutin qui s’annonce comme une revanche face à Umaro Sissoco Embaló, vainqueur en 2019 face à lui.

Le contexte politique tendu accentue la portée de cette candidature. À la veille de l’investiture de Pereira, la Cour suprême a rejeté la demande d’enregistrement d’une coalition regroupant seize partis autour du président sortant Embaló, fragilisant sa stratégie électorale. Embaló, dont le mandat a été marqué par la dissolution du Parlement en décembre 2023, voit donc son socle politique contesté au moment même où son principal rival revient sur le devant de la scène.

Le parcours de Domingos Simões Pereira illustre une longue trajectoire au service de l’État et de son parti. Ingénieur civil formé en Ukraine et aux États-Unis, il a été ministre des Travaux publics, secrétaire exécutif de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) entre 2008 et 2012.

Le chef du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) a aussi été le Premier ministre (2014-2015) sous la présidence de José Mário Vaz. Sa carrière a souvent croisé les crises politiques bissau-guinéennes : destitution en 2015, contestations électorales en 2019, et exil forcé après la dissolution de l’Assemblée nationale en 2023.

En 2015, le président José Mário Vaz rompt brusquement avec son chef de gouvernement. Cette révocation provoque une crise politique dans le pays et au sein même du PAIGC.

Un bras de fer entre la présidence, le gouvernement et le PAIGC paralyse l’État, fragilise l’économie et ouvre une séquence de cabinets éphémères et de médiations régionales, comme le rapporte une publication des analystes de l’Institute for Security Studies (ISS) en 2015.

Quatre ans plus tard, Pereira est le candidat du PAIGC à la présidentielle de 2019. Il affrontait déjà, l’actuel président Umaro Sissoco Embaló au second tour. La compilation des procès-verbaux devient le cœur d’une bataille politico-judiciaire.

À l’époque, la Cour suprême avait exigé des vérifications et des clarifications sur le dépouillement. Pendant ce temps, Embaló a prêté serment dans une cérémonie controversée, avant la fin du contentieux.

Pereira, lui, a contesté les résultats, dénonçant des irrégularités et s’appuyant sur les injonctions de la Cour pour demander un contrôle plus poussé des suffrages sans parvenir à renverser l’issue proclamée.

La troisième grande crise survient fin 2023. Après les élections législatives de juin 2023 suite à une dissolution de l’Assemblée nationale, Pereira, devient président du parlement. Quelques mois plus tard, le président dissout de nouveau le parlement après des affrontements armés à Bissau et bouscule le calendrier institutionnel.

Le climat se tend, l’opposition conteste la durée du mandat présidentiel et la séquence électorale, et plusieurs figures prennent le chemin de l’exil. Domingos Simões Pereira quitte le pays pendant des mois avant de revenir en 2025 pour être investi candidat du PAIGC.

Entre-temps, Embaló annonce vouloir briguer un second mandat et reporte le scrutin, au grand dam de ses adversaires et sous l’œil inquiet des partenaires régionaux comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

Après son retour au pays, le leader du PAIGC affirme vouloir « sauver » le pays et promet une alternance, mais il reste sous la menace de poursuites judiciaires, dont il nie la légitimité.

À deux mois du scrutin, la scène politique bissau-guinéenne s’organise autour de ce duel annoncé. Pour ses partisans, Pereira incarne l’« espoir d’une rupture » avec l’« autoritarisme » et le « musellement » de la presse qu’ils reprochent au régime actuel. Pour Embaló, la perte de la coalition qu’il comptait bâtir représente un revers, mais il conserve l’appareil de l’État.

Dans un pays marqué par une instabilité chronique depuis plusieurs années, cette confrontation devrait dessiner les contours de la prochaine phase politique : continuité ou alternance.

HD/fd


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