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Indignation après les menaces d’un militaire français sur un photographe de presse au Togo (DECLARATION)

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DECLARATION DES ORGANISATIONS DE DEFENSE DES DROITS DE L’HOMME SUITE AUX MENACES D’UN OFFICIER FRANÇAIS SUR UN JOURNALISTE TOGOLAIS

Le 10 Août 2010, en marge des manifestations de protestation organisées par les membres et sympathisants de la branche de l’Union des Forces du Changement favorable à M. Jean-Pierre Fabre aux alentours de l’Eglise évangélique presbytérienne de Nyékonakpoé, a eu lieu une altercation entre le journaliste Didier Ledoux du quotidien privé Liberté et un coopérant militaire français.
Il ressort des informations diffusées par les médias et de la vidéo disponible sur Internet que le journaliste, qui avait pris des photos montrant l’officier français en action aux côtés des forces de l’ordre togolaises, aurait été bousculé et fait l’objet de menaces. Cet officier français qui avait intimé au journaliste, l’ordre de supprimer les photos prises, aurait fait face au refus d’obtempérer de ce dernier. Ce refus a alors suscité, de la part de l’officier, une vive réaction qui l’a amené à tenir des propos pour le moins indigne d’un officier de son rang en ces termes : « Je m’en fous que tu sois de la presse. Tu enlèves ta photo sinon c’est moi qui le prends… Tu veux qu’on te donne un coup sur l’appareil ? Moi on ne me prend pas en photo comme ça. Tu sais qui je suis ? Je suis le conseiller du chef d’état-major de l’armée de terre. Tu veux que j’appelle le RCGP [Régiment des commandos de la garde présidentielle] pour foutre un peu d’ordre là-dedans? Alors, je demande d’enlever les photos. Est-ce que c’est compliqué ? ». Devant la résistance du journaliste, l’officier aurait ordonné à un des gendarmes togolais : « tu le mets en taule».
Suite à ces évènements, l’ambassade de France au Togo a publié un communiqué dans lequel elle a expliqué que «le véhicule de l’officier qui se trouvait fortuitement près du rassemblement a été pris par des jets de pierre et l’officier ne voulait pas qu’un photographe fasse une prise de vue». En outre, le ministère français de la défense a déploré cette attitude en relevant que « ce n’est pas un vocabulaire et une attitude compatible avec ce que l’on attend de notre personnel et des cadres de la défense en particulier. Ca ne correspond ni de près ni de loin à ce que sont nos valeurs et à notre conception de notre relation aux médias et de la liberté de presse».
Cette affaire préoccupe les organisations de défense des droits de l’homme signataires de la présente déclaration. En effet, alors que les associations togolaises de défense des droits de l’homme ainsi que les ONG internationales et même les institutions des Nations Unies ont régulièrement dénoncé par le passé, les débordements des forces de l’ordre dans l’encadrement des manifestations publiques, ces propos d’un officier français censé être le formateur de la gendarmerie togolaise sont de nature à inquiéter les observateurs avisés de la vie socio politique togolaise. Ils sont d’autant plus préoccupants qu’au-delà de la virulence des propos tenus, l’officier a évoqué la possibilité de faire intervenir un régiment commando de l’armée, en l’occurrence la RCGP, alors que, par définition, celui-ci n’a aucun rôle à jouer en matière de maintien de l’ordre.
Pour les organisations togolaises de défense des droits de l’homme, si on considère l’influence de l’armée française sur son homologue du Togo, cette attitude pourrait être interprétée comme une onction donnée en faveur des exactions commises non seulement contre les médias et les défenseurs des droits de l’homme mais aussi contre l’ensemble de la population togolaise.
Au regard de tout ceci, les organisations signataires de la présente déclaration notamment Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT-Togo), Association Togolaise des Droits de l’Homme (ATDH), Association Togolaise pour la Défense et la Promotion des Droits de l’Homme (ATDPDH), Collectif des Associations Contre l’Impunité au Togo (CACIT), la Coalition Togolaise des Défenseurs des Droits de l’Homme (CTDDH), Journalistes pour les Droits de l’Homme (JDHO) :
– Se félicitent que les autorités françaises se soient démarquées sans ambiguïté de cette attitude répréhensible de leur employé en poste auprès de l’armée togolaise ;
– Demandent à la France de veiller à ce que toutes les sanctions envisagées contre cet officier soient effectivement prises pour dissuader toute nouvelle velléité d’atteinte à la liberté et à l’intégrité des journalistes, défenseurs des droits de l’homme et des citoyens togolais ;
– Restent attentives aux comportements des forces de l’ordre togolaises lors des manifestations publiques futures pour s’assurer que leur attitude traduise les valeurs et principes de défense des droits de l’homme auxquels les autorités togolaises et françaises disent être attachées.

Fait à Lomé le 12 août 2010

Les signataires :
• ACAT-Togo : Pierre-Claver DEKPOH

• ATDH : Etchri Hihédéva CLUMSON

• ATDPDH : Mme DOGBE Ayélé Mawuéna

• CACIT : André Kangni AFANOU

• CTDDH : Carlos Komlanvi KETOHOU

• JDHO : Mme Fabbi KOUASSI

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