Ouestafnews – Le Monkeypox (Mpox), anciennement connu sous le nom de variole du singe, sévit dans plusieurs pays d’Afrique. Déclaré, depuis mi-août 2024, « urgence sanitaire publique continentale » par le Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC Africa), la pathologie continue de se propager dans plusieurs pays du continent avec ces variants. Ces mutations constituent un casse-tête dans la gestion de la maladie.
« Très complexe ». C’est ainsi que le professeur Thierno Diallo, chef du Centre régional des urgences de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) basé à Dakar, caractérise le Mpox, également appelé variole du singe.
« On constate un changement de dynamique de la maladie avec une transition interhumaine beaucoup plus rapide qui se fait par des contacts normaux », explique Pr Diallo, lors d’un entretien accordé à Ouestaf News en marge d’un atelier tenu sur le sujet à Dakar fin août 2024.
Au niveau épidémiologique, la complexité évoquée par Pr Thierno Diallo est mise en évidence par les différences génétiques qui existent entre la souche qui circule présentement en Afrique de l’Ouest et celle qui fait des ravages en Afrique centrale, ajoute docteur Moussa Moïse Diagne, responsable de la plateforme de génomique de l’Institut Pasteur de Dakar (IPD).
La « souche », selon des informations tirées du site de l’Institut Pasteur de Paris, est une « version initiale et complète d’un virus qui sert de référence de travail » aux laboratoires. Isolée, elle permet de savoir comment le détecter, comment réagit l’organisme à ce virus et permet de savoir comment lutter contre.
Avec deux principales souches dénommées « clade I » et « clade II », la variole du singe, selon un document de l’Institut Pasteur de Dakar, a engendré une épidémie en Afrique, notamment en République démocratique du Congo (RDC), épicentre de la maladie, et dans d’autres pays du continent,
Le « clade I » qui sévit en Afrique Centrale est le variant « le plus sévère » avec un taux de mortalité pouvant aller jusqu’à 10 %, explique le chercheur au service Qualité hygiène sécurité (QHS) de l’IPD, Dr Martin Faye. Le « Clade II » constaté en Afrique de l’Ouest est « le moins sévère » avec un taux de mortalité de 3,6 %.
Pour le virologue Moussa Moïse Diagne, l’enjeu essentiel aujourd’hui est de découvrir la lignée de la souche du virus d’Afrique centrale afin de permettre aux chercheurs de pouvoir la détecter facilement en Afrique de l’Ouest.
Le défi sur le continent est la disponibilité des « réactifs » pour faire des « séquençages » dans des laboratoires afin de mieux comprendre le virus et de procéder à des tests, préconise le directeur de la Santé publique à l’IPD, Abdourahmane Sow,
C’est en fonction de la connaissance du type de virus et du variant qu’« on peut changer la manière de se préparer pour lutter contre la maladie, ajoute-t-il.
Le Mpox, découvert en 1958 dans une colonie de singes à Copenhague au Danemark, sous le nom de variole du singe, se transmet de l’animal à l’homme. Elle est plus fréquente dans les pays proches des forêts tropicales humides, selon l’OMS.
Le nom Mpox a été récemment adopté pour ne pas « stigmatiser ». L’OMS indique avoir choisi ce nom pour son « absence de référence géographique ou zoologique », sa « pertinence scientifique », sa « facilité de prononciation et utilisation dans différentes langues », entre autres.
Selon l’OMS, la maladie se transmet par contact physique avec une personne infectée, des surfaces contaminées ou des animaux infectés. L’organisation onusienne spécialisée dans la santé indique que la période d’incubation du virus est couramment de six à treize jours et peut s’étendre de cinq à 21 jours.
Le Mpox se manifeste par la fièvre, des maux de tête, des douleurs musculaires et dorsales, des ganglions lymphatiques enflés et une éruption cutanée ou des lésions, selon la même source.
En plus des « clade I » et « clade II », l’Organisation mondiale de la Santé signale qu’une nouvelle variante du virus du clade I dénommé « clade Ib », « plus transmissible », a été détectée en République démocratique du Congo. Selon l’agence onusienne, cette souche s’est propagée par voie sexuelle et par d’autres types de contacts étroits.
Selon le professeur de recherche en santé mondiale et directrice du Global Health Network à l’Université d’Oxford (Royaume-Uni), Trudie Lang, cette nouvelle souche de clade Ib présente des « caractéristiques très différentes par rapport » aux clades I et II. « Nous observons avec cette nouvelle souche des éruptions cutanées généralisées sur tout le corps, en plus de lésions génitales dans certains cas », explique-t-il dans un entretien publié sur le site de Gavi, organisation internationale qui vise à améliorer l’accès aux vaccins pour les enfants dans des pays en développement.
L’OMS souligne que des études sont en cours pour connaitre « les propriétés » de la nouvelle souche. Elle signale également que la nouvelle souche menace les enfants car la maladie apparaît plus mortelle chez eux. « Les cas graves montrent une mortalité de 5 % chez les adultes et de 10 % chez les enfants », indique Trudie Lang.
Le 8 août 2024, le directeur général de l’OMS, Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus avait déclaré dans un message vidéo que le clade Ib est « responsable d’une maladie plus grave ».
Toutefois, la dangerosité et la contagion du clade Ib sont pour l’heure difficiles à évaluer, selon plusieurs experts. A ce stade, « on ignore si la souche Ib est plus transmissible, mais on sait qu’elle se transmet plus efficacement », avait indiqué mi-août 2024 le responsable du virus à l’OMS, Dr Rosamund Lewis, dans un entretien avec le média français, Ouest France.
En attendant les résultats visant à déterminer les propriétés de cette nouvelle souche de Mpox, le Pr Thierno Diallo affirme que le clade Ib est une réelle « inquiétude » chez les chercheurs eu égard à sa rapide propagation.
Dans cette situation, il faudra, selon Pr Diallo, une meilleure connaissance du virus de la variole du singe et un système de surveillance adapté qui réponde à la définition des cas.
Un point de vue partagé par l’OMS. L’Organisation mondiale de la Santé juge nécessaires et urgentes des recherches poussées sur les méthodes de propagation du virus lors d’épidémies dans différents contextes et dans différentes conditions.
Aujourd’hui, la progression de la maladie sur le continent semble intenable. De janvier au 12 septembre 2024, le Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC Africa) comptabilise 26.543 cas, dont 5.731 confirmés et 724 décès.
Face à l’augmentation des cas de Mpox, l’OMS avait déclaré, le 14 août 2024, la variole du singe comme une « urgence de santé publique de portée internationale ». Malgré cette flambée des cas de Mpox, Pr Thierno Diallo précise que le taux de létalité de la variole du singe en Afrique est de 6 % sur les cas confirmés.
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