Ouestafnews – La campagne électorale en vue des législatives du 17 novembre 2024 au Sénégal prend fin ce vendredi 15 novembre à minuit. Les candidats vont observer une pause de 24 heures, après avoir sillonné le pays pendant deux semaines. La campagne a été marquée par de vives tensions sur fond de discours belliqueux et parfois de quelques scènes de violence.
Plus de 7.370.000 électeurs sont attendus aux urnes dans cette élection pour élire 165 députés, dans un scrutin « mixte ». Dans les départements, le scrutin sera « majoritaire » et déterminera, en un seul, tour les victorieux dans chacune des circonscriptions.
Au total 112 députés seront élus sur ces listes départementales et dans la « diaspora ». Puis 53 députés seront quant à eux élus à la « proportionnelle », cette fois sur une liste dite « nationale »
Pour le pouvoir en place, le principal enjeu de ce scrutin sera la confirmation, ou non, de son éclatante victoire lors de la présidentielle du 24 mars 2024, qui a vu le président Bassirou Diomaye Faye l’emporter dès le premier tour avec 54 % des voix.
Le Premier ministre de Faye, et son « patron » dans leur parti, Ousmane Sonko, inéligible à l’époque de la présidentielle, dirige la liste de leur formation politique les Patriotes africains du Sénégal pour le Travail et la Fraternité (Pastef). Ils espèrent confirmer le verdict de mars 2024 pour avoir les coudées franches à l’Assemblée nationale et dérouler leur programme de gouvernement sans entrave.
M. Sonko a mené une campagne tambour battant, galvanisé par des foules acquises à sa cause, parcourant le pays d’est en ouest et du nord au sud. C’est dans la capitale sénégalaise qu’il a décidé de boucler une campagne intense marquée, à chaque étape, de sorties fracassantes, sur un ton guerrier et parfois menaçant, avec des accusations à tout va, contre l’ancien régime qu’il tient coûte que coûte à discréditer.
Le pic de ce discours belliqueux aura été un appel invitant ouvertement ses militants à « la vengeance » après des échauffourées entre ses partisans et une frange de militants de l’opposition, le 12 novembre 2024, à Saint-Louis (Nord). Un discours aux antipodes de l’appel à des élections apaisées lancé par le président Faye à l’entame de la campagne.
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Face au tollé suscité par cette déclaration, le Premier ministre fera marche arrière pour calmer ses partisans, les appelant à « s’abstenir de tout acte de violence ».
Pour l’opposition, partie dans cette course en rangs dispersés au sein de nombreuses coalitions, l’ambition est d’imposer une cohabitation au nouveau président Bassirou Diomaye Faye et au Pastef.
Quarante listes briguent en même temps les suffrages des Sénégalais aux côtés de celle du Pastef. Ce qui donne un total de 41 listes de partis, de coalitions de partis en lice pour cette 15e législature.
L’une des listes les plus virulente envers le régime en place est celle de « Sàmm Sa Kàddu » (Respect de la parole donnée, en Wolof), dirigée par le maire de Dakar Barthélémy Dias. Le nom du parti a été choisi pour, selon les membres de cette coalition, rappeler au régime en place ses reniements. Dès le début de la campagne cette coalition a été victime d’un incendie.
Dans un communiqué du 12 novembre 2024, la coalition Sàmm Sa Kàddu a indiqué qu’elle tiendrait Ousmane Sonko d’être « responsable de tout ce qui pourrait arriver à ses sympathisants ». Sàmm Sa kàddu réclame aussi justice pour l’incendie, au début de la campagne, du siège de Taxawu Senegaal de l’ancien maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, qui fait également office de siège de la coalition dans la capitale.
Des incidents violents ont également éclaté à Saint-Louis (nord). Les autorités policières y ont annoncé l’arrestation de plus 80 individus impliquées dans les échauffourées. Les leaders de la coalition Sàmm Sa Kàddu, ont dénoncé ces arrestations qui concerne majoritairement, selon eux, des gardes du corps du maire de Dakar et tête de leur liste, Barthélémy Dias.
Auparavant, un convoi du Premier ministre avait fait l’objet d’une attaque à Koungheul (centre-est) entraînant la révocation, selon la presse sénégalaise, de deux commissaires de police dans la zone.
L’ancien Premier ministre Amadou Ba, arrivé deuxième à la dernière présidentielle, est à la tête de liste de la Coalition « Jamm Ak Njariñ » (Paix et service, en wolof). Il compte avec ce scrutin confirmer son rôle de leader de l’opposition.
Il a tenu à dénoncer les « scènes de violences verbales et physiques » qui ont souvent impliqué les partisans de Pastef et de Sàmm Sa kàddu, les deux autres coalitions qui pourraient faire obstacle à ses ambitions de confirmer son statut de chef de file l’opposition.
La coalition « Takku Wallu Senegaal » (Ensemble pour sauver le Sénégal, TWS), conduit par l’ancien président Macky Sall, a également fustigé les violences notées au cours de cette campagne électorale. Dirigée par l’ancien chef d’Etat qui a quitté le pouvoir en mars 2024, cette coalition dit vouloir « sauver » le Sénégal de « l’amateurisme » de ceux qui l’ont remplacé à la tête du Sénégal.
Dans son communiqué publié le 14 novembre 2024, la coalition juge que les violences survenues dans cette période sont du fait des discours « haineux », « irresponsables » et « immature d’appel à la vengeance ». Une accusation qui vise principalement Ousmane Sonko et son camp.
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Hormis ces trois grandes coalitions, quelques autres listes dirigées par des personnalités en vue sont à surveiller lors de ce scrutin, dont notamment celles de Thierno Alassane Sall, ancien ministre de Macky avant de s’opposer à lui. Il dirige la Coalition dénommée Senegaal Kese (Le Senegal en exclusivité) en compagnie d’Abdoul Mbaye, un ancien premier ministre de Macky Sall. Dans un communiqué de presse publié ce 25 septembre 2024, la coalition Senegaal Kese entend « défendre les intérêts vitaux de la nation et des citoyens », une fois à l’Assemblée nationale.
En plus des violences verbales et physiques, la campagne électorale a aussi été marquée par le phénomène de la « transhumance politique » vers le camp de l’actuel pouvoir. Le leader de Pastef avait dans le passé sévèrement critiqué cette pratique avant l’accession de son parti au pouvoir, promettant de ne jamais l’avaliser. Mais, comme pour d’autres promesses qu’il avait faites, il est revenu dessus et s’en accommode volontiers.
Plusieurs leaders politiques ont rejoint son camp. Le cas le plus emblématique est celui de Déthié Fall, ancien candidat à la présidentielle de mars 2024. Après avoir été investi sur la liste de la coalition de l’opposition Sàmm Sa Kaddu, il a décidé de soutenir le camp du pouvoir.
D’anciens responsables du régime de Macky Sall ont aussi rallié le pouvoir actuel pour ces législatives. Il s’agit notamment de Maitre Malick Sall, ancien ministre de la Justice et plusieurs autres personnalités de l’ancien régime.
Seul le verdict des urnes dira si les électeurs approuvent ou pas cette pratique, devenue un mal endémique au Sénégal.
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