Ouestafnews – En 2024, le Sahel est devenu l’épicentre mondial du terrorisme, d’après le rapport 2025 du groupe de réflexion, l’Institute for Economics and Peace (IEP, Institut pour l’économie et la paix, en anglais). Ce document établit une réalité alarmante : plus de la moitié des décès liés aux attaques terroristes dans le monde ont été enregistrés dans cette région.
« Le Sahel est la région la plus touchée (par le terrorisme), concentrant 19 % des attaques dans le monde ». C’est le constat fait par le rapport de l’Institute for Economics and Peace (IEP, Institut pour l’économie et la paix, en anglais) sur le terrorisme dans le monde en 2024. Une violence meurtrière, puisque plus de la moitié des décès liés au terrorisme à l’échelle mondiale (51 %) y ont été enregistrés.
Deux organisations dominent la scène terroriste sahélienne : le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à Al-Qaïda, et l’État islamique au Sahel (EIS). En 2024, le nombre de décès liés au JNIM a bondi de 46 %, atteignant 1.454 morts. Ce groupe est responsable des attaques les plus meurtrières, avec une moyenne de dix morts par attentat.
Ailleurs en Afrique de l’Ouest, Boko Haram reste également un groupe terroriste actif principalement dans le nord du Nigéria depuis 2009.
Selon le rapport, le phénomène du terrorisme s’est déplacé ces deux dernières décennies « du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord vers la région du Sahel en Afrique subsaharienne ». En 2007, le Sahel ne représentait que 1 % des décès terroristes mondiaux. Alors qu’au cours des huit dernières années, l’Afrique subsaharienne a enregistré le plus grand nombre de décès dus au terrorisme, selon le rapport.
Cette évolution s’explique par une instabilité politique persistante, des affrontements entre groupes armés et des rivalités géopolitiques croissantes dans le Sahel et l’Afrique subsaharienne en général.
L’Afrique de l’Ouest a, ces dernières années, été le théâtre de nombreux bouleversements politiques majeurs. Plusieurs pays ont traversé des coups d’État ou des crises sécuritaires favorisant la propagation du terrorisme.
Selon le dernier Indice mondial du terrorisme, cinq des dix pays les plus affectés par le terrorisme se situent dans le Sahel, notamment le Burkina Faso (1e), le Mali (4e) et le Niger (5e).
Tous dirigés par des régimes militaires, ces trois pays sont les plus touchés par le terrorisme en Afrique. Récemment sortis de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) suite à des crises politiques et sécuritaires, ils ont formé une confédération, l’Alliance des États du Sahel (AES).
Tout en conservant sa première place de 2023, le Burkina Faso demeure l’épicentre du terrorisme mondial, bien que les décès et attaques y aient diminué de 21 % et 57 % respectivement, indique le rapport. Le Niger, en revanche, a connu une recrudescence dramatique de la violence, enregistrant une hausse de 94 % des décès liés au terrorisme, atteignant un total de 930 morts en 2024, selon la même source.
Le Mali, fragilisé par l’échec de l’accord de paix d’Alger de 2015, est redevenu une cible privilégiée pour le JNIM, qui a multiplié les attaques contre des cibles gouvernementales, notamment à Bamako, en septembre 2024.
L’IEP observe que les auteurs des attaques sont, en général, jeunes et n’ont pas de lien direct avec des organisations terroristes. Leur radicalisation passe principalement par des contenus en ligne, de plus en plus accessible, et par le biais d’algorithmes des réseaux sociaux qui « amplifient les préjugés et exposent ces jeunes à des discours extrémistes », selon l’analyse du groupe de réflexion.
Bien implantés dans la région du Sahel depuis plusieurs années, ces groupes armés contrôlent d’immenses richesses en ressources naturelles, notamment en or. Cette richesse leur permet de recruter, de s’armer et d’étendre leur influence sur des populations souvent laissées pour compte par les États, selon le rapport.
D’une part, la course aux ressources naturelles contribue à l’instabilité de la région, et d’autre part, les changements géopolitiques continuent de façonner la dynamique sécuritaire au Sahel, analyse l’IEP.
Récemment, les trois États de l’AES se sont éloignés de la France, leur partenaire historique dans la lutte contre le terrorisme, pour se tourner vers la Russie en tant que nouveau partenaire militaire. La guerre que mène la Russie en Ukraine a eu des répercussions inattendues, notamment en influençant les alliances militaires au Sahel, selon le rapport.
L’apport de « soutien de l’Ukraine aux rebelles opposés aux régimes sahéliens » soutenus par la Russie et « l’invasion de Koursk » entrainant le retrait des conseillers militaires russes du Burkina Faso, ont révélé les dilemmes stratégiques de Moscou en Afrique, estime le rapport de l’IEP.
Avec plus de 25.000 décès liés aux conflits en 2024, dont 3.885 sont attribués au terrorisme, le Sahel connaît sa pire crise sécuritaire depuis des décennies. Le déplacement des populations, la destruction des infrastructures et l’effondrement des institutions étatiques accentuent la vulnérabilité de la région, estime l’IEP.
Globalement, le terrorisme continue de prendre de l’ampleur dans le monde. En 2024, pour la première fois en sept ans, davantage de pays ont connu plus de détérioration que d’amélioration. En effet, 45 pays ont signalé un impact plus élevé du terrorisme, contre 34 qui déclare avoir connu une amélioration.
Le nombre de pays touchés par au moins un incident terroriste est passé de 58 à 66, le plus haut total depuis 2018. Ce qui signifie une extension de la menace, selon le rapport.
HD/fd
Voulez-vous réagir à cet article ou nous signaler une erreur ? Envoyez-nous un message à info(at)ouestaf.com.