L’anecdote est rapportée par un participant à une conférence culturelle internationale tenue en janvier 2007 au Liberia et qui regroupait divers invités venus des Etats de l’Union du Fleuve Mano (Guinée, Liberia, Sierra Leone).
La cérémonie d’ouverture, à laquelle était présente plus d’une vingtaine de journalistes, n’eut aucun écho dans la presse locale le lendemain. Alors, les organisateurs, fort surpris, de se demander ce qui s’est passé pour qu’aucun journal ne parle d’un évènement d’une "telle ampleur". On leur fera comprendre plus tard que c’est parce qu’ils n’ont "rien donné" aux reporters. Bref, des journalistes tellement habitués à être rétribués pour les articles qu’ils produisent qu’ils ont fini par en faire une règle.
Que l’exemple cité vienne du Liberia n’est qu’un hasard. Cela aurait pu se produire à Abidjan, Dakar, Bamako, Ouagadougou, Freetown, Accra, Abuja…
Dans la quasi totalité des capitales ouest africaines (voire dans toutes les villes africaines), le phénomène existe et tend à prendre de l’ampleur, par la faute de certains "journalistes" qui ont fini de ternir l’image d’une profession, pourtant fondée sur des idéaux nobles et pour laquelle des générations de professionnels se sont sacrifiés pour que triomphent la vérité et la liberté.
Face aux risque de voir décrédibiliser leur métier, des voix au sein même de la corporation commencent à s’élever en Afrique de l’ouest et dans l’ensemble du continent pour qu’il soit mis fin à ces pratiques malsaines, qui à long terme risque de tuer le métier.
"C’est une pratique très répandue dans mon pays aussi et ce n’est pas bien, c’est même déshonorant", regrette le journaliste Ewomazino Alex Okumo, du National Standard Magazine du Nigeria.
Chez le géant de l’Afrique de l’Ouest certains organes de presse comme le "Punch", ont pourtant établi des règles très strictes pour prévenir que leurs journalistes ou collaborateurs ne se laissent aller à des pratiques reconnues comme de la simple corruption. Ni plus, ni moins.
Au Nigeria souligne Alex, ce sont parfois les "responsables mêmes des journaux qui sont régulièrement payés par de grands politiciens pour veiller à leurs intérêts au sein de la rédaction". Devant une telle situation et face aux propositions alléchantes qui ne manquent pas, il faut une "volonté inébranlable" pour ne pas se laisser aller à la tentation, estime-t-il soulignant que "jeune reporter" déjà, il a toujours abhorré la pratique.
"Il s’agit d’un problème complexe, car à côté du problème de régulation, il y a un soubassement économique", estime Kelvin Xander Lewis, directeur de Awoko Newspaper en Sierra Leone, interrogé par Ouestafnews. Lewis assure qu’il ne peut accepter de telles pratiques dans sa rédaction.
Si beaucoup de gens admettent que parfois les journalistes sont mal payés dans plusieurs pays africains, les puristes et les défenseurs de l’éthique estiment que ces conditions ne sauraient aucunement constituer une justification, encore moins une excuse..
"Dès que j’apprends qu’un journaliste a touché de l’argent ou bénéficié de faveurs contre la publication d’un article, je le vire", déclare Lewis, pour qui il s’agit d’abord et "avant tout d’une question de responsabilité individuelle, avant d’être une affaire de responsabilité collective".
Ce point de vue est partagé par Kader Diop, un des doyens de la presse sénégalaise, reconnu par ses pairs pour son intégrité et président du Conseil pour le respect de l’éthique et de la déontologie (CRED) mis en place au Sénégal justement pour combattre les fléaux qui gangrènent la corporation, dont celui de la corruption dans les médias.
Mais l’organe qu’il dirige peine à accomplir sa mission convenablement en raison de plusieurs contraintes, dont notamment le manque de moyens et la difficulté à prouver des pratiques de corruption. S’y ajoute ce qu’il appelle "l’hypocrisie de la presse qui ne se critique pas" et qui fait qu’on parle toujours de ces problèmes en "petits comités", mais jamais de manière publique.
"C’est une pratique insidieuse, difficile à corroborer. On peut supposer, on peut soupçonner, et c’est tout…" estime Kader Diop qui suggère par exemple la publication des états financiers des entreprises de presse. Car selon lui, la vraie corruption se situe à des "niveaux élevés" dans la hiérarchie et certains changements brusques "de statut social ne peuvent s’expliquer". Mais, encore faudrait-il avoir les preuves pour accuser qui que ce soit !
Ce dilemme fait dire à Olayinka Oyegbile, du Daily Times du Nigeria que les responsabilités sont partagées. "Autant les médias sont responsables, autant les décideurs qui corrompent sont coupables", avance Olayinka qui rappelle que la "loi punit et celui qui reçoit et celui qui donne".
"On a l’impression d’avoir affaire au voleur qui crie au voleur", souligne Olayinka interrogé par un journaliste d’Ouestafnews en marge d’une rencontre organisée à Accra par l’Institut International de Journalisme (Allemagne) qui a regroupé des responsables de presse de plusieurs pays ouest africains.
Certains journalistes n’ont pas manqué d’ailleurs de demander que la lutte contre la corruption dans les médias figure désormais parmi les priorités des organisations qui appuient les médias en Afrique.
Ce même souhait a également été exprimé lors d’une autre rencontre internationale ayant regroupé à Nairobi des responsables de médias et des journalistes africains pour que les prochaines activités, prévues dans le prolongement de cette rencontre, intègrent la question de la corruption, afin qu’on arrive à son éradication.
Un rêve qui ferait le bonheur de milliers de journalistes qui quotidennement exercent avec passion, dignité et détermination ce métier pour lequel certains ont sacrifié leur vie alors que d’autres croupissent en prison, justement parce qu’ils refusent toute compromission.(Ouestafnews).
La cérémonie d’ouverture, à laquelle était présente plus d’une vingtaine de journalistes, n’eut aucun écho dans la presse locale le lendemain. Alors, les organisateurs, fort surpris, de se demander ce qui s’est passé pour qu’aucun journal ne parle d’un évènement d’une "telle ampleur". On leur fera comprendre plus tard que c’est parce qu’ils n’ont "rien donné" aux reporters. Bref, des journalistes tellement habitués à être rétribués pour les articles qu’ils produisent qu’ils ont fini par en faire une règle.
Que l’exemple cité vienne du Liberia n’est qu’un hasard. Cela aurait pu se produire à Abidjan, Dakar, Bamako, Ouagadougou, Freetown, Accra, Abuja…
Dans la quasi totalité des capitales ouest africaines (voire dans toutes les villes africaines), le phénomène existe et tend à prendre de l’ampleur, par la faute de certains "journalistes" qui ont fini de ternir l’image d’une profession, pourtant fondée sur des idéaux nobles et pour laquelle des générations de professionnels se sont sacrifiés pour que triomphent la vérité et la liberté.
Face aux risque de voir décrédibiliser leur métier, des voix au sein même de la corporation commencent à s’élever en Afrique de l’ouest et dans l’ensemble du continent pour qu’il soit mis fin à ces pratiques malsaines, qui à long terme risque de tuer le métier.
"C’est une pratique très répandue dans mon pays aussi et ce n’est pas bien, c’est même déshonorant", regrette le journaliste Ewomazino Alex Okumo, du National Standard Magazine du Nigeria.
Chez le géant de l’Afrique de l’Ouest certains organes de presse comme le "Punch", ont pourtant établi des règles très strictes pour prévenir que leurs journalistes ou collaborateurs ne se laissent aller à des pratiques reconnues comme de la simple corruption. Ni plus, ni moins.
Au Nigeria souligne Alex, ce sont parfois les "responsables mêmes des journaux qui sont régulièrement payés par de grands politiciens pour veiller à leurs intérêts au sein de la rédaction". Devant une telle situation et face aux propositions alléchantes qui ne manquent pas, il faut une "volonté inébranlable" pour ne pas se laisser aller à la tentation, estime-t-il soulignant que "jeune reporter" déjà, il a toujours abhorré la pratique.
"Il s’agit d’un problème complexe, car à côté du problème de régulation, il y a un soubassement économique", estime Kelvin Xander Lewis, directeur de Awoko Newspaper en Sierra Leone, interrogé par Ouestafnews. Lewis assure qu’il ne peut accepter de telles pratiques dans sa rédaction.
Si beaucoup de gens admettent que parfois les journalistes sont mal payés dans plusieurs pays africains, les puristes et les défenseurs de l’éthique estiment que ces conditions ne sauraient aucunement constituer une justification, encore moins une excuse..
"Dès que j’apprends qu’un journaliste a touché de l’argent ou bénéficié de faveurs contre la publication d’un article, je le vire", déclare Lewis, pour qui il s’agit d’abord et "avant tout d’une question de responsabilité individuelle, avant d’être une affaire de responsabilité collective".
Ce point de vue est partagé par Kader Diop, un des doyens de la presse sénégalaise, reconnu par ses pairs pour son intégrité et président du Conseil pour le respect de l’éthique et de la déontologie (CRED) mis en place au Sénégal justement pour combattre les fléaux qui gangrènent la corporation, dont celui de la corruption dans les médias.
Mais l’organe qu’il dirige peine à accomplir sa mission convenablement en raison de plusieurs contraintes, dont notamment le manque de moyens et la difficulté à prouver des pratiques de corruption. S’y ajoute ce qu’il appelle "l’hypocrisie de la presse qui ne se critique pas" et qui fait qu’on parle toujours de ces problèmes en "petits comités", mais jamais de manière publique.
"C’est une pratique insidieuse, difficile à corroborer. On peut supposer, on peut soupçonner, et c’est tout…" estime Kader Diop qui suggère par exemple la publication des états financiers des entreprises de presse. Car selon lui, la vraie corruption se situe à des "niveaux élevés" dans la hiérarchie et certains changements brusques "de statut social ne peuvent s’expliquer". Mais, encore faudrait-il avoir les preuves pour accuser qui que ce soit !
Ce dilemme fait dire à Olayinka Oyegbile, du Daily Times du Nigeria que les responsabilités sont partagées. "Autant les médias sont responsables, autant les décideurs qui corrompent sont coupables", avance Olayinka qui rappelle que la "loi punit et celui qui reçoit et celui qui donne".
"On a l’impression d’avoir affaire au voleur qui crie au voleur", souligne Olayinka interrogé par un journaliste d’Ouestafnews en marge d’une rencontre organisée à Accra par l’Institut International de Journalisme (Allemagne) qui a regroupé des responsables de presse de plusieurs pays ouest africains.
Certains journalistes n’ont pas manqué d’ailleurs de demander que la lutte contre la corruption dans les médias figure désormais parmi les priorités des organisations qui appuient les médias en Afrique.
Ce même souhait a également été exprimé lors d’une autre rencontre internationale ayant regroupé à Nairobi des responsables de médias et des journalistes africains pour que les prochaines activités, prévues dans le prolongement de cette rencontre, intègrent la question de la corruption, afin qu’on arrive à son éradication.
Un rêve qui ferait le bonheur de milliers de journalistes qui quotidennement exercent avec passion, dignité et détermination ce métier pour lequel certains ont sacrifié leur vie alors que d’autres croupissent en prison, justement parce qu’ils refusent toute compromission.(Ouestafnews).
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