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Culture : au nom de « l’hospitalité », Dakar expose onze artistes

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Ainsi, pendant près d’un mois le public est invité à venir s’imprégner des onze œuvres réalisées par des artistes européens et africains, dont des Nigérians, des Danois et des Sénégalais qui déclinent leur vision de l’hospitalité à travers des angles différents et des supports variés : vidéo, photographie, peinture, musique…

Si, au premier jour de l’exposition tous les artistes prévus n’avaient pas encore établi leurs quartiers au Raw Material Company, un centre culturel récemment lancé dans la capitale sénégalaise, deux des exposants, Kenneth Balfelt, artiste danois d’une quarantaine d’années et le jeune plasticien sénégalais Ibrahima Niang dit Piniang, n’ont pas eux perdu leur temps et étaient bien là.

Piniang présente un travail vidéographique en animation dans lequel une succession d’images prises au Danemark et au Sénégal mettent en relief le contraste saisissant entre le pays de départ que l’on a voulu abandonner « par désespoir » et la terre d’accueil, si dénuée de rapports humains et si différente. Dans la succession d’images de cette vidéographie aphone intitulée Touki, on découvre un monde angoissant, solitaire où le rêve d’une vie meilleure se révèle en fin de compte un choc dramatique.

« En tant qu’artiste j’ai eu l’opportunité de beaucoup voyager et le rêve que nourrissent les jeunes sénégalais d’aller rejoindre le Nord pensant que c’est le paradis, m’a beaucoup interpellé », affirme Piniang dans un entretien à Ouestafnews, pour expliquer la genèse de son travail.

Ce rêve évoqué par l’artiste a conduit des milliers de jeunes à tenter l’aventure par tous les moyens, souvent illégaux et parfois mortels, à l’image de ces milliers d’Africains qui chaque année essaient de rejoindre les côtes européennes à travers le désert du Sahara ou sur de petites embarcations de fortune. Ce drame dit de « l’immigration clandestine », qui a fait la une des médias en 2008 est aussi présent dans « Touki », symbolisé par l’image de la pirogue utilisée comme moyen de transport, contrastant fortement avec l’image fuyante des bicyclettes dans les rues de Copenhague, la capitale danoise.

Et Piniang de s’interroger sur l’offre d’hospitalité pour l’étranger, pour l’Africain de surcroit, sur ces terres européennes. « L’idée , c’est de voir comment va se dérouler l’intégration à l’étranger où le contact humain, si fort en Afrique, est remplacé par la signalétique et où le regard n’est pas forcément valorisant », souligne l’artiste.

A l’instar de « Touki », le phénomène de « l’intégration » reste le fil conducteur dans une autre œuvre vidéographique, intitulée celle là « Come as you are » (Venez comme vous êtes) où l’artiste danois Kenneth Balfelt jette un coup de projecteur sur les rebuts de la société danoise, au nombre desquels on compte les alcooliques, les drogués et les sans abris. Dans cette société qu’il qualifie de « très individualisée » Balfelt tente à travers son travail, de rendre fréquentables ces personnes fragiles et en rupture de ban.

« Je veux montrer comment nous pouvons inclure ces marginaux dans la vie urbaine, recréer le contact avec les personnes soi-disant ‘normales’, ces personnes ont des droits et aussi des idées », soutient-t-il. Selon Balfelt l’intégration de ses laissés pour compte constitue la solution, car leur interdire l’accès aux endroits publics ou encore détruire leur lieux de refuge ne fait que déplacer le problème.

La vertu de l’hospitalité, selon les organisateurs de l’exposition, loin d’être figée dans le temps et l’espace, voit ses contours se modifier à l’épreuve de la modernité, raison pour la quelle cette exposition qui la version africaine de « Make yourself at Home » (faites comme chez vous) présenté à Copenhague durant l’été 2010 se veut une « investigation des différents termes, conditions et aspects de l’hospitalité dans le monde aujourd’hui ». Ceci, surtout à un moment où « les cadres des mouvements migratoires à travers le monde deviennent de plus en plus denses et complexes».

En dehors des Sénégalais Piniang et Fatou Kandé Senghor (photographie) d’autres artistes africains sont aussi prévus à cette exposition comme le photographe et documentaliste nigérian Georges Osodi, auteur du célèbre « Oil Rich Niger Delta », un reportage photo qui traite du désastre socio-écologique de l’exploitation du pétrole dans le sud du Nigeria.


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