
« Ces ouvrages n’ont jamais officiellement été interdits au Sénégal, aucun arrêté n’a jamais prononcé leur prohibition » , a affirmé Mody Niang, l’un des écrivains qui dit que trois de ses livres ont été censurés. Ces ouvrages « ont été bannis et proscrits au moyen d’une censure inédite et sournoise, à l’image du régime qui nous a gouverné pendant douze ans », a -t-il ajouté.
Selon cet écrivain connu pour sa plume au vitriol contre la famille de l’ex-président Wade, cette censure a consisté à harceler les libraires, dont certains ont été trainés devant la police et dont les commandes passaient par un contrôle tatillon des forces de sécurité.
Abdoulaye Diallo, de la maison d’éditions l’Harmattan confirme ces propos a précisant que cette interdiction est demeurée « insidieuse, sans arrêté d’interdiction et jusqu’au moment où je vous parle, nous avons plus de 300 ouvrages bloqués par la Douane ».
Parmi ces « victimes » de ce que certains ont qualifié « d’ostracisme d’Etat », on compte des hommes politiques comme le défunt Mamadou Dia, ancien président du Conseil sous Léopold Sédar Senghor, des militants de la société civile et des journalistes.
Sur la vingtaine d’ouvrages censurés, figurent essentiellement des essais, dont une dizaine a été présentée au public.
« La censure d’ouvrage est une pratique moyenâgeuse, en démocratie il faut faire en sorte qu’elle disparaisse », commenté le directeur du Warc, le professeur Ousmane Sène.
« Les écrivains rassemblés ici et qui ont le privilège de solliciter ni prébendes ni plan de carrière ne se tairont jamais », a renchéri leur porte-parole Mody Niang.
Deux parmi ces auteurs jadis censurés, en l’occurrence Abdoul Aziz Diop et le journaliste Abdou Latif Coulibaly, auteur de plusieurs brûlots sous les années Wade sont aujourd’hui des collaborateurs du nouveau président Macky Sall, respectivement en tant que conseiller et ministre conseiller.
Revenant sur l’importance de cette cérémonie , l’éditeur Abdoulaye Diallo a fait savoir qu’en plus des informations qu’ils contiennent, ces ouvrages jadis bannis alimentent la réflexion sur l’histoire politique du Sénégal et peuvent servir de « littérature grise » à l’intention des étudiants et des chercheurs.
Au-delà du débat sur la censure, la nécessité d’une politique de promotion du livre et la mise en place d’un fonds d’aide à l’édition sont revenues à maintes reprises dans les échanges avec le public et des appels en ce sens ont été lancés aux nouvelles autorités du pays.
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