Last Updated on 23/09/2014 by Ouestafnews
« Depuis 2011, un certain nombre de projets ont pu être arrêtés ou revus à la baisse, suite au travail des ONGs et à la mobilisation des communautés sur le continent», affirme Frédéric Mousseau, directeur des politiques de l’Institut Oakland (IO), un think Tank basée aux Etats-unis et qui s’est fait un nom par ces nombreuses publications sur ce phénomène.
Dans un document transmis à Ouestafnews, l’Institut Oakland, liste « plusieurs succès », obtenus après quelques années de lutte. C’est le cas notamment au Sud Soudan, dans la province de Central Equatoria, où des leaders communautaires, en allant voir le président de la république ont pu obtenir l’annulation de la cession de 600.000 hectares à l’Américain Nile Trading and Development Inc. (NTD) pour la dérisoire somme de 25.000 dollars.
Des actes similaires, ont aussi eu lieu en Tanzanie, où les cessions aux étrangers sont désormais limitées à 5000 hectares et au Cameroun où après une campagne de la société civile et une mobilisation des communautés locales, le gouvernement a annoncé début 2014, avoir réduit à 20.000 hectares les terres cédées à Herakles farms et à une durée de trois ans. Auparavant ce sont 73 .000 hectares qui avaient été cédés avec un bail de 99 ans à cette entreprise américaine.
En Afrique de l’ouest, le gouvernement malien a récemment décidé de geler l’attribution par l’Etat de titres fonciers pendant six mois et annoncé l’élaboration d’un cadastre national d’ici quatre ans, selon des articles de presse. Des estimations d’associations de la société civile, avancent que près d’un million d’hectares sont concernés par ce fléau.
Au Sénégal où se profile une réforme sur le foncier national, le gouvernement n’a toujours pas apporté une réponse claire à la symptomatique affaire, Senhuile -Senéthanol (du nom de cette entreprise de droit italien qui bénéficie d’une cession de de 22.000 hectares dans le nord du pays pour un projet très controversé de biocarburants.
Arrivé au pouvoir il y a deux ans, le président Macky Sall avait dans un premier temps abrogé le décret de son prédécesseur, cédant la réserve de Ndiael à l’entreprise, avant de revenir contre toute attente sur sa décision, au grand dam des communautés locales qui dénoncent sans cesse la présence de cette entreprise dont les activités menacent leur cadre de vie.
Selon le Landmatrix, instrument spécialisé dans le monitoring de l’accaparement des terres, sur les 10 pays les plus touchés dans le monde, six sont localisés en Afrique, notamment au Sud Soudan (3 millions d’hectares), en République démocratique du Congo (2,7 millions d’hectares), en Congo (2,1 millions), au Mozambique (2,1 millions d’hectares), le Liberia (1,3 millions d’hectares), le Soudan (1,1 millions).
Au vu de ses chiffres, le succès reste tout de même relatif, ce que reconnaissent les acteurs engagés dans le combat.
« Les mesures prises par les gouvernements généralement sous la pression de la société civile sont rares, parfois temporaires et s’avèrent souvent inefficaces », tempère, M. Mousseau de l’IO. Selon lui, les lois se contournent ou sont ignorées, les moratoires ont une fin, et la tendance globale se poursuit, sous la pression d’enjeux financiers colossaux. C’est l’exemple du Mozambique, le moratoire observé n’a duré que trois ans et ensuite le gouvernement a rouvert la porte aux investissements étrangers agricoles.
« Depuis 2012, nous avons perçu dans nos statistique, un fléchissement mais il faut davantage de vigilance parce que la demande de terres à travers le monde va être de plus en plus forte », souligne le Dr Madiodio Niasse, le directeur de l’International Land Coalition (ILC).
Dans les pays en développement un total de 227 millions d’hectares, soit la superficie de l’Europe de l’ouest, ont été vendus ou loués depuis 2001, selon l’ONG Oxfam GB.
L’accaparement des terres reste un phénomène complexe avec des acquéreurs venus des pays industrialisés et doté d’une forte capacité financière sous lequel ploient presque toujours les gouvernements africains très peu préoccupés par le sort de leur peuple.
Alors que la menace de l’insécurité alimentaire reste réelle suite à la ruine de l’agriculture vivrière, ces superficies énormes sont souvent cédées à des étrangers (et quelques rares fois à de gros bonnets locaux) désireux de s’enrichir davantage avec des cultures commerciales comme le caoutchouc et les biocarburants.
Alors que les gouvernements demeurent fébriles face aux sollicitations des investisseurs, des organisations non gouvernementales en Afrique et dans le monde dénoncent aussi fortement, le rôle « néfaste » joué par la Banque mondiale qui à travers sa branche en charge du secteur privé, la Société financière internationale (IFC) est accusée régulièrement de favoriser l’accaparement des terres.
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