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Désinformation : sanctions ou sensibilisation ?

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Ouestafnews – La lutte contre la désinformation est devenue un enjeu majeur à l’ère du numérique, où les fausses informations circulent à une vitesse alarmante. Lors d’un débat space sur X, intitulé « Le rôle de la société civile dans la lutte contre la désinformation », des experts et acteurs de la société civile ont échangé sur les stratégies à adopter pour endiguer ce fléau. L’un des points de la discussion portait sur l’efficacité des sanctions légales face à la désinformation, par opposition aux actions de sensibilisation.

En 2016, le Sénégal a adopté une loi visant à sanctionner la diffusion de fausses nouvelles. Le Code pénal a été modifié pour intégrer des peines allant jusqu’à trois ans de prison et une amende de deux millions de francs CFA pour quiconque publie ou diffuse, par voie de presse ou par tout autre moyen de communication publique, des informations fausses ou mensongères susceptibles de troubler l’ordre public. Cette loi a été mise en place pour dissuader les auteurs de désinformation, mais elle fait aujourd’hui l’objet de débats quant à son efficacité réelle.

Lors du Space organisé le 20 octobre 2024 par le Divan citoyen en collaboration avec Ouestaf News, certains intervenants, même s’ils ne remettent pas en question des sanctions strictes afin de décourager les diffuseurs malveillants de fausses informations, estiment toutefois, que cette approche ne s’attaque pas à la racine du problème.

Emmanuel Diokh, juriste, blogeur souligne cette difficulté : « si l’auteur de la fake news n’est pas au Sénégal et qu’il paie des officines qui sont en dehors du pays qui vont faire de la désinformation, on peut passer à côté. Si on doit rester dans la sanction pénale, qui d’abord, doit identifier l’auteur ainsi que les co-auteurs, on risque de manquer l’essentiel. »

Selon lui, la solution réside plutôt dans l’éducation et la formation des cibles. « Si ces dernières ne sont pas informées et ne comprennent pas qu’il y a des possibilités de manipulation par rapport à l’information, elles ne pourront pas réagir », affirme Diokh.

Le juriste propose d’introduire des programmes d’éducation aux médias dès le collège, afin de cultiver, sur une durée de trois ans, l’esprit critique des jeunes. « Cette attitude ne va certes pas stopper la propagation des fake news, mais va contribuer à diminuer un peu la diffusion de fausses nouvelles », ajoute-t-il.

Dans le même sens, Maguèye Sow plaide en faveur d’une approche centrée sur la sensibilisation plutôt que sur la sanction. « Les sanctions pénales ne sont pas une solution. Il faut plutôt privilégier la sensibilisation », a-t-il déclaré. Selon le chargé de suivi et d’évaluation au National democratic Institute (NDI), les auteurs de désinformation ne sont souvent pas conscients des lois en vigueur, ce qui rend la répression inefficace.

 Le NDI travaille avec différents acteurs de la société et des médias dans la lutte contre la désinformation.

Maguèye Sow a également insisté, sur la nécessité de donner la priorité à l’éducation et à l’implication des acteurs dans l’élaboration des lois : « Il est important de faire participer les acteurs concernés à la conception des lois, afin qu’elles aient un véritable impact ». Il propose des solutions concrètes, notamment l’adoption de chartes de bonne conduite au sein des partis politiques et des coalitions, où la désinformation progresse rapidement. Il a souligné l’importance de repenser les politiques de régulation, en veillant au respect de la liberté d’expression.

L’absence d’une loi sur l’accès à l’information crée un vide propice à la propagation de la désinformation. Les administrations publiques n’ayant aucune contrainte légale, ne facilitent pas l’accès des médias et des citoyens à l’information publique. Tout cela accentue la circulation des fausses nouvelles qui rend vulnérables les populations à la manipulation, estime Emmanuel Diokh.

Mieux Maguèye Sow préconise la création d’un observatoire national dédié à la lutte contre la désinformation. Celui-ci, explique-t-il, regroupera des acteurs de la société civile et d’autres acteurs concernés par la question, Pour lui, la lutte contre la désinformation ne peut reposer uniquement sur les épaules de l’État.

DD/md/ts


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