Last Updated on 07/03/2024 by Ouestafnews
Ouestafnews – Pour la deuxième fois, en l’espace d’un mois, la justice sénégalaise a démontré son indépendance en remettant le président à sa place. Pour la deuxième fois, ce dernier a dû s’exécuter. Sans… broncher. Du moins publiquement. Il se plie à la décision de la justice. Le Sénégal, qui était au bord du gouffre, a-t-il peut être évité le pire.
Fin de journée palpitante pour les Sénégalais en ce 6 mars 2024. En l’espace de quelques heures, ils apprennent que le Conseil constitutionnel a rejeté la proposition de tenir la présidentielle deux mois après la fin du mandat de l’actuel président ; que le gouvernement, dirigé par le premier ministre Amadou Ba, a été dissous ; qu’ils ont un nouveau Premier ministre en la personne de Sidiki Kaba (jusque-là ministre de l’Intérieur) ; qu’ils voteront avant la fin mars 2024 pour se choisir un président.
Les Sénégalais apprennent aussi en cette soirée, riche en rebondissements, qu’une loi d’amnistie générale fort critiquée, qui aura occupé l’assemblée nationale toute une journée et tenu le pays en haleine depuis des jours, venait d’être votée ; que le président n’a pas dissous le Conseil constitutionnel comme on lui en prêtait l’intention au cas où cette juridiction (la plus haute du pays et dont les décisions ne sont susceptibles d’aucun recours) rejetterait ses propositions de tenir le scrutin le 2 juin 2024.
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Jusque tard dans la soirée, dans les groupes Whatsapp, devenus principales sources d’informations et grands lieux de débats, on sent l’effervescence et ça part dans tous les sens. Le sérieux se mêle à la rigolade. L’info aux fake news. Mais les cinq pages scannées contenant la décision du Conseil constitutionnel font le tour des groupes et rassurent. De même que le communiqué du Conseil des ministres fixant la date de la présidentielle.
Ainsi donc, le vote n’aura pas lieu le 2 juin comme souhaité par le président Macky Sall qui avait proposé cette nouvelle date après deux jours de concertations nationales. Mais bien avant la fin de son mandat qui arrive à terme le 2 avril 2024. A la poubelle aussi, les autres conclusions et recommandations du dialogue national initié par le président, pour disait-il, trouver une date consensuelle. Tout cela est contraire à la constitution, lui diront les sept magistrats dont il a sollicité les avis.
Cependant, et en attendant le nouveau décret présidentiel devant convoquer les électeurs aux urnes, le flou subsiste sur a nouvelle date de l’élection présidentielle ; 24 ou 31 mars ? Origine du flou, la décision du Conseil constitutionnel fixant la date du scrutin au 31 mars, alors que le communiqué du conseil des ministres avance la date du 24 mars.
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Qu’il se tienne le 24 ou le 31, seront en lice pour ce scrutin, les 19 candidats déjà retenus par la juridiction suprême. Au moins seize parmi ces candidats avaient eux-mêmes saisi le Conseil constitutionnel pour demander la poursuite du processus électoral, là où des candidats malheureux et recalés demandaient la reprise totale du processus, y compris la validation de la liste des candidats.
Ces derniers développements ont été possibles, en partie, grâce à une forte mobilisation des citoyens qui depuis le 3 février 2024 (lorsque le président a annoncé la première fois son intention de reporter l’élection initialement prévue le 25 février) se sont mobilisés pour dire non. S’en suivront des moments de fortes tensions et d’incertitude.
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La démocratie sénégalaise en prend alors un sacré coup et inquiète la communauté internationale. Un contentieux pré-électoral lourd de dangers se dessine, mais le pays saura dans un dernier sursaut revenir à ce qui en fait « l’exception sénégalaise », dans un espace ouest africain, marqué par l’instabilité et les coups d’Etat militaires.
Dans ce pays ouest africain, souvent présenté comme « modèle », les institutions, bien que vilipendées et critiquées fonctionnent encore, tant bien que mal. Le 15 février 2024 déjà, le Conseil constitutionnel avait annulé le premier décret du président reportant sine die l’élection présidentielle initialement prévue le 25 février 2024.
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Dans la même décision, la plus haute juridiction avait également déclaré contraire à la constitution, la loi votée en procédure d’urgence par l’Assemblée nationale et reportant l’élection au 31 décembre 2024. Le juge constitutionnel avait par la même occasion demandé aux autorités d’organiser le scrutin dans « les meilleurs délais », tout en précisant que le mandat du chef de l’Etat prenait fin le 2 avril.
Mais en lieu et place d’une nouvelle date, le président Sall qui avait suspendu le processus électoral, invoquant une « crise » entre l’Assemblée et le Conseil constitutionnel, a plutôt organisé un dialogue national les 26 et 27 février 2024, et auquel seize candidats sur les 19 retenus ont refusé de participer.
Le 4 mars les conclusions de ce dialogue lui ont été remises, proposant la date du 2 juin 2024 pour la présidentielle, la reprise du processus électoral et son maintien au pouvoir jusqu’à l’élection d’un nouveau président.
Le lendemain, le président, qui a toujours dit qu’il n’ira pas au-delà de son mandat et qu’il quittera le pouvoir le 2 avril, a saisi lui-même Conseil le constitutionnel pour « avis » sur les conclusions, dudit « dialogue national ». La suite on la connait.
FD-TS
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